110 % contre Dortmund

Le Slovène devient le patron que Bruges espérait.

Pourquoi le Club bat-il le Borussia Dortmund mais ne parvient-il pas à prendre la mesure de La Louvière ? Pourquoi Nastja Ceh a-t-il éclaté contre le géant allemand alors qu’il a été invisible en championnat ? Comment contrer Koller, Amosoro, Rosicky, Addo et consorts si on n’a pas de prise sur Odemwingie, Djamba-Shango, Ishiaku et Murcy ? Pourquoi le Club peut-il se qualifier au détriment de Dortmund ?

Ceh (25 ans) :  » Nous avons toujours peiné contre La Louvière. Quand on rate des occasions toutes faites à 1-0 et à 2-1, on se crée des problèmes. Nul n’est à l’abri d’un faux-pas. Peut-être est-il dû aux matches internationaux qui ont précédé ce match. J’étais fatigué : la Slovénie a joué à 17 h, par 35 degrés. Contre les Allemands, c’est différent : Dortmund joue tandis que les Loups misent sur le contre. Et nous serons en superforme « .

A quel match vous attendez-vous ?

Nastja Ceh : Nous allons tout mettre en oeuvre pour nous qualifier pour la Ligue des Champions, comme la saison passée. Pour cela, comme le répète l’entraîneur, nous devrons être dans un deuxième très bon jour et avoir un brin de chance. Sinon, nous reporterons nos ambitions sur la Coupe UEFA. Il faut être attentif et agressif dès le coup d’envoi, comme à l’aller. Chacun doit être conscient de sa mission, à chaque position. Si c’est le cas, je suis convaincu qu’on verra un très bon Club. N’oubliez pas que Dortmund doit marquer, donc attaquer. Ça n’implique pas que nous jouerons le nul. Cependant, nous aurons peu d’occasions. Il s’agira de les exploiter.

Et ce n’est pas la principale qualité du Club…

Je n’en suis pas si sûr. Nous avons de bons attaquants mais marquer au bon moment n’est pas si simple. Par exemple, à l’aller, ma première occasion n’était pas si bonne que ça. J’aurais dû passer le ballon à Sandy, d’ailleurs, comme l’entraîneur l’a souligné par après.

A combien estimez-vous vos chances ?

Nous formons une équipe au coeur gros comme ça. Le savoir nous convainc que nous pouvons réussir. Bruges, c’est un pour tous, tous pour un. Nous devrons surpasser le Borussia sur ce plan.

Ça relève de la mission impossible face à des Allemands.

Mais il y a beaucoup d’étrangers dans cette équipe (il rit) ! Nous n’avons pas peur de leurs 60.000 supporters. Il y a un an, ils étaient encore plus nombreux à Barcelone, ce qui ne nous a pas empêchés de gêner le Barça. Un nouveau 3-2 ne serait pas mal !

Le forfait de Flavio est positif ?

Je ne pense ni à Flavio ni à Wörns. Nous ne devons pas nous occuper de la composition adverse. Le Borussia a énormément de bons joueurs. Comme nous, ils n’en restent pas moins des êtres humains. Nous devons nous concentrer sur notre jeu.

Gaëtan Englebert est de retour. La concurrence n’est-elle pas pesante ?

Il faut se battre pour sa place. Le choix appartient à l’entraîneur. Si j’avais continué à me comporter comme à mes débuts, je jouerais en D2, voire en Slovénie. Heureusement, j’ai changé, mentalement, et j’ai appris ce que c’était de travailler. Je me suis adapté à ce que l’entraîneur attendait de moi. Mon père m’a beaucoup aidé. Il continue à me dire : – Ne t’énerve pas, travaille. Fais de ton mieux, afin que l’entraîneur croie en toi.

 » Stoica est bon, comme les autres  »

Alin Stoica semble avoir compris le message aussi. Ses performances vous surprennent-elles ?

Je ne regarde que les images auxquelles l’entraîneur nous confronte. Pas la totalité des matches. Je ne peux donc juger Alin. Il est bon, comme tous les autres. Chacun se livre à 110 %. C’est pour ça que nous avons battu Dortmund ! La saison passée, ça allait bien avec Timmy et Gaëtan ; jusqu’à présent, ça allait aussi avec Alin. L’absence de l’un ou l’autre ne change pas grand-chose.

En seconde mi-temps contre le Borussia, le triangle médian a été renversé. Vous avez reculé à côté de Simons, derrière Stoica.

Le Borussia s’était fait plus offensif et nous a posé des problèmes à la reprise.

Vous semblez devenir le patron de Bruges, ce qu’on attendait de vous, en fait.

Croyez-moi ou non mais ça ne m’intéresse pas. Tout ce que je veux, c’est jouer de mon mieux. Je joue pour l’équipe, pas pour moi. Seul, un joueur n’est rien. Je suis très heureux de faire partie d’une équipe pareille et j’essaie de faire de mon mieux.

Comment avez-vous récupéré aussi vite de votre opération au ménisque ?

Je l’ignore ! A mon gré, j’ai dû observer un repos bien trop long. Je n’ai pas l’habitude. C’était ma première blessure. Normalement, pendant les vacances, je joue au tennis tous les jours. C’était impossible, cette fois. De retour à Bruges, mon genou était enflammé et j’ai dû observer un nouveau repos de deux semaines. Je n’ai repris la course que vers le 20 juillet.

Vous avez quand même eu de la chance, puisque vous vous êtes blessé lors du dernier match de la saison.

C’est vrai. C’eût été pire en plein championnat. En plus, je n’ai pas perdu toute ma condition. Sinon, je ne jouerais pas deux matches par semaine, avec Bruges et la Slovénie. Mais je vis en fonction du football. Je suis frais, bien dans ma tête et dans ma peau. Je suis marié, mon épouse est à mes côtés, je me plais à Bruges et je fais mon boulot.

Vous ne cessez de progresser. Vous aviez déjà technique et vista. Vous êtes plus solide et votre abattage s’est amélioré, comme en témoignent vos infiltrations en première mi-temps contre Dortmund.

Je le sens mais en fait, c’est parce que je joue en confiance, ce qui me permet d’exploiter pleinement mon potentiel. Je sais comment évoluer à ma position, j’apprends à chaque match. Des joutes de ce niveau constituent évidemment l’occasion rêvée de montrer ce dont nous sommes capables et de progresser encore.

Il étonne les Slovènes !

La semaine dernière, vous avez affronté la Hongrie avec la Slovénie, en match amical. Etes-vous titulaire ?

Je ne sais pas (il rit). En un an, tout a changé pour moi, là aussi. Je viens de disputer mon troisième match d’affilée. Il a été pénible, à cause de la canicule, mais je suis content. J’ai délivré un nouvel assist.

Vous avez évolué derrière les attaquants, soutenu par deux médians défensifs. C’est votre place de prédilection ?

Oui mais je me plais aussi, sur le côté gauche.

Que pensent Srecko Katanec et Bojan Prasnikar, les ancien et actuel sélectionneurs slovènes, de votre évolution ?

Ils sont surpris de me voir courir autant et abattre tant de travail défensif. Prasnikar a apprécié ce que le Club et moi avons réussi contre Dortmund. Il devait assister au match mais il a eu un empêchement et a suivi la rencontre à la télévision. Il a été surpris par notre victoire et le nombre d’occasions que nous nous sommes créées face à une équipe de ce niveau.

Vous êtes donc content d’avoir serré les dents à vos débuts ici ?

Que oui ! La première saison a été aussi difficile que cruciale. Ce que j’ai appris me sert en football mais aussi dans la vie.

Il ne faut jamais douter de soi !

En effet. Il ne faut jamais penser qu’on n’y arrivera pas. Regardez-moi : j’étais considéré comme un transfert raté et quoi d’autre encore (il grimace) ?

Ça vous a-t-il fouetté ?

Je n’ai pas été mu par un sentiment de revanche envers ceux qui n’avaient pas cru en moi. J’ai voulu me prouver que je pouvais réussir.

Ce qu’on écrit vous laisse de marbre ?

Je suis payé pour jouer, vous pour écrire. Certains joueurs trient les journalistes en fonction du bien ou du mal qu’ils écrivent sur eux. Mais voilà : deux semaines plus tard, la donne a changé. Le bon journaliste a écrit quelque chose de négatif et vice-versa. Je comprends qu’il est impossible d’être toujours positif à l’égard de quelqu’un. Ce ne serait pas réaliste non plus, car tout le monde commet des erreurs, dans la vie. Si un journaliste ne cessait d’être positif, on finirait par penser de lui qu’il est arriéré ou qu’il est acheté (il rit). Seule la réalité m’intéresse. Ça veut dire que je veux jouer de mon mieux et que ma réussite dépend avant tout de moi-même. L’essentiel est de croire en soi-même. Comme je l’ai déjà dit, j’ai appris qu’il faut être prêt à tout, mentalement et physiquement, à tout moment. Je remercie les supporters qui m’ont toujours soutenu.

Vous êtes l’idole des jeunes. Quel message leur adresseriez-vous ?

Travaillez dur et ne pensez qu’au football. Amusez-vous avec le ballon. Respectez les autres et vous-même. Sachez aussi que tout le monde n’est pas pétri de bonnes intentions, que le monde du foot n’est pas toujours honnête mais gardez-vous des conclusions hâtives. Mûrissez vos actes et vos décisions.

Avez-vous une idole ?

Beckham pour ses coups francs et Zidane pour son style de jeu.

Avez-vous un maillot d’eux ?

Non mais j’espère avoir bientôt celui de Zidane. J’ai déjà essayé quand la Slovénie a joué contre la France mais Zahovic m’a devancé. La semaine prochaine, nous affrontons à nouveau l’Hexagone. Je vais retenter ma chance.

Comment allez-vous vous y prendre ? En le lui demandant avant le match ?

Non (il éclate de rire). J’en reviens à la concentration. Je ne penserai à ce maillot qu’après le match, au début de la troisième mi-temps. Je devrai donc être concentré afin d’y penser dès le coup de sifflet final et de piquer un sprint vers Zidane (il rit).

Qu’en ferez-vous ?

Je conserve tous les maillots échangés à la maison, en Slovénie.

Qu’est-ce que ça vous apporte ?

C’est en prévision de l’avenir, pour les montrer au fils que j’espère avoir un jour. Car une fille, ça ne l’intéressera pas, je pense…

Comment envisagez-vous votre avenir sportif ?

Croyez-le ou non mais je ne pense qu’au match suivant. Je n’ai pas envie de connaître mon avenir. Ce qui se passera dans six mois ou dans un an ne m’intéresse pas. Je ne perds pas de temps à y réfléchir. Ce serait gaspiller mon énergie. En lui-même, l’avenir n’existe pas. Il est déterminé par ce que vous faites dans le présent. Vous jalonnez votre avenir jour après jour. Je ne dois donc pas me tracasser à ce sujet si je fais chaque jour ce que je dois.

 » J’espère avoir bientôt un maillot de Zidane « 

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