Super-centenaires: des super cellules immunitaires?
Les super-centenaires sont des personnes qui ont atteint l’âge de 110 ans ou plus. Dans le monde, seuls 48 super-centenaires confirmés officiellement ont fêté leurs 115 ans. Le record a été battu par Jeanne Calment, décédée à l’âge de 122 ans. Mais quel est donc le secret de ce petit groupe d’individus pour arriver à vivre si longtemps?
Des études avaient déjà démontré que les personnes vivant jusqu’à plus de 110 ans étaient immunisées contre les maladies comme le cancer et les infections tout au long de leur vie. Mais comment est-ce possible? Des scientifiques du Centre Riken (Institut de recherche au Japon) et des chercheurs de la Faculté de médecine de l’Université Keio se sont penchés sur la question et affirment que le secret de la longévité serait lié à un système immunitaire plus efficace.
Les chercheurs japonais ont supposé que ces personnes devaient avoir un système immunitaire plus fort. Pour vérifier leur hypothèse, ils ont examiné des cellules immunitaires de super-centenaires et de personnes âgées de 50 à 80 ans. Le total de cellules obtenues auprès de sept super-centenaires était de 41 994 (soit 5887 cellules par personne) et de 19 994 chez les autres (soit 3999 cellules par personne).
Deux types de cellules immunitaires ont été examinées: les lymphocytes B et T. Les résultats ont montré que le taux de lymphocytes B était plus faible chez les super-centenaires et que celui des lymphocytes T était à peu près équivalent. Mais un sous-groupe de lymphocytes T (appelés lymphocytes T cytotoxiques) était plus présent chez les super-centenaires (80% chez eux contre 10 à 20% pour les membres de l’autre groupe). Les lymphocytes T cytotoxiques sont des cellules du système immunitaire capables de tuer toute cellule indésirable pour l’organisme, telles que les cellules infectées ou cancéreuses, afin d’éviter la croissance rapide et la division de ces cellules.
Il existe plusieurs sous-groupes de lymphocytes T. Parmi eux se trouvent les lymphocytes cytotoxiques (exprimés avec le marqueur CD8) et les lymphocytes auxiliaires (qui portent le marqueur CD4). Comme expliqué plus haut, les CD8 aident à éliminer les cellules indésirables pour protéger le corps des infections, alors que les CD4 agissent simplement comme des intermédiaires de la réponse immunitaire.
Les chercheurs ont donc pensé au premier abord que pour vivre plus longtemps, les super-centenaires devaient posséder, de base, plus de lymphocytes CD8 que les autres.
Les résultats ont démenti cette hypothèse, il s’agirait plutôt d’un processus que possèdent les super-centenaires, et qui modifie les lymphocytes CD4 en leur faisant atteindre le statut de cytotoxiques. Ils ont donc cherché à comprendre pourquoi et comment ce phénomène avait lieu.
Ils ont donc analysé les cellules sanguines de deux super-centenaires. Les chercheurs ont découvert que les cellules provenaient d’un phénomène appelé « expansion clonale ». Ce processus survient lorsque le corps fait face à une infection: une cellule se multiplie et crée une explosion du nombre de cellules immunitaires dans l’organisme. « Nous pensons que ces cellules, qui sont relativement rares chez la plupart des individus, même les plus jeunes, sont utiles pour lutter contre les tumeurs établies et pourraient être importantes pour l’immunosurveillance. Cela nous a permis de mieux comprendre comment les personnes qui vivent très longtemps sont capables de se protéger contre des maladies telles que les infections et le cancer », expliquent les chercheurs. Selon eux, les cellules sont la clé d’un système immunitaire plus performant et donc d’une plus grande durée de vie.
Yves Joanette, professeur en neurosciences cognitives à la faculté de médecine de l’Université de Montréal et spécialiste du vieillissement, trouve cette étude intéressante et explique que « le but n’est pas de nous amener à vivre plus longtemps, mais de nous amener à vivre plus longtemps en bonne santé ».
Auteure: Margaux Glamocic
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici