Variant Delta: les vaccinés vont-ils devoir se (re)masquer ?
Avec la résurgence des cas de Covid-19 aux Etats-Unis et ailleurs en raison du variant Delta, les personnes entièrement vaccinées en sont à se demander si elles doivent à nouveau porter le masque en intérieur.
Les vaccins demeurent extrêmement efficaces pour éviter une hospitalisation et prévenir les décès, et les infections parmi les personnes immunisées restent rares. Mais selon certains experts interrogés par l’AFP, il n’existe pas d’approche universelle qui conviendrait à tout le monde. Les gens doivent prendre en compte certains facteurs comme le taux de transmission dans leur environnement, les niveaux de risques personnels, et leur propre tolérance au risque pour les aider à décider ce qui leur conviendrait le mieux.
97% des hospitalisations
Les Centres de prévention et de lutte contre les maladies (CDC), principale agence fédérale de santé publique aux Etats-Unis ont abandonné leur conseil de port du masque pour les personnes vaccinées en mai. A ce moment-là, le nombre de cas de Covid-19 était en chute libre, et l’administration Biden était encline à proclamer un retour à la normale dans le sillage d’une campagne de vaccination qui battait son plein. Mais jeudi, ce sont plus de 50.000 cas qui ont été recensés dans le pays. Une résurgence provoquée principalement par le variant Delta, et concentrée en grande partie dans les régions aux taux de vaccination les plus faibles.
Il faut toutefois noter que la hausse des cas ne s’est pour autant pas traduite par une hausse proportionnelle des hospitalisations et des décès. Environ 200 décès quotidiens sont à déplorer, un chiffre bien moindre que les 3.500 enregistrés chaque jour lors de l’apogée de la vague hivernale. Plus de 97% des hospitalisations concernent les personnes non-vaccinées, a affirmé la semaine dernière la directrice des CDC Rochelle Walensky, tandis que les décès se comptent à 99,5% également chez les non-vaccinés, a souligné le weekend dernier le médecin-chef des Etats-Unis, Vivek Murthy.
Rochelle Walensky a défendu jeudi la position des CDC sur le port du masque, insistant sur le fait que l’agence avait toujours affirmé que les individus devaient prendre en compte les conditions locales. « Si vous êtes dans une région qui a un fort taux de cas et un faible taux de vaccination, et où les cas du variant Delta sont en hausse, vous devriez certainement porter un masque si vous n’êtes pas vacciné », a-t-elle affirmé. « Si vous êtes vacciné, vous bénéficiez d’une protection exceptionnelle grâce au vaccin. Mais vous êtes libre de décider d’ajouter des couches de protection supplémentaires », a-t-elle ajouté.
Joseph Allen, professeur associé à l’école de santé publique d’Harvard, soutient la position des CDC. « Je ne pense pas que nous soyons à un point aux Etats-Unis et dans le reste des pays hautement vaccinés, où cette recommandation (de port du masque) pour tous a encore du sens », affirme-t-il.
De « frustrants » va-et-vient
Si l’Organisation mondiale de la santé a exhorté les personnes entièrement vaccinées de continuer à porter le masque, c’est notamment à la lumière de la situation globale, seulement 13,4% de la population mondiale étant entièrement vaccinée. « Pour moi, le but avec tous les vaccins est, et a toujours été, de prévenir les cas graves et les décès, et c’est exactement ce qu’ils font vraiment bien », a souligné M. Allen.
En ce qui concerne les infections parmi les personnes vaccinées, une étude récente au sein d’une prison s’est penchée sur les 27 cas positifs parmi une population de 2.380 individus vaccinés: 1,1% ont développé le Covid-19, et tous étaient asymptomatiques, leur cas ayant été détecté au cours de tests de routine. Malgré tout, plus la prévalence du virus dans un environnement est importante, plus la probabilité de voir des cas parmi les personnes vaccinées augmente également.
Celine Gounder, médecin épidémiologiste et spécialiste des maladies infectieuses, compare la situation avant l’apparition du variant Delta au fait de conduire dans son quartier, tandis que la situation actuelle se rapproche plus d’une conduite sur un circuit de course automobile. « Quand vous conduisez dans votre quartier, la ceinture suffit », a-t-elle déclaré à l’AFP, la ceinture de sécurité représentant le vaccin. « Mais si vous êtes sur un circuit automobile, en plus de la ceinture, ces conducteurs auront également des casques, des airbags », a-t-elle ajouté, les masques représentant ces couches supplémentaires de protection.
Dans certains endroits des Etats-Unis comme à Los Angeles ou Philadelphie, les autorités locales ont remis en place une obligation de port du masque en intérieur. Pour Monica Gandhi, docteure spécialiste des maladies infectieuses à l’université UC San Francisco, les « va-et-vient sont très frustrants pour les gens ». Elle suggère alors de mettre en place des marqueurs statistiques pour lier par exemple les obligations de port du masque aux taux d’hospitalisation. Monica Gandhi, comme d’autres experts, propose par exemple le chiffre de pas plus de cinq hospitalisations pour 100.000 habitants comme seuil pour reprendre une activité normale
Monica Gandhi, Joseph Allen, et d’autres, soutiennent que ces « rampes de sortie » peuvent aussi être appliquées dans les écoles au moment de leur réouverture à l’automne, tandis que l’Académie américaine de pédiatres est en faveur du port universel du masque, même parmi les enseignants et élèves vaccinés.
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