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Pour votre hygiène, contentez-vous de vous laver les mains

Marie Gathon Journaliste Levif.be

Pour maintenir une bonne hygiène et une peau saine, lavez-vous les mains, mais ne touchez pas aux autres parties de votre corps.

Se laver les mains, c’est bien. Surtout en tant de pandémie, on l’a assez répété. Mais selon Sandy Skotnicki qui a étudié la microbiologie avant de devenir professeur adjoint de dermatologie à l’université de Toronto, se laver tout le corps avec un savon agressif peut être nocif pour notre peau et pour tous les microbes qui la colonisent.

Selon Sandy Skotnicki, un lavage excessif de la peau peut même être responsable d’une des affections les plus courantes chez les personnes disposant de cette prédisposition génétique : l’eczéma.

De plus, avertit The Atlantic, l’eczéma semble faire partie d’une constellation d’affections causées par des défaillances du système immunitaire. Les nourrissons souffrant d’eczéma ont un risque accru de développer une rhinite allergique ou de l’asthme pendant l’enfance, ce qui fait partie d’une cascade de réactions excessives du système immunitaire connue sous le nom de « marche atopique ».

Et si cela était simplement provoqué par un lavage excessif de notre peau ?

Car il faut bien s’avouer que le contenu des placards de nos salles de bain n’a fait qu’augmenter au fil des décennies, avec des produits destinés à une tâche, un sexe, un âge et un type de peau en particulier. Pendant ce temps, les affections de la peau liées au système immunitaire comme l’eczéma et le psoriasis ont augmenté dans le monde développé. L’acné n’a jamais été aussi présente, même chez les adultes, malgré un arsenal complet de nouveaux médicaments coûteux et d’onguents vendus pour y remédier.

La pandémie de Covid-19 pourrait d’ailleurs être l’occasion de réexaminer dans quelle mesure l’hygiène est bénéfique et quelles pratiques sont nuisibles.

Un équilibre indispensable

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Commençons par l’évidence : lavez-vous les mains, pendant 20 secondes, plusieurs fois par jour. C’est peut-être la chose la plus importante que vous puissiez faire pour prévenir la propagation du coronavirus.

A part cela, nous sommes conscients que notre corps et notre peau sont colonisés par des millions de bactéries, on n’imagine pas toujours le rôle essentiel de celles-ci pour notre santé.

En 2014, des chercheurs ont gratté le visage d’un petit groupe de volontaires en Caroline du Nord. Ils ont trouvé des traces d’ADN d’acariens microscopiques, appelés Demodex, enfouis dans leurs pores.

Selon Michelle Trautwein, titulaire d’une chaire de dipterologie (étude des mouches) à l’Académie des sciences de Californie et co-auteur de l’étude, le Demodex pourrait se nourrir de nos cellules de peau morte, ce qui en ferait les exfoliants les plus « naturels » de tous.

De telles découvertes scientifiques bouleversent la conception traditionnelle de la théorie des germes, l’idée que nous devons combattre les microbes pour éviter les maladies. La relation entre les microbes et leurs hôtes – c’est-à-dire vous et moi – est davantage une question de contexte et d’équilibre.

Le parabène, nocif pour notre peau

Un microbiome cutané déséquilibré n’est pas seulement le résultat d’un excès de savon et de frottements. Nous sommes également exposés à des conservateurs aux propriétés antimicrobiennes. Parmi eux, les parabènes, utilisés depuis près d’un siècle pour prolonger la durée de conservation de nombreux produits d’hygiène et de beauté – déodorants, maquillage, dentifrice, shampoing – ainsi que dans les emballages alimentaires.

En petites quantités, les parabènes sont inoffensifs ; l’inquiétude vient d’une exposition cumulée sur plusieurs décennies. Nous avons presque tous des parabènes dans notre sang ou sur notre peau et, comme prévu, ils détruisent un large éventail de bactéries et de champignons. La question n’est donc pas de savoir si les parabènes ont altéré nos microbiomes, mais dans quelle mesure.

Les chercheurs de l’Institut national des allergies et des maladies infectieuses ont par exemple rapporté que les produits contenant des parabènes peuvent bloquer la croissance de Roseomonas mucosa, une bactérie qui peut tuer une autre bactérie, celle qui prolifère lors des poussées d’eczéma appelée Staphylococcus aureus.

Un microbiome aussi important que celui de l’intestin

La généticienne Julie Segre, qui a publié les premières cartes topographiques de la diversité bactérienne et fongique de la peau humaine en 2012, semble presque sur la défensive lorsqu’elle parle du fait que le microbiome de l’intestin a reçu beaucoup plus d’attention que celui de la peau. « Je ne comprends pas exactement pourquoi les gens ont une perception des microbes qui vivent dans leur intestin si différente de celle qu’ils ont des microbes qui vivent sur leur peau », explique Mme Segre, qui dirige aujourd’hui la section de génomique microbienne des National Institutes of Health à Bethesda, dans le Maryland. « Tout le monde veut manger du yaourt probiotique et se coloniser avec des bactéries, et ensuite ils veulent utiliser du gel désinfectant ».

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Les investisseurs dépensent des millions pour tenter de changer cette situation, en développant un probiotique topique qui pourrait être vendu comme un élément essentiel de la routine quotidienne des soins de la peau.

Dans le même temps, certains collègues scientifiques de Segre testent la « bactériothérapie » pour traiter des maladies existantes. Les chercheurs du NIAID ont essayé de pulvériser la muqueuse Roseomonas susmentionnée sur les coudes intérieurs des patients souffrant d’eczéma. Après six semaines d’applications bihebdomadaires, les symptômes tels que la rougeur et les démangeaisons ont diminué chez la plupart des patients, selon Ian Myles, le chercheur principal. Certains ont également déclaré avoir besoin de moins de stéroïdes topiques, même après l’arrêt du traitement.

Nourrir les bactéries

Selon la docteur Julie Segre, il faudrait plutôt « nourrir » les bactéries déjà présentes sur notre peau grâce à des prébiotiques, plutôt que de vouloir en ajouter.

À un niveau fondamental, passer du temps dans le monde naturel, dès la petite enfance, semble être l’un des meilleurs moyens de construire et de maintenir un biome de peau sain. Nous avons évolué en présence d’autres personnes, d’animaux, de plantes et de tous les microbes qu’ils nous apportent.

S’il est essentiel de se laver les mains pour éviter les germes pathogènes, l’éradication de tous les microbes aussi souvent et agressivement que possible n’est pas toujours la réponse appropriée. Comme pour toute médecine, plus ne signifie pas mieux.

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