Les pays du monde avec le plus haut taux d’obésité ont une particularité commune (infographie)
Les dix pays du monde avec le plus haut taux d’obésité sont tous des îles. Dans certains archipels du Pacifique, plus d’un habitant sur deux est obèse. Les prédispositions génétiques, l’évolution du régime alimentaire et la mondialisation peuvent expliquer ce taux d’obésité particulièrement élevé.
Ce n’est un secret pour personne : une mauvaise alimentation et un manque d’exercice peuvent engendrer du surpoids, voire mener à l’obésité. Ce que beaucoup ignorent, par contre, c’est que les facteurs géographiques jouent également un rôle prépondérant dans le développement de l’obésité.
Selon les données de l’OMS, environ 13% de la population mondiale était obèse en 2016. Ce pourcentage varie grandement en fonction des régions du globe : alors que le Japon ne compte que 4,3% d’obèses parmi ses habitants, les Etats-Unis en dénombrent plus de 33%.
Si l’on analyse les dix pays aux taux d’obésité les plus élevés de la planète, une constante saute aux yeux : tous sont en réalité des îles. Et, pour beaucoup, des îles situées dans le Pacifique. Avec 61% d’obèses, l’archipel de Nauru occupe la première place de ce triste classement. Viennent ensuite les îles Cook (55,9%) et les Palaos (55,3%). Toujours dans le Pacifique Sud, les îles Marshall (52,9%) et les Tuvalu (51,6%) viennent fermer la marche du top cinq.
Prédisposition génétique ?
Plusieurs facteurs peuvent justifier ces pourcentages particulièrement alarmants. « L’obésité peut s’expliquer par la combinaison du profil génétique de l’individu, c’est-à-dire ses caractéristiques intrinsèques, et de l’environnement dans lequel il évolue », analyse Nathalie Delzenne, professeure de métabolisme et de nutrition à l’UCLouvain.
« Dans certaines ethnies, on a parfois une propension inhérente à pouvoir stocker plus facilement des graisses », détaille l’experte en nutrition. Ainsi, les populations des îles, à l’époque particulièrement isolées du reste du monde, étaient parfois confrontées à des périodes prolongées de disette. L’organisme, au cours des siècles et des millénaires, s’est adapté progressivement et, par instinct de survie, a développé une capacité de stockage plus importante.
Au fil du temps, ces états insulaires se sont progressivement ouverts au monde, faisant évoluer les modes de vie. L’industrialisation s’y est développée, tout comme la sédentarité. Les habitudes alimentaires ont également changé. Les chaînes de fastfood et les conserves ont fait leur apparition, remplaçant progressivement les aliments locaux. Tous ces facteurs liés à l’environnement pourraient dès lors expliquer ces hauts taux d’obésité dans les îles du Pacifique. « Mais il faudrait analyser en détail le régime alimentaire de chacune des îles, pour voir si elles ont conservé leurs habitudes ou si elles ont aujourd’hui accès à un type d’alimentation auxquelles les générations précédentes n’étaient pas confrontées, avant de pouvoir réellement en tirer des conclusions, nuance Nathalie Delzenne. Cela mérite d’être étudié. »
Et les minces, alors ?
A l’autre extrémité du « classement des gros », on retrouve surtout des pays asiatiques et africains. Le Vietnam est l’Etat du monde qui compte le moins d’obèses, avec un pourcentage de 2,1%. D’autres pays d’Asie du Sud-Est figurent également parmi les bons élèves, comme le Bangladesh (3,6%), le Timor-Oriental (3,8%) ou le Cambodge (3,9%). « C’est vrai que dans certains pays d’Asie du Sud-Est, le type d’aliment et de sources énergétiques convient à la génétique de la population. Les habitants ont une stature, une morphologie plus mince, car il y a eu une bonne adaptation de l’environnement par rapport à la génétique », analyse Nathalie Delzenne.
Cela étant, ce faible taux d’obésité est à relativiser. Tout d’abord, car il peut cacher d’importants déséquilibres nutritionnels. « Au Vietnam, la majorité des enfants qui vivent dans les zones rurales et montagneuses souffrent d’insuffisance pondérale. Pendant ce temps, environ 1,2 million d’enfants dans les zones urbaines souffrent d’obésité », pointait en 2017 l’Institut national de nutrition du pays.
L’urbanisation, grande amie de l’obésité
« L’urbanisation de certains pays en développement – où la dénutrition et la mortalité infantile sont encore importantes – peut conduire au développement de l’obésité », confirme Nathalie Delzenne. En Inde ou en Chine, par exemple, l’essor des grandes villes et les migrations des populations rurales vers celles-ci ont conduit à une flambée d’obésité. « Cela s’explique biologiquement. Des enfants qui sont nés de mère dénutrie peuvent développer un surpoids important. Le fœtus s’adapte à ce manque de nutrition, et quand l’enfant naît et qu’il est soumis à un environnement davantage occidentalisé, de par la migration des parents vers les grandes villes, son organisme surréagit pour stocker un maximum de graisses », explique l’experte de l’UCLouvain. On peut donc s’attendre à ce que les taux d’obésité de ces pays en développement augmentent fortement dans les années à venir.
Enfin, un faible taux d’obésité ne signifie pas pour autant une absence de pathologies liées à l’alimentation. Avec la mondialisation, certaines populations sont soudainement confrontées au « western diet » (alimentation généralement trop grasse et trop sucrée), pouvant entraîner une surréaction des organismes. « Des risques d’hypertension ou de diabète peuvent apparaître plus vite que l’augmentation du poids corporel, précise Nathalie Delzenne. On se focalise sur l’obésite en tant que telle, mais il ne faut pas négliger tous ces risques. »
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