Remboursement de médicaments: Testachats dénonce les conflits d’intérêts
Les experts qui conseillent le ministre de la Santé Frank Vandenbroucke (Vooruit) sur le remboursement des médicaments ont souvent des intérêts dans le secteur pharmaceutique. C’est ce qui ressort d’une nouvelle enquête de l’organisation de consommateurs Testachats.
« Des milliards d’euros d’argent du contribuable: c’est l’enjeu pour l’industrie pharmaceutique des décisions de remboursement des médicaments », écrit Testachats dans un nouveau rapport consulté par Knack et Le Soir.
C’est le ministre de la Santé Frank Vandenbroucke (Vooruit) qui décide du remboursement des médicaments, après l’avis de la Commission de remboursement des médicaments (CTG) de l’INAMI. Celle-ci comprend des représentants d’universités, de compagnies d’assurance, de pharmaciens, de médecins et de l’industrie pharmaceutique. Ces derniers n’ont toutefois pas le droit de vote. Mais les autres membres peuvent aussi avoir des liens (financiers) avec l’industrie pharmaceutique. Et c’est là que le bât blesse, d’après Test-Achats.
Fortunes en jeu
« Les membres de la commission qui participent au vote en faveur d’un remboursement semblent parfois avoir des liens avec les entreprises pharmaceutiques du médicament sur lequel ils doivent se prononcer« , écrit l’organisation de consommateurs dans le rapport consulté par Knack et Le Soir. « Il y a donc un conflit d’intérêts alors qu’il y a des fortunes en jeu. En principe, les membres de la commission devraient s’abstenir de discuter et de voter sur le remboursement en cas de conflit d’intérêts. Malheureusement, ce n’est pas toujours le cas. »
Dans le cadre des projets de recherche journalistique Implant Files et OpenPharma, Knack, De Tijd, Le Soir et Médor ont déjà évoqué l’importance de l’impartialité et le risque de conflits d’intérêts. Pour ses recherches, Testachats a demandé des documents pour l’année 2020 via la loi sur la publicité de l’administration (« L’année la plus récente pour laquelle nous avons pu obtenir tous les documents »).
Influence inconsciente
« Nous ne prétendons pas que les experts sont nécessairement influencés parce qu’ils ont reçu de l’argent de la part d’entreprises, mais il serait naïf de supposer que cela n’influence en rien leur jugement ou qu’ils sont à l’abri d’une influence inconsciente« , écrit Testachats.
Toutefois, l’organisation de consommateurs ne parle pas de dossiers spécifiques de médicaments remboursés. « Il est difficile de pointer du doigt des dossiers spécifiques. Nous ne pouvons pas prouver avant 2020, dans aucun dossier, que ce seul vote a été décisif« , déclare la porte-parole de Test-Achats Laura Clays.
Aussi l’objectif de l’enquête de Testachats n’était pas de prouver l’existence d’une influence dans des cas concrets. « L’objectif était de déterminer si l’INAMI avait mis en place les procédures adéquates pour prévenir l’influence de manière appropriée, et donc pour garantir l’indépendance des conseils. »
L’INAMI réagit
« Nous prenons cette question à cœur et sommes prêts à optimiser la situation, dans le cadre fixé par le législateur », répond An-Sofie Soens, porte-parole de l’INAMI à notre confrère de Knack.
L’INAMI ne conteste pas l’existence de conflits d’intérêts. An-Sofie Soens : « C’est une réalité que les universitaires et autres experts cliniques qui donnent leur avis ne sont jamais détachés des sociétés pharmaceutiques. Si ce n’est pas eux personnellement, c’est leur département, leur hôpital, leur campus ou leur laboratoire de recherche. Chaque université collabore avec l’une ou l’autre entreprise pharmaceutique à un moment ou à un autre de la recherche. La séparation des intérêts financiers des entreprises pharmaceutiques et des organismes susmentionnés n’existe donc pas dans l’absolu. »
l’INAMI a toutefois mis en place une série de procédures déstinées à réduire ces conflits d’intérêt.
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