mamelons
© Getty

Pourquoi les hommes ont-ils des mamelons? Bonne question

Delphine Kindermans Secrétaire de rédaction au Vif

Un mamelon masculin, ça ne sert à rien. Mais alors, que fait-il là ? Pour le savoir, il faut remonter à la formation de l’embryon.

Menu, discret, gracieusement ourlé d’à peine quelques poils ou tapi dans une épaisse toison, il est bien là. On se demande pourquoi: un mamelon masculin, ça ne sert à rien. A part quelques exceptions dont les zoologistes font les gorges chaudes, comme la chauve-souris diascoptère ou la roussette, dont les mamelles sont opérationnelles, la fonction lactogène ne se retrouve chez aucun mammifère mâle. «Ils possèdent des glandes mammaires, mais elles sont très atrophiques», explique Stéphane Louryan, professeur ordinaire émérite en embryologie à l’ULB.

Et encore, les excentriques qui parviennent à allaiter leurs petits ne le font que dans des quantités infimes, à peine de quoi les faire patienter en attendant le retour de la mère. Certainement pas les rassasier. Chez ces papas relativement investis, la quantité de prolactine est en effet nettement moindre que chez leurs compagnes.

Les homme ne sont pas non plus totalement dépourvus de cette hormone permettant la lactation. Simplement, les femmes en ont davantage – jusqu’à dix fois plus pendant la grossesse. Et si, en cas de chamboulement hormonal anormal, un ado verra parfois ses seins gonfler légèrement et en sortir quelques gouttes, ce ne sera que temporaire.

Jared Diamond, auteur de Pourquoi l’amour est un plaisir. L’évolution de la sexualité humaine (Gallimard, 2010), relate également l’histoire, remontant à la Seconde Guerre mondiale, de ces cinq cents prisonniers japonais qui, après plusieurs mois de captivité, avaient commencé à produire du lait.

Le biologiste américain émet l’hypothèse d’un stress nutritionnel engendré par de longues privations. Le métabolisme du foie en aurait été perturbé, avec, à la clé, un pic artificiel de prolactine.

Bref, là encore, de l’anecdotique. Pour le job de nourrice, l’homme et son téton repasseront. Une dimension excitante, alors? Si peu. Le titiller provoque certes quelques frissons, mais ce ne serait dû qu’à la finesse de sa peau – en gros, le même geste sur le lobe de l’oreille aurait un effet similaire.

Rien à voir, en tout cas, avec la dimension charnelle que la science accorde au sein féminin, remplissant «un rôle irremplaçable dans le comportement de séduction, dans le comportement d’accouplement», dixit le Gérard Zwang, chirurgien et auteur de plusieurs ouvrages consacrés à la fonction érotique.

S’il ne sert ni à nourrir les bébés ni donner envie d’en fabriquer, l’explication de la présence de ce sacré téton se trouve pourtant du côté de l’embryon. «Pendant une période d’environ six semaines, son développement est indifférencié, détaille le Pr Louryan. Ce n’est qu’à partir du moment où un deuxième chromosome entre en action que le sexe est déterminé. Un X induira notamment la formation de l’utérus et des ovaires, un Y celle des testicules et du pénis, avec, en parallèle, une régression de ce qui était destiné à devenir féminin. Le processus laisse quelques «souvenirs», des résidus d’organes inutiles.»

Dont, chez le garçon, le mamelon. S’offre alors à lui une vie d’oisiveté totalement décomplexée. A la plage ou sur les réseaux sociaux, il pourra s’afficher sans craindre d’être reluqué ou censuré. Depuis quand ceux qui ne servent à rien font-ils profil bas?

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire