Steven Van Gucht: « On peut s’attendre à une vague de grippe intense après les fêtes »
L’épidémie de grippe s’installe officiellement en Belgique. A quoi s’attendre pour les prochaines semaines ? Sept questions au virologue Steven Van Gucht (Sciensano).
L’épidémie de grippe a officiellement débuté en Belgique. Quelles sont vos premières observations ?
Steven Van Gucht : « On est au début. 22% des gens qui consultent un médecin généraliste pour syndrome grippal sont positifs à la grippe. Le seuil épidémique est fixé à 20%. On vient donc de le dépasser. Il faut être clair : on peut dire que l’épidémie a commencé. Mais ce n’est que le tout début. On est toujours à un niveau plutôt bas. Après les fêtes, cela risque d’avancer beaucoup plus vite. »
La grippe semble intervenir particulièrement tôt cette année. Une raison ?
Steven Van Gucht : « Il y a une dizaine d’années, il était assez normal que l’épidémie de grippe commence en décembre. Plus récemment, elle débutait plutôt en janvier. Le timing est donc un peu plus précoce mais ce n’est pas pour autant exceptionnel.
On est devenu plus exposés à la grippe car on a eu très peu de cas pendant les années de la pandémie Covid. Avec les mesures de distanciation sociale, la grippe a moins circulé. Maintenant, plus de gens sont susceptibles de développer une nouvelle infection. »
Notre immunité est-elle moins bonne ?
Steven Van Gucht : « En moyenne, nous sommes infectés par le grippe une fois tous les cinq ans. Lorsqu’on développe la maladie, on est bien immunisé pour un, deux ou trois ans. Mais ensuite, l’immunité s’affaiblit et on peut être réinfecté. Pendant les deux années de pandémie, très peu de gens ont été exposés à la grippe. La maladie a donc plus de facilité à circuler maintenant. »
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Doit-on s’attendre une vague plus forte cette année ?
Steven Van Gucht : « En Belgique, pour le moment, la situation est encore bonne. En France et aux Etats-Unis, l’épidémie est arrivée plus tôt et elle est déjà plus intense. Il est bien possible qu’on ait une épidémie plus forte cette année, au regard de l’intensité dans d’autres pays. On peut s’attendre à une vague intense en janvier et février. »
Les hôpitaux risquent-ils la saturation ?
Steven Van Gucht : « Certains hôpitaux sont déjà saturés actuellement. La bronchiolite va probablement descendre un peu. Le Covid aussi, on a atteint le pic et cela devrait diminuer dans les semaines qui suivent. Mais rien qu’avec la grippe, il est possible que les hôpitaux se remplissent. C’était déjà le cas avant la pandémie de Covid. Le système de soin pouvait être saturé avec une grippe intense, mais sur une période assez brève. Ici, avec la bronchiolite et le Covid, la pression sur le système de soin est plus longue qu’à l’accoutumée. A cela, il faut ajouter le manque de personnel. C’est donc une combinaison de choses. Cependant, si l’on regarde le taux de patients actuel, on ne peut pas dire que c’est exceptionnel, car on a vécu ce pic aussi dans le passé, même avant le Covid. »
S’est-on un peu « trop » focalisé sur la vaccination Covid, au détriment de celle contre la grippe ?
Steven Van Gucht : « Oui, c’est ce qui est redouté, mais les données du taux de vaccination pour la grippe de cette année ne sont pas encore disponibles. Les années précédentes, ce n’était optimal. Normalement, 3 millions de vaccins sont utilisés en Belgique.
Il n’est pas encore trop tard de se faire vacciner contre la grippe si l’on fait partie du groupe à risque. C’est-à-dire les gens qui ont plus de 50 ans ou qui ont une maladie chronique. »
La qualité du vaccin contre la grippe est-elle optimale, cette année ?
Steven Van Gucht : « Chez nous, il est encore un peu tôt pour le dire, mais aux Etats-Unis, ils ont observé que la souche qui circule correspond bien à ce qu’il y a dans le vaccin. C’est une bonne nouvelle, car cela semble matcher. En Belgique, il faut encore voir quel virus est dominant. Il y a actuellement trois souches qui circulent : le type B, le H1N1, et le H3N2. Il encore trop tôt pour savoir lequel prendra le dessus.
La circulation commence en général chez les jeunes, puis chez la population active, et en dernière instance chez les personnes plus âgées. C’est lors de cette troisième étape qu’on voit les hospitalisations augmenter. »
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