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Infirmiers: «En Suisse, j’ai plus que doublé mon salaire, pour une charge de travail moindre»

Noé Spies
Noé Spies Journaliste au Vif

Les jeunes infirmiers fuient les conditions hospitalières belges. En Suisse, ils peuvent aisément doubler leur salaire.

Il en manque entre 20.000 et 25.000. En Belgique, le besoin d’infirmiers a tout d’une maladie chronique, et ce alors que le nombre d’étudiants chute depuis 2016. Selon les écoles, les inscriptions ont diminué d’environ un quart.

Face au manque de personnel criant, les hôpitaux belges continuent de recruter à l’étranger. Les derniers chiffres d’Acerta estiment à 10,2% la part des travailleurs en soins de santé qui n’ont pas la nationalité belge: un bond de 63% en l’espace de dix ans.

Malgré l’assurance de trouver un emploi au sortir des études, les jeunes diplômés sont de moins en moins tentés par une carrière au plat pays. La faute, principalement, à des conditions de travail jugées trop pénibles.

Infirmiers: Suisse toute!

Où partent-ils, dès lors? Si nos pays voisins séduisent une part des travailleurs frontaliers, c’est une autre destination qui attise toutes les convoitises: la Suisse.

Bryan, infirmier bruxellois de 31 ans, s’est laissé tenter par l’aventure helvète. Après un début de carrière à l’hôpital Saint-Luc, en oncohématologie, l’envie de casser la routine belge se fait ressentir. Et la proposition d’une amie suffit à prendre la direction de Lausanne.

«Les conditions belges sont clairement moins bonnes qu’en Suisse, assure Bryan. Le temps de travail, surtout, est différemment organisé.» Dans le pays neutre, les infirmiers réalisent en effet des gardes de 12 heures. Plus longues qu’en Belgique, mais qui offrent beaucoup plus de jours de congés et de récupération. «Un temps plein en Suisse pèse moins dans les jambes, on peut davantage souffler», explique le jeune infirmier.

Un temps plein en Suisse pèse moins dans les jambes, on peut davantage souffler.

Bryan

Infirmier bruxellois (31 ans)

Quant aux infrastructures, la différence est également marquée. Aussi bien en termes de matériel moderne que de personnel disponible. «Cela permet de mieux se consacrer à chaque patient. En Suisse, le travail est plus agréable, le stress se fait moins ressentir.»

Alix, infirmière bruxelloise de 27 ans, spécialisée en oncologie, n’a pas non plus hésité longtemps avant de rejoindre les Alpes. «Je m’y rendais en vacances depuis mon enfance, c’est donc un pays que j’appréciais déjà. Les conditions de travail, très attrayantes, ont aussi pesé dans la balance.»

Dans la ville de Sion, où elle exerce depuis deux années en pédiatrie générale, Alix imagine réaliser toute sa carrière. «En Suisse, on est à maximum cinq patients par infirmière. En Belgique, ce nombre peut monter à dix voire quinze. La charge de travail est donc nettement différente.»

De plus en plus en jeunes veulent ainsi éviter de travailler dans les conditions hospitalières belges. Certains font un master supplémentaire dans cette optique. Après cinq à dix ans de carrière, la majorité des infirmières quitte le métier, trop épuisant… et peu rémunérateur face aux propositions salariales quelques centaines de kilomètres plus au sud.

En Suisse, on double son salaire

Et de fait: le salaire suisse net est plus de deux fois supérieur à son équivalent belge. En Belgique, Bryan gagnait 2.200 euros net en temps plein, avec des horaires inconfortables (week-end, nuit, jours fériés). En Suisse, il grimpe à 5.000 francs net (5.200 euros). «Le coût de la vie est plus cher, mais on y gagne quand même. Ici, presque tout le monde est locataire, être propriétaire est un luxe.» Alix évoque les mêmes chiffres. «J’ai plus que doublé mon salaire par rapport à la Belgique.»

En Suisse, j’ai plus que doublé mon salaire par rapport à la Belgique.

Alix

Infirmière bruxelloise (27 ans)

Mais la rémunération n’est pas le seul élément décisif. La Suisse propose aussi davantage de formations, payées et intégrées au temps de travail. «Ce qui est infaisable en Belgique», regrette Alix. Les opportunités de carrière (infirmière clinicienne, praticienne de soins) sont aussi plus nombreuses chez les Helvètes.

Malgré tout, Alix est satisfaite d’avoir débuté en Belgique. «Comme on est davantage livré à nous-mêmes, on apprend plus vite, ce qui procure de la confiance pour la suite. En Suisse, les infirmières débutantes prennent plus de temps à rentrer dans le bain. Mais travailler 40 ans dans les conditions belges me paraît impossible.»

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