ANTICRISE

Bruno Govers

Après une semaine mouvementée, le Sporting s’est remis en selle contre Genk. Pour de bon ?

Lundi 30 janvier : réunion avec les supporters

Au programme de la soirée, un tour de table, au club-house du stade Constant Vanden Stock, entre la direction anderlechtoise, représentée par le manager Herman Van Holsbeeck et le nouveau directeur commercial Chris Lioen, ainsi que les principaux responsables de la fédération des cercles de supporters du RSCA (102 au total qui délèguent chacun une ou deux personnes). Le hasard, qui fait mal les choses cette fois, veut que la réunion, prévue invariablement le dernier lundi du mois, se déroule trois jours à peine après le déplacement au Germinal Beerschot où l’équipe a enduré son troisième revers de la saison après avoir déjà courbé l’échine auparavant à Westerlo et au Standard.

Si les fans mauves s’étaient tenus cois à cette double occasion, il en avait été tout autrement au Kiel où, pour la première fois de la saison, une frange d’entre eux avait réclamé la destitution de l’entraîneur, Frankie Vercauteren et de Van Holsbeeck, exigeant le retour de Johan Boskamp et Michel Verschueren.

 » L’entrevue s’est déroulée de manière fructueuse « , observe Michou Dehenain, grand manitou du club d’inconditionnels La Coupe, en face de l’entrée principale du Sporting.  » En ces temps difficiles, nous avons assuré la direction et les joueurs du soutien de nos fans. Mais sans pourvoir garantir une conduite irréprochable de leur part en cas de nouvelle contre-performance. Si nos membres sont généralement de bonne composition, il ne faut quand même pas perdre de vue que les 25.000 spectateurs présents lors de chacune des rencontres à domicile ne sont pas tous affiliés à l’un ou l’autre de nos organes. Il suffit, dès lors, que quelqu’un mette le feu aux poudres pour que tout s’embrase. Il n’en reste pas moins que si nous sommes disposés à faire un effort, nous attendons un même comportement des joueurs. Car on en a ras-le-bol de voir certains errer comme des âmes en peine. A défaut que l’inspiration soit toujours au rendez-vous, il faut des gars qui mouillent leur maillot. Des battants et non des lammekak comme c’est trop souvent le cas « .

Deux jours après, Van Holsbeeck et Vercauteren en rajoutent une couche sur le site du club en exhortant leurs fidèles à se ranger à la cause de l’équipe lors du match face au Racing Genk. Une démarche inédite et pour le moins originale mais qui atteste en même temps de la position de plus en plus fragilisée de deux hommes dans l’£il du cyclone.

Mardi 31 janvier : du scouting pour des prunes ?

Albert Martens est, avec Eddy Van Dale, une étoile montante parmi les entraîneurs des jeunes à Neerpede. C’est lui qui fit le forcing, autrefois, pour convaincre les bonzes de l’Ecole des jeunes du RSCA de garder un certain Vincent Kompany, âgé alors de 12 ans à peine, pour lequel le Racing Lens faisait déjà le forcing. Dans les hautes sphères du centre de formation du club, personne n’était favorable au débours d’un écot pour garder le joueur. Sauf un des administrateurs, Emile Servranckx, qui persuada finalement à son tour l’aréopage du Sporting de fournir un effort financier en faveur du joueur et de sa famille. Détail amusant : aujourd’hui, tout le monde au Parc Astrid, excepté ces deux-là précisément, se vante de la paternité du joueur. Comme autrefois avec Paul Van Himst dont chacun avait repéré en premier lieu le talent…

Soit, fermons la parenthèse et revenons à nos moutons. Et plus particulièrement à Albert Martens, dont les prérogatives ont été étendues depuis l’entame de cette saison. A tel point que c’est lui qui faisait figure de scout pour le club à l’occasion de la CAN. L’envoyé des Mauves a notamment vu à l’£uvre en Egypte un joueur qu’il avait chaudement recommandé à son employeur mais qui, entre-temps, a abouti au Club Bruges : le Sud-Africain Elrio Van Heerden. ( cf . p 62). D’autres noms figurent sur son calepin. Mais convergeront-ils pour autant vers la capitale ?

En effet, malgré une prospection intensive de plusieurs mois, deux transferts seulement ont été réalisés sur base du travail de repérage de la cellule scouting : ceux du Hongrois Roland Juhasz et de l’Argentin Nicolas Frutos, seule recrue du RSCA, par ailleurs, durant le mercato. Pour le reste, rien. Sinon des garçons hautement recommandés par le passé mais qui font actuellement le bonheur ailleurs. Comme Baky Koné à l’OGC Nice, Kim Källström au Stade Rennais et on en passe. Il est étonnant de constater aussi, à l’échelon des allées et venues, que pas une seule entrée enregistrée au cours des trois dernières années ne porte le sceau du manager Jacques Lichtenstein, beau-fils du secrétaire général du club, Philippe Collin. L’ultime en date est, en effet, Daniel Zitka en 2002. De quoi apporter de l’eau au moulin de ceux qui prétendent qu’on ne se fait pas, ou plus, de cadeaux dans la famille, entendu que Monsieur Philippe est le cousin de Monsieur Roger, lisez Roger Vanden Stock.

Mercredi 1er février : les souffrances de Vincent

Toujours à propos de Vince, mais dans le registre de la poisse. Pour s’être déboîté l’épaule à l’entraînement, le Footballeur Pro de l’Année en titre devra, la mort dans l’âme, renoncer aux retrouvailles avec le coach qui l’avait lancé dans le grand bain, Hugo Broos. La saison de tous les tourments pour la plus grande promesse du club. C’est la quatrième fois cette saison qu’il se blesse :

1° les malheurs avaient commencé le 7 septembre lors de Belgique-Saint-Marin quand, après dix minutes à peine, il s’était effacé suite à de violentes douleurs dorsales

2° trois jours plus tard, pour les besoins de la rencontre de championnat entre le Sporting et Mouscron, il avait dû quitter l’aire de jeu après une heure à peine, terrassé toujours par les même maux

3° rebelote lors du match contre le Cercle Bruges, le 21 janvier.

Au total, il n’a débuté que dix matches de la première partie de la saison de D1.

Jeudi 2e février : concert au Parc Astrid

Anderlecht fêtera son centenaire, en 2008, au stade Constant Vanden Stock et nulle part ailleurs. Un déménagement à Neerpede n’est plus à l’ordre du jour, pas plus qu’un investissement sur les hauteurs du plateau du Centenaire. Les projets ne font nullement défaut pour la modernisation du Parc Astrid : d’un côté, l’idée est de porter la capacité du stade aux alentours de 40.000 places grâce à la construction d’un anneau supplémentaire sur les tribunes 2, 3 et 4. La façade principale, située du côté de la rue Théo Verbeeck, resterait intacte, afin de ne pas incommoder les riverains. Mais là ne s’arrêtent pas les plans. Au même titre que Genk, le RSCA entend disposer d’une pelouse chauffée endéans les trois ans.

En plus, est question aussi d’organiser des concerts, à l’image de ce qui se fait déjà au stade Roi Baudouin. Une idée de l’ex-manager du club, Michel Verschueren :  » Pour certains artistes, Forest National ou le Palais des Sports d’Anvers sont trop petits et le Heysel trop grand. Avec une capacité de 24.000 qui sera majorée de 15.000 places, nous nous situons entre les deux. Une demande nous est d’ores et déjà parvenue : celle du Néerlandais André Rieu. Pour l’heure, la faisabilité d’une telle entreprise est à l’étude ainsi que ses implications concernant le terrain. Il va de soi que l’aire de jeu ne doit pas pâtir de ce genre d’événement « .

Vendredi 3 février : l’union sacrée

En conférence de presse, le président Roger Vanden Stock en personne plaide l’union sacrée et assure le coach de son soutien inconditionnel jusqu’à la fin de l’exercice en cours… quelle que soit la tournure des événements dans les jours et semaines à venir. Une démarche que certains médias jugent aussi puérile que le message délivré la veille par Van Holsbeeck et Vercauteren. Mais qui n’en constitue pas moins un signal quand même. En tout premier lieu sur la position du club vis-à-vis de l’entraîneur : les joueurs devront encore composer avec l’ancien Petit Prince du Parc, que cette perspective les réjouissent ou non. L’année passée, dans les mêmes circonstances, mais sans intention claire de la part de la direction, on se souviendra qu’un non match de l’équipe à La Gantoise avait scellé le lot de Broos.

Alors pourquoi cette mesure de faveur pour le mentor en place ?

1° Tout d’abord, parce que les implications sont différentes. Broos avait encore une année de contrat à honorer avant d’être poussé vers la porte de sortie. Vercauteren, de son côté, en a encore quatre, vu que son bail prévoit une passerelle automatique vers un statut de directeur technique portant sur une durée de trois ans.

2° Deuzio, il ne ferait évidemment pas bon genre de sacrifier en pleine saison, sur l’autel de résultats navrants, un homme censé par la suite montrer la marche à suivre au plan sportif.

3° Finalement, avec deux points de retard à peine sur le duo de tête au seuil de la 21e journée, tout reste bien sûr possible dans la conquête du titre, l’objectif numéro 1 de la saison. Ce qui n’était déjà plus le cas voici un an, à la même époque.

Reste que les aléas du métier pousseront peut-être le coach en place à se coiffer plus tôt que prévu de la casquette de décideur. Dans ce cas, outre la construction d’une nouvelle équipe, se posera aussi celle de son futur architecte. Les noms qui circulent : Albert Cartier (entraîneur du FC Brussels), Johan Boskamp (Stoke City) et Trond Sollied (Olympiacos). En effet, en décembre dernier, une entrevue a eu lieu, au Grand Hôtel de Waterloo, entre le coach norvégien et Pär Zetterberg, futur cadre technique des Mauves. Au départ, la discussion entre les deux hommes a porté sur le club athénien, que Zet a connu comme joueur pendant trois ans. Mais la conversation a porté aussi sur le football belge et Anderlecht. A cette occasion, Sollied a affirmé qu’une nouvelle expérience en Belgique, et au RSCA en particulier, ne serait nullement pour lui déplaire. Et si, entre-temps, le Nordique a continué à faire ses emplettes sur notre sol, en acquérant tour à tour Marco Né, Michal Zewlakow et Tomislav Butina pour la saison prochaine, il ne faut pas en déduire pour autant une vision ou un engagement à long terme. On le sait, Sollied a l’art de manier le contre-pied.

Samedi 4 février : le résultat et la manière

Pour la 21e fois en autant de journées, Frankie Vercauteren aligne, pour les besoins du match contre Genk, un 11 différent. Avec, par rapport au déplacement au Kiel, les retours de Serhat Akin, Mark De Man, Pär Zetterberg ainsi que d’ Yves Vanderhaeghe, qui présente la particularité de ne pas encore avoir perdu avec le Sporting cette saison en D1 en tant que titulaire. L’entraîneur des Mauves y va également d’une nouvelle animation : place au 4-3-2-1 avec Nicolas Frutos comme élément de plus avancé, soutenu de près sur les flancs par Akin et Christian Wilhelmsson et avec Zet à la pointe inférieure du losange, flanqué de Bart Goor et Vanderhaeghe. A Genk, on n’y voit que du feu. Le pauvre Seyfo Soley surtout qui, en sa qualité de stoppeur dans une défense à cinq, se demande qui tenir, entendu que son compère Tomislav Mikulic s’occupe déjà de l’Argentin. Il faut un bon quart d’heure pour que le solide Gambien, sur injonction de son coach, Hugo Broos, se décide enfin à monter d’un cran. Mais dans l’intervalle, Anderlecht mènent déjà 2 à 0 et le match est plié. Malgré un sursaut du Racing, un nouveau coup d’accélérateur des Mauves fixe le score à 4-1 en deuxième mi-temps. De quoi autoriser le kop anderlechtois à scander Merci Hugo sur l’air des lampions. Du coup, la crise est conjurée.

Reste à voir si le Sporting est relancé pour de bon. Compte tenu de son potentiel, il tombe sous le sens que le noyau mauve et blanc n’a pas de rival en Belgique. Le hic, c’est que la qualité seule ne suffit pas pour s’imposer. Il faut aussi être agressif dans les duels. Les Sportingmen en ont indéniablement fait la preuve contre les Limbourgeois. Quel contraste avec les moutons de Panurge qu’ils étaient encore une semaine plus tôt, au stade Olympique d’Anvers ! Pour probante qu’elle soit, la victoire de Zet et les siens face au Racing n’aura de réelle signification que si elle trouve confirmation, dans quelques jours, lors du déplacement toujours périlleux à Mouscron et, une semaine plus tard, à l’occasion d’un autre match pas comme les autres : le derby bruxellois. Ce n’est qu’à ce moment qu’on pourra juger ce que le RSCA a réellement dans les tripes.

BRUNO GOVERS

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