» Changer à 37 ans ? »
Au café de l’Antwerp, Jenny demande à Patrick Goots comment s’est passé l’entraînement. Il n’en trahira rien. » On ne peut juger un entraîneur en quelques semaines « . Mais Doy Perazic veut tout améliorer, dont son abattage. » Après tant d’années, il est étrange de s’entendre dire ce qu’on doit faire « , poursuit Goots. » Mais je suis ouvert. Jamais je n’ai souhaité le renvoi d’un entraîneur. Je n’ai eu de problème qu’avec Wim De Coninck, qui ne m’alignait pas alors que j’étais en forme. Je n’ai jamais demandé son départ pour la cause. C’est moi qui suis parti « .
Pouvez-vous améliorer votre abattage comme Perazic le dit ?
Patrick Goots : Je pense qu’il s’est mal exprimé. Il veut que les attaquants assument leur part de travail défensif. Je n’aime pas courir une heure mais sprinter sur 30 ou 40 mètres me plaît beaucoup.
Le renvoi de René Desaeyere vous avait surpris et on ne vous avait pas consulté alors que vous êtes membre du conseil des joueurs.
René et moi nous connaissons depuis longtemps. Peu de joueurs ont été consultés, d’ailleurs. Mais il y a toujours des mécontents et quand ils s’épanchent en public ou auprès de la direction quand on perd quelques fois, la décision tombe vite.
René a tout fait pour retirer ce qu’il pouvait de ce noyau. Bon, je dois peser mes mots car on est vite traité de raciste, mais nous avons énormément d’étrangers, qui ont une autre conception de certaines choses. En quatre ans, je peux dire que c’est difficile à gérer. Quand, en route vers Brême, le car s’arrêtent que les sept Belges et Darko Pivaljevic vont boire un café, les Africains restent dans le car. C’est leur droit mais former un groupe, c’est autre chose. Cela doit venir des joueurs.
On a reproché à Desayere des propos grossiers à l’égard des étrangers.
C’est possible. Il m’a insulté aussi. Tout ce que j’en sais, c’est qu’il a eu des mots avec Ouon, sur le banc, à Mouscron. Edwin était furieux d’avoir été remplacé et n’arrêtait pas. René l’a renvoyé au vestiaire. Grossièrement, semble-t-il. Après le match, en rentrant, il a dit : – Nous avons une vedette, ici. C’est tout. La semaine suivante, Edwin était de nouveau repris.
Quelles erreurs tactiques a-t-il commises ?
René voulait que nous jouions beaucoup en profondeur. Beaucoup d’entraîneurs partagent cette vision mais il faut avoir des footballeurs capables de délivrer de longs ballons. Nous n’avions pas de médian capable de le faire. L’équipe était peut-être moins équilibrée que l’année dernière. Le départ de Karel D’Haene est préjudiciable et nous avons peu de gauchers. Les jeunes de Manchester ont besoin de temps. Il y a aussi l’absence de Tony Sergeant. Parfois, l’entrejeu a fait subir à la défense le poids du match. Nous avons très mal vécu notre revers dans le derby. On a dit que certains ne savaient pas ce que représentait un tel match.
Jouer vite
Comment doit jouer l’Antwerp ?
Partir rapidement en contre et tenter de gagner sur notre physique. Il est évidemment difficile de combiner quand on est mené, surtout que le public se retourne contre nous.
Quel problème a surgi entre le staff médical et Desaeyere ?
Il a envoyé Darko chez un ostéopathe de ses amis et ça a suscité des commentaires. Moi, quand je suis blessé, je fais confiance à mon propre kiné, même si je dois tout payer moi-même.
Vous avez eu Desaeyere comme entraîneur à Dessel, à Courtrai et à Beveren. Il a été limogé après une demi-saison à deux reprises, et ici au bout de trois mois. Qu’est-ce qui le rend si fragile ?
La dureté de son approche et du travail, peut-être. René est professionnel jusqu’au bout des ongles, il insiste sur la discipline. Il peut être dur à l’entraînement. Joueur, il l’était déjà. Il est droit. Il peut se fâcher, comme tout le monde. Mais nous nous sommes bien entraînés pendant trois mois car il savait que le groupe ne débordait pas de talent et qu’il devrait le compenser par son engagement.
L’Antwerp use beaucoup d’entraîneurs. Seul Regi Van Acker a tenu. Avait-il un truc ou simplement de meilleurs joueurs ?
L’équipe championne de D2 était meilleure que celle de ces dernières saisons. Stefan Leleu, Geert Emmerechts, Luke Chadwick, Zoran Campara, Da Silva, moi et Darko, William Verbeeck, Gunter Ribus, Jonas De Roeck. Une équipe polyvalente, avec beaucoup de Belges. Il est difficile de souder le noyau actuel. De Coninck s’y est cassé les dents, Henk Houwaart a dû intervenir. Il a fallu ajouter des chaises dans le vestiaire, nous sommes serrés comme des harengs. Ça ne favorise pas la création d’une bonne ambiance.
Tout tourne-t-il autour de vous ?
Comme le nouvel entraîneur, Desaeyere a dit : – Tu as 37 ans, tu n’es pas obligé de participer à toutes les séances. Je l’ai quand même fait ! René m’a régulièrement remplacé parce qu’il n’était pas content. Une fois, notre Qatari Yasser Hussaine a déclaré que Darko, Bernt Evens et moi jouions même quand nous n’étions pas en état. Suite à une légère blessure, nous n’avions repris avec le groupe que le jeudi. La presse a amplifié cette déclaration.
Aimeriez-vous devenir entraîneur ?
Oui mais pas au plus haut niveau. Je vais m’inscrire au cours accéléré. J’entraîne une équipe de café depuis 19 ans. Je sais plus ou moins comment dispenser un entraînement et ça me plaît.
En pensant à Paul Put
Qu’est-ce qu’un bon entraîneur ?
Chacun a ses méthodes mais quand j’entends le président de Lokeren à propos de Paul Put, je me dis : sans résultat, on est un mauvais entraîneur. Si nous avions gagné le derby, René aurait été le meilleur et serait resté.
Vous seriez une source d’énervement dans une équipe…
Certains ne m’aiment pas ? Possible. Il m’arrive de m’énerver quand quelque chose ne va pas ou que je reçois un mauvais ballon. J’énerve les supporters si je suis hors-jeu à quelques reprises. Nous avons six ou sept attaquants. Si je ne marque pas pendant quelque temps, je peux comprendre que d’autres piaffent d’impatience. J’aime rigoler à l’entraînement mais on ne m’a jamais reproché d’être irritant.
Vous occupez-vous trop de vous-même ?
Non. Je veux le bien de l’équipe. J’essaie d’aider Arthur Gomez car l’entraîneur ne parle ni français, ni anglais. Comme Darko le dit, quand ça va moins bien, on vise les leaders.
Etes-vous usé ?
Ça va moins bien qu’à certains moments de la saison passée mais ce n’est pas un problème de vitesse ni d’usure. On a une bonne condition quand on survit à trois mois avec Desaeyere.
Pourquoi ne jouez-vous pas bien ?
En lisant ce que je vais dire, les gens vont penser que j’impute la faute aux autres mais un avant dépend des ballons qu’il reçoit. J’ai 37 ans, on ne va pas me changer. Nous sommes un rien moins offensifs. Or, Darko et moi sommes plus productifs dans un style offensif. Nous ne sommes pas vraiment des récupérateurs.
L’Antwerp ne va pas descendre ?
Euh… Non. Il ne le peut pas. Nous devons tout mettre en £uvre pour éviter ce scénario mais nous allons vivre une longue saison.
Votre dernière en D1 ?
J’aurai 38 ans en avril. Je procéderai à une évaluation à ce moment. D’ici là, je veux tout faire pour aider l’Antwerp. Nous devons assurer le maintien tous ensemble, joueurs, entraîneurs, direction, supporters. Nous avons pris sept points sur 15 au début. Après le derby, c’était comme si nous ne savions plus jouer. Une chose est perfectible : chacun doit soutenir l’équipe.
Et sans Goots ?
S’il semble préférable que je ne joue pas, je m’inclinerai. Je ne vaux pas plus qu’un autre parce que j’ai été quatre fois le meilleur buteur du club et que j’ai remporté deux fois le trophée du joueur le plus méritant. J’ai offert de nombreuses victoires à l’Antwerp la saison passée. Mes 15 buts ont livré 13 points à l’équipe. Les gens placent la barre haut.
» Je dois surveiller mes propos «
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