Syndrome des ovaires polykystiques (SOPK): quelle est cette maladie peu connue?
Le SOPK touche entre 7 et 15% des femmes en Belgique et pourtant, ce syndrome est très peu connu. Risques cardiovasculaires, de diabète, d’infertilité: qu’implique le SOPK pour les patientes diagnostiquées ?
Chayma est une jeune étudiante de 25 ans. Il y a trois ans, elle était réglée une ou deux fois par an. Cette aménorrhée n’était pas le seul symptôme d’un dérèglement hormonal : « Je prenais énormément de poids alors que je me nourrissais correctement. » Outre son cycle menstruel irrégulier et sa prise de poids inexpliquée, Chayma a aussi eu de l’acné et de hyperpilosité. « Dans l’immédiat, ce n’était pas un problème, mais j’ai commencé à mettre tous ces symptômes bout à bout et je me suis rendue compte que ce n’était pas normal. ». Elle a entamé des recherches pour comprendre l’origine de ces changements dans et sur son corps. En ligne, elle découvre l’existence du SOPK, le syndrome des ovaires polykystiques.
Des kystes sur les ovaires ?
Mais qu’est-ce que le SOPK ? D’après Anne Delbaere, Chef du service d’obstétrique et de gynécologie à l’Hôpital Erasme à Bruxelles, « c’est un syndrome qui est assez fréquent puisqu’il touche 7 à 15 % des femmes. ». Son nom, syndrome des ovaires polykystiques, est un peu trompeur : les personnes souffrant de cette maladie n’ont pas de kystes. « Ce sont en fait des follicules qu’ont toutes les femmes mais qui se retrouvent en plus grand nombre chez les patientes atteintes du SOPK. », rajoute l’experte. En début de cycle menstruel, chaque ovaire dispose de 5 à 10 petits follicules. L’un d’entre eux deviendra dominant, et à terme, un ovocyte fécondable. Mais un taux d’androgène trop haut bloque la maturation de ces follicules, qui s’accumulent donc dans les ovaires. A l’échographie, l’image que renvoient ces follicules est celle de petites boules sur les ovaires, ressemblant à des mini-kystes.
Des symptômes variables
Pour Anne Delbaere, le SOPK « est caractérisé surtout par des irrégularités de cycle qui peuvent s’accompagner de dysovulation, c’est-à-dire des cycles qui ne sont pas nécessairement ovulatoires. Ce sont des cycles longs, de plus de 35 jours. Quand il y a ces troubles de l’ovulation, on parle aussi de problèmes de fertilité. ». La moitié des personnes présentant le SOPK auraient des problèmes de fertilité.
Les irrégularités du cycle menstruel sont un premier indicateur pour diagnostiquer le syndrome mais il y a d’autres symptômes observés. Par exemple, l’hyperandrogénie, la production excessive d’hormones masculines, comme la testostérone. Cette surproduction peut avoir comme conséquences de l’hirsutisme (une hyperpilosité), de l’acné et une perte de cheveux.
D’après la gynécologue, le SOPK est un syndrome hétérogène. Il se traduit par différents symptômes en fonction de la personne touchée. C’est pourquoi, parmi les trois critères de diagnostic (l’irrégularité des cycles, l’aspect échographique, et l’hyperandrogénie), seuls deux doivent être décelés pour qu’une patiente soit diagnostiquée avec le SOPK.
Complications cardiovasculaires
Pour l’experte Anne Delbaere, « c’est une pathologie qui s’accompagne sur le long terme, d’un risque cardiovasculaire (avec de l’hypertension artérielle) et de diabète, (avec plus d’insulinorésistance), surtout pendant la grossesse. ». Un surpoids favorise la résistance à l’insuline, et donc le risque de développer un diabète de type 2. Mais aussi, la résistance à l’insuline accentue l’hyperandrogénie, cause du SOPK et facilite la prise de poids. Pour l’experte, un déreglement hormonal peut amener à une surchage pondérale comme une surcharge pondérale peut amener à un déreglement hormonal… bref, un vrai cercle vicieux et une double influence très probables.
SOPK : quelle(s) cause(s) ?
Les causes du SOPK ne sont pas claires. Une certitude: la susceptibilité génétique rentre en jeu : » A l’origine du syndrôme, ce n’est pas une seule mutation sur un seul gène, c’est polygénique. Ce qui rend le SOPK complexe et pas complètement résolu « , explique Anne Delbaere, de l’hôpital Erasme. Environ une vingtaine de gènes de prédisposition au syndrome ont été identifiés. Les antécédents familiaux constitueraient un surrisque, les enfants d’une personne présentant le SOPK ont 30% de chance de le présenter à leur tour.
En parallèle, l’hygiène de vie a aussi son rôle à jouer : « La génétique est un terrain qui va être exacerbé par l’obésité », explique Anne Delbaere. Les variations de poids ont une influence sur les cycles menstruels.
La question de l’influence de perturbateurs endocriniens sur les déreglements hormonaux a déjà été soulevée. D’après Anne Delbaere, cette hypothèse est « possible mais pas encore démontrée. Le lien entre SOPK et perturbateurs endocriniens est, pour moi, loin d’être fait. On n’a pas de preuve scientifique à ce sujet actuellement. ».
Vivre avec le SOPK ?
Chayma, en prenant la pilule, a vu tous ses symptômes d’hyperandrogénie disparaitre : moins de poils, plus aucune imperfection, perte de poids… « En tant qu’étudiante, je n’ai pas la possibilité de faire attention au SOPK. Ma gynécologue a été défaitiste : soit je prenais la pilule, soit j’apprenais à vivre avec le syndrome. » Et vivre avec, c’est possible, mais il faut changer ses habitudes, son mode de vie, par l’alimentation ou le sport, par exemple. Chayma n’avait pas envie de « gérer cela en plus de tout le reste ».
Il n’existe pas de traitement du SOPK à proporement parler mais il est possible de gérer les symptômes de différentes façons :
- En perdant du poids, si nécessaire;
- En prenant des progestatifs ou des pilules oestroprogestatives (des pilules contraceptives) qui bloquent la sécrétion d’androgènes;
- En corrigeant, si voulu, les conséquences de l’hyperandrogénie (l’acné, l’hyperpilosité…);
- Traiter les anomalies métaboliques (la glycémie, l’hypertension et le diabète), déjà chez les plus jeunes;
- En induisant une ovulation si une grossesse est voulue.
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