"En tant que congrégation, nous avons parcouru un long chemin au cours des deux dernières décennies, nous avons tiré les leçons du passé", a déclaré lundi l'ex-supérieur général de la congrégation pontificale des Frères de la charité de Gand, René Stockman. © Getty Images

Violences sexuelles au sein de l’Eglise: « Nous avons tiré les leçons du passé »

Plusieurs témoins ont pris la parole lundi lors de la commission d’enquête parlementaire consacrée aux violences sexuelles au sein de l’Eglise.

« En tant que congrégation, nous avons parcouru un long chemin au cours des deux dernières décennies, nous avons tiré les leçons du passé », a déclaré lundi l’ex-supérieur général de la congrégation pontificale des Frères de la charité de Gand, René Stockman. Le supérieur provincial des Jésuites Marc Desmet a également fait référence au passé devant la commission d’enquête parlementaire consacrée aux violences sexuelles au sein de l’Église, « mais c’est un passé entre guillemets, car pour les victimes, cela continue aujourd’hui et se poursuivra dans le futur ».

Cette commission d’enquête parlementaire a été mise sur pied après la diffusion du documentaire « Godvergeten », dans lequel ont témoigné des victimes de violences sexuelles perpétrées au sein de l’Église. Les violences ont été commises entre autres dans des écoles et des établissements de soins gérés par des congrégations catholiques, dont les Frères de la Charité et les Jésuites.

Des témoins avaient déjà précédemment accusé M. Stockman d’avoir étouffé des affaires, d’avoir protégé les auteurs et toléré les violences commises sur les enfants. Selon les témoignages de policiers et d’autres personnes, l’homme aurait en outre fait pression pour ne pas enquêter davantage sur les plaintes reçues. Il a nié les faits. « Ce policier a déformé la vérité », a-t-il lancé.

M. Stockman a ensuite présenté ses excuses devant la commission, au nom de sa congrégation. « La congrégation souhaite présenter ses excuses et veut faire tout ce qui est possible pour s’assurer que cela ne se reproduise plus jamais. En aucun cas, une préoccupation déplacée pour le nom de la congrégation ne peut justifier la dissimulation d’un soupçon raisonnable d’abus de quelque nature que ce soit », a-t-il soutenu.

« En tant que congrégation, nous avons parcouru un long chemin au cours des deux dernières décennies, nous avons tiré les leçons du passé et nous avons réussi à développer une grande sensibilité à l’égard de toute forme d’abus possible », a également ajouté M. Stockman.

« Pour moi, ‘Godvergeten’ est quelque chose de bon et une nécessité vitale, pour les victimes mais aussi pour l’Église », a à son tour commenté Marc Desmet. « Dans ce documentaire, l’Église apparaît dans toute sa laideur. C’est une histoire appartenant au passé, mais c’est un passé entre guillemets, car pour les victimes, cela continue aujourd’hui et se poursuivra dans le futur (…) Les abus sexuels commis par les jésuites sont indéniablement une histoire du passé, perpétrée par un nombre limité de membres. »

Un autre responsable des jésuites, Theo van Drunen, a étayé l’affirmation. Selon lui, 93 signalements ont été reçus au fil des ans. Ils ont abouti à 58 dossiers de plainte, dont 51 ont été finalisés. Les violences ont été perpétrées par 30 auteurs, dont quatre sont encore en vie et octogénaires. Dans les trois quarts des cas, les auteurs ont une ou deux plaintes à leur actif, mais il y a aussi des hommes cumulant trois, cinq ou sept plaintes. Un peu plus de la moitié des violences ont été commises au sein de collèges. Alost et Turnhout sont surreprésentées, suivies par Gand. Les trois quarts des cas ont eu lieu dans les années 1960, 1970 et 1980. Il n’y a aucune plainte pouvant faire l’objet d’une enquête enregistrée après 1993.

L’abbé de l’abbaye de Termonde, Gerard Van Malderen, a lui aussi réagi : « L’idée que de tels crimes se soient produits chez nous (plusieurs cas de violence ont été identifiés au sein de l’ancienne école abbatiale, NDLR) et que nous ne l’ayons pas remarqué me rend la situation insupportable« . M. Van Malderen a ajouté qu’il était lui-même un ancien élève et qu’il y avait travaillé en tant qu’enseignant tout au long de sa carrière. « Mais je n’y ai jamais été confronté personnellement à l’époque. »

Plusieurs députés, dont Sophie De Wit (N-VA), Ben Segers (Vooruit), Stefaan Van Hecke (Groen), Greet Daems (PVDA) et Olivier Vajda (Ecolo) ont posé des questions sur les raisons pour lesquelles les violences perpétrées avant 2010 semblaient souvent avoir été dissimulées.

« Avant 2010, je peux supposer que l’accent a été mis sur la bonne réputation des collèges et de l’ordre. Je peux comprendre que les gens aient perçu cela comme une dissimulation », a argumenté M. Desmet, qui a évoqué une « véritable ignorance ».

« Il ne s’agit pas de chercher une excuse. J’ai parlé à des victimes qui m’ont dit que leur mère les avait giflées lorsqu’elles avaient parlé des violences. Il est donc possible que certains directeurs d’école aient réagi de la sorte », a répondu M. Van Drunen.

« Avant, les gens ne parlaient pas de sexualité. Les relations sont complètement différentes de ce qu’elles étaient auparavant. L’intérêt de l’enfant est plus important », a également estimé M. Desmet.

« Il y a eu des erreurs administratives importantes. Dans plusieurs cas, nous pensons qu’il aurait fallu faire quelque chose. Des bourdes incroyables ont été commises. Même dans les années 50 et 60, les gens savaient qu’ils ne devaient pas s’approcher des enfants », a poursuivi M. Van Drunen.

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