Sclérose en plaques et Covid: inquiétudes autour de certains traitements
Certains traitements contre la sclérose en plaques, les anti-CD20, semblent annuler la protection des vaccins contre le Covid-19 et augmentent le risque de faire une forme grave, s’alarment des spécialistes de la sclérose en plaques avant la journée mondiale de cette maladie dimanche.
« Les patients traités avec cette classe de traitements sont à la fois plus exposés aux formes graves de Covid-19 et risquent de moins bien répondre à la vaccination », explique à l’AFP le neurologue Jean Pelletier, de la Fondation Aide à la recherche sur la sclérose en plaques (Arsep).
Selon lui, « autour de 20% » des patients atteints de sclérose en plaques (SEP) prennent ce type de traitements, soit dès le début de leur maladie, soit parce que les autres n’ont pas fonctionné. On estime que plus de 2,8 millions de personnes sont touchées par cette maladie auto-immune dans le monde.
Les deux médicaments concernés sont le rituximab et l’ocrelizumab. Administrés « sous la forme de perfusions tous les six mois », ils sont « extrêmement efficaces dans le traitement de fond de la sclérose en plaques », selon le Pr Pelletier. Mais du point de vue du Covid, c’est en revanche la double peine.
D’une part, le risque accru de faire des formes graves de Covid a été mis en évidence ces derniers mois par plusieurs études, française, italienne et américaine, selon le neurologue. D’autre part, plus récemment, des craintes sont apparues concernant la vaccination.
« On voit des personnes atteintes de SEP et traitées par ces anti-CD20 qui ne produisent pas d’anticorps après la vaccination contre le Covid », selon le Pr Pelletier, avec donc le risque d’une « non-protection ». C’est d’autant plus préoccupant que l’effet de ces traitements semble « probablement beaucoup plus prolongé » que les six mois d’intervalle auquel ils se prennent.
À ce stade, ces observations sont avant tout basées sur « des cas particuliers », mais des études vont permettre d’en savoir plus. C’est notamment le cas d’une étude française chapeautée par l’Inserm et baptisée COV-POPART. Elle « vise à évaluer l’effet de la vaccination contre le Covid » chez des patients traités pour plusieurs maladies (cancers, maladies rénales, diabète, SEP, etc.), en fonction des traitements qu’ils prennent.
Pour la sclérose en plaques, 600 patients doivent y participer, et « on pourra avoir une première réponse dans six mois », espère le Pr Pelletier, selon qui cela pourrait rendre nécessaire une adaptation de la stratégie vaccinale chez les personnes concernées.
« Cette classe des anti-CD20 n’est pas spécifique à la sclérose en plaques, mais est utilisée dans beaucoup d’autres maladies auto-immunes comme la polyarthrite rhumatoïde, le psoriasis. C’est donc une question qui dépasse la SEP », souligne-t-il.
Les effets que semblent provoquer les anti-CD20 du point de vue du Covid pourraient s’expliquer par le fait que ces médicaments agissent sur les lymphocytes B, « les cellules qui fabriquent les anticorps », selon le spécialiste.
En revanche, il n’y a pas de signal similaire concernant les autres traitements de fond de la SEP, comme les interférons, qui pourraient même avoir un effet « un peu protecteur », dit le Pr Pelletier.
La sclérose en plaques est une maladie auto-immune du système nerveux central (cerveau et moelle épinière). Elle provoque un dérèglement du système immunitaire, qui s’attaque à la myéline, la gaine protectrice des fibres nerveuses.
Le plus souvent, elle provoque des poussées inflammatoires entrecoupées par des phases d’accalmie. Le traitement corticoïde à haute dose utilisé pour contrer uniquement ces poussées (par opposition aux traitements de fond) pourrait lui aussi être un facteur de risque de formes graves de Covid, selon le Pr Pelletier.
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici