Que cachent vraiment les compléments alimentaires ?
Certains compléments alimentaires contiennent des substances toxiques sans que le consommateur en soit averti. En cause : une réglementation bien trop laxiste quant à leur fabrication et leur étiquetage.
Une récente enquête de la revue américaine Drug Testing & Analyse démontre que des compléments alimentaires « populaires » contiennent des stimulants chimiques de type amphétamine, alors qu’ils sont commercialisés en tant que « plantes naturelles ». Et ce n’est pas la première fois qu’une étude arrive à pareils résultats : fin 2013, le journal médicale BMC Magazine avançait que « la composition de la majorité des compléments ne correspond pas à ce qui est indiqué sur l’étiquette » et que ces derniers seraient fabriqués à base de « plantes qui peuvent être toxiques ». Selon les estimations de la Food and Drug Administration (l’Agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux), 70% des fabricants de compléments ne respectent pas les règles en matière d’étiquetage. Comment est-ce possible ?
Réglementation minime et lobbying intense
L’explication principale est que les compléments alimentaires suivent les mêmes réglementations que les aliments, et non les médicaments.
« Ils n’ont donc pas à démontrer leur efficacité avant leur mise sur le marché », éclaire le chimiste Patrick Edder au Soir. « Alors qu’il faut rassembler un semi-remorque de données expérimentales et cliniques pour obtenir une autorisation de mise sur le marché d’un médicament, une simple déclaration auprès de l’administration suffit pour un complément alimentaire », déplore quant à elle Myriam Malet-Martino, professeure à l’Université Paul Sabatier de Toulouse. Les fabricants sont donc assez libres quant à l’étiquetage de leurs produits, puisqu’ils doivent y indiquer uniquement les composants « censés » s’y retrouver. Autre conséquence : contrairement à ce qui se fait pour les médicaments, faire retirer un complément du marché n’est possible qu’en prouvant son caractère néfaste pour la santé.
En outre, un lobbying féroce de l’industrie auprès de législateurs influents ne cesse de repousser les projets de loi visant à durcir les règles en matière de fabrication et de mise en vente de compléments alimentaires. Il est vrai que le marché est colossal : plus de 60 milliards de dollars (56 milliards d’euros) par an et une croissance annuelle estimée à 15%.
Plusieurs décès aux États-Unis
Un laxisme qui aurait déjà causé la mort de plusieurs Américains. Des substances nocives retrouvées dans l’Oxymellite Pro ont ainsi entraîné l’hospitalisation d’une centaine de personnes, en 2013, dont certaines sont depuis décédées. Entre Juin 2009 et Juin 2011, le New York Times a quant à lui recensé 2 292 maladies graves et 33 décès liés à la prise de compléments alimentaires. (A.V.)
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