Vaginisme, dyspareunie… L’amour fait parfois mal. Mais ce n’est pas une fatalité. © Getty Images/iStockphoto

Vaginisme, dyspareunie: comment vaincre ces troubles qui empoisonnent la vie sexuelle

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

L’essentiel

• Vaginisme et dyspareunie sont des troubles qui affectent la vie sexuelle : la pénétration peut être impossible ou douloureuse.
• Les causes sont généralement multiples: contracture du périnée liée à un état global, tensions musculaires, abus sexuels…
• Les gynécologues et les kinésithérapeutes peuvent aider à traiter ces troubles en utilisant des méthodes telles que le massage du périnée, l’utilisation de dilatateurs ou d’autres outils.
• Il est important de dépasser le tabou et de parler ouvertement avec un professionnel pour trouver une solution.

L’acte sexuel n’est pas toujours un plaisir. Parfois, la pénétration est douloureuse, voire impossible. Heureusement, des solutions existent, notamment grâce à la kinésithérapie axée sur le périnée.

Parfois, l’amour fait mal. Le corps refuse la pénétration, ou elle est douloureuse. Normal, docteur? Non. Dans la tête? Certainement pas. Ce sont des douleurs génito-pelviennes, ou plus communément, des troubles de la pénétration.

Incapacité ou douleurs

Tout d’abord le vaginisme, c’est une incapacité d’avoir une pénétration. Il peut être primaire, là depuis toujours, ou secondaire, suite à un traumatisme. «Soit parce que c’est trop contracté, ou parce que c’est trop douloureux. C’est souvent lié à une contracture», explique Audrey Lins, kinésithérapeute spécialisée en périnatalité, périnéologie et sexologie. Avec la dyspareunie, le rapport est possible, mais douloureux. Elle peut être superficielle, à la pénétration même, ou profonde, dans le fond du vagin. Cela peut être dû à une lubrification insuffisante, un dysfonctionnement des muscles du périnée ou une sécheresse vaginale.

La vulvodynie désigne quant à elle une douleur chronique, de plus de trois mois, qui est inexpliquée, à l’entrée du vagin, au niveau de la vulve. La gêne est tellement présente que certaines activités sont insupportables, notamment toute activité d’ordre sexuel (mais pas uniquement). Elle est diagnostiquée par un gynécologue spécialisé. «Rien n’est visible, ni objectivé. Aucun muscle n’est particulièrement tendu et aucune rougeur n’est constatée. Un test avec un coton-tige permet d’identifier une hypersensibilité sur un point», précise la kiné. La vulvodynie pure est souvent associée aux contractures musculaires et problèmes de muqueuses, car il y a une contraction suite à la douleur.

Le périnée en première ligne

Pour le vaginisme et la dyspareunie, les causes sont en général multiples. «Une contracture du périnée est très souvent liée à un état global de contracture, ou de tensions musculaires. C’est souvent le cas chez une personne qui est fort dans le contrôle, qui a du mal à lâcher prise, indique Audrey Lins. Le périnée est aussi une zone émotionnelle très forte. Quand il y a un traumatisme de base ou une anxiété, cela va s’y répercuter.» Les traumatismes (viols, abus sexuels) ont également des conséquences. «Chez certains, c’est même inconscient, car cela date de l’enfance ou a eu lieu dans le cercle familial.»

L’accouchement est une autre origine régulière. Avec des douleurs, par exemple, liées à la cicatrice de la déchirure de l’épisiotomie. Et les nouvelles contraintes qui pèsent sur le périnée. «Du jour au lendemain, surtout au premier enfant, il y a beaucoup de repos. La maman va s’asseoir plus régulièrement, porter souvent son enfant, moins dormir, être très fatiguée, tout cela met le périnée sous pression et entraîne un déséquilibre musculaire.» Cela va engendrer des contractures, qui peuvent provoquer ces dyspareunies.

Ecarter certaines causes

La sexologue Valérie L’Heureux conseille, en premier lieu, de vérifier qu’il n’y a pas d’infection sexuellement transmissible (IST), un kyste, une mycose vaginale ou que la personne ne souffre pas d’endométriose, par exemple. «L’idéal est d’abord de consulter un gynécologue, le plus vite possible. Ce n’est pas normal d’avoir mal. Si cela arrive plusieurs fois, il ne faut pas laisser traîner les choses des mois voire des années. Il peut aussi y avoir des malformations au niveau du vagin, mais c’est très rare.»

Une fois ces potentielles causes écartées, «il faut traiter ce problème de fond.» Elle conseille cependant de ne pas s’imposer de délai. «Les personnes qui veulent tomber enceintes et qui ont des troubles de la pénétration se mettent parfois la pression car elles ont un objectif en tête.» Audrey Lins la rejoint: «Chez ceux qui veulent avoir rapidement des enfants, ne pas arriver à avoir un rapport est difficile. Les femmes ont tendance à avoir honte ou culpabiliser, mais c’est aussi par manque d’informations, car le périnée est une zone souvent ignorée.»

Kiné, la solution?

Plusieurs praticiens peuvent aider. «Ce sont des symptômes connus par les gynécologues, et même par la plupart des médecins généralistes. Il ne faut pas hésiter à consulter», insiste Valérie L’Heureux. En tant que sexologue, elle peut conseiller et modéliser des exercices avec ses patientes, mais ne les réalise pas. La kinésithérapie peut aider à plusieurs niveaux. Audrey Lins s’est spécialisée. En premier lieu, elle veut que ses patientes prennent conscience de la zone du périnée. «Enormément de femmes ne savent pas ce que c’est ou même qu’elles en ont un. Souvent, elles l’apprennent lors d’une grossesse ou en cas de problèmes. C’est une zone qui n’est pas très concrète, beaucoup plus grande qu’imaginée, mais abstraite car pas visible.»

L’idéal est que la patiente reste maître du traitement et décide ce qui lui convient. Cela peut se faire par un massage du périnée, externe dans un premier temps, interne si la patiente se sent prête. «Je veux qu’elle se sente à l’aise, car plus elle est détendue, plus on progresse, clarifie la kiné. J’explique tout ce que je fais, point par point, pour la rassurer. C’est une collaboration.» Pour celles qui ne sont pas prêtes, elle choisit une approche globale, focalisée sur la respiration, le massage du ventre et des étirements du bassin, car il est rare que seul le périnée soit tendu. «Ce sont souvent des gens qui n’aiment pas trop être touchés. Donc il faut réapprendre peu à peu ce contact-là, et le fait qu’il puisse ne pas faire mal.»

Les traitements durent généralement entre neuf et 18 séances. L’amélioration peut déjà se faire sentir après quelques exercices. Mais selon le patient et si l’origine est liée à un traumatisme, cela peut être plus long. D’autres outils existent, comme les dilatateurs. Ce sont des embouts, d’abord tout petits, puis de plus en plus larges. Si la patiente est à l’aise avec le dispositif, elle peut même le faire chez elle.

Dépasser le tabou

La sexologue Valérie L’Heureux pointe la méconnaissance et un tabou qui persiste. «Certains font croire que cela fait mal pour que les filles n’aient pas de rapport trop tôt. Mais le reste de la société présente l’acte comme un plaisir absolu, avec orgasme chaque fois. Une énorme pression.» Beaucoup de femmes sont concernées. Il est difficile d’estimer combien car peu en parlent. Certaines attendent des années avant de venir parce qu’elles ont peur d’avoir mal ou d’en parler, confirme Audrey Lins. Elle pointe également les réseaux sociaux, qui ne fournissent souvent pas une information exacte, même si les publications permettent parfois de se rendre compte de sa propre situation.

«C’est ancré dans le cerveau. Il suffit d’avoir mal une fois pour qu’il donne le signal de se contracter, de se protéger, explique la kiné. Il faut dédiaboliser car c’est une zone intime, mais c’est du muscle et de la muqueuse, comme n’importe quel autre muscle. Et réhabituer le cerveau à ce que cette zone puisse ne pas faire mal».

Faire l’amour, autrement

Inutile cependant de se priver le temps que la situation s’améliore, si le désir et l’envie sont là. Car, de plus en plus, la pénétration n’est plus louée comme acte sexuel absolu. La sexologue Valérie L’Heureux se réjouit d’avancées sur le sujet, notamment dans la littérature.

«L’amour ou la sexualité ne doivent pas systématiquement être pénétrants. Dans l’acte, il y a aussi les caresses, les relations buccales, tout ce qui peut donner du plaisir et même un orgasme. La sexualité, ce n’est pas que la pénétration. Il est possible d’avancer, tout en ayant une sexualité épanouie. Il y a moyen de se découvrir autrement, de manière beaucoup plus sensuelle», conclut-elle.

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