Perte d’odorat liée au Covid : l’espoir d’un traitement belge
L’UMONS et le centre hospitalier EpiCURA ont réalisé une étude qui démontre que la perte d’odorat pouvait persister plus de deux ans après une infection au Covid. Toutefois, un traitement thérapeutique à base de plasma riche en plaquettes délivre des résultats encourageants.
L’étude de l’UMONS et du centre hospitalier EpiCURA est la première au monde à démontrer la persistance des troubles de l’odorat dans les deux ans qui suivent une infection au Covid. Les professeurs Lechien et Saussez ont suivi 171 patients de la première vague durant deux années. Ils ont démontré que 2,9% des patients n’ont pas toujours pas retrouvé leur odorat après leur infection au virus. Lorsque ces patients ont été interrogés, 29% ont rapporté que leur odorat reste modifié, et ce malgré la capacité à détecter les odeurs lors de tests psychophysiques.
2,9%. C’est le nombre de patients atteints du Covid n’ayant pas retrouvé leur odorat dans les deux ans qui ont suivi
Un postulat scientifique remis en question
Il était établi, en médecine comme en ORL, que lorsqu’une perte d’odorat subvenait après une infection virale comme la grippe, ce qui ne serait pas récupéré après deux ans serait définitivement perdu. Ce postulat a toutefois été remis en question avec le Covid.
« Il faut savoir qu’avant 2020, les pertes d’odorat suite à des infections virales comme la grippe étaient rares« , explique le professeur Lechien, coordinateur de l’étude et médecin ORL à EpiCURIA. « Sur une année, on voyait un ou deux patients en consultation pour ce genre de cas. Les quelques études sur la perte du sens olfactif n’avaient pu être réalisées que sur des petits groupes de patients. Depuis deux ans, beaucoup plus de gens ont été concernés par une perte d’odorat avec le Covid. Et on a pu observer que certains ont pu recouvrir leur sens olfactif après cette durée.«
Les plaquettes pour soigner les cellules
Si certains peuvent de nouveau humer les odeurs, c’est notamment grâce à l’injection de PRP, du plasma riche en plaquettes, dans la fente olfactive. Ce nouveau traitement, développé à Mons, donne pour le moment des résultats prometteurs.
« Le principe consiste à réaliser une prise de sang auprès du patient atteint par la perte d’odorat », détaille le professeur Lechien. « On élimine les globules rouges du prélèvement, et on ne garde que les plaquettes. Celles-ci sont riches en facteurs de régénération et de croissance. En injectant ces plaquettes dans l’endroit blessé par le virus, on accélère la récupération et le renouvellement des cellules endommagées. »
Des premières recherches sur l’utilisation de PRP avaient été réalisées par l’Université de Stanford il y a 3 ans. Celles-ci avaient déjà donné des résultats encourageants. Par la suite, le CHU Saint-Pierre a aussi coordonné une étude sur le sujet et a démontré que le plasma riche en plaquettes permettrait d’accélérer la récupération et ce, même chez des patients ayant dépassé le cap des deux ans.
Suite à cette étude à laquelle EpiCURA a participé, le centre hospitalier de Mons a lancé une consultation de PRP. « On a déjà injecté du plasma riche en plaquettes à plus de 260 patients, et on a de très bons résultats », se félicite le Professeur Lechien. « Cette technique est un espoir pour les milliers de patients présentant un trouble persistant de l’odorat. Prochainement, EpiCURA et l’UMONS publieront les premiers résultats à moyen terme de cette approche. »
Pourquoi perd-on l’odorat lorsqu’on attrape le Covid ?
Dans le haut des fosses nasales, il y a ce qu’on appelle le toit, situé juste en dessous du cerveau et qui est traversé par l’éphitélium olfactif. C’est là que sont situés nos récepteurs à l’odorat. Mais cette zone comporte aussi beaucoup de récepteurs ACE2, qui permettent au virus de rentrer dans la cellule. Lorsqu’on attrape le Covid, notamment par le nez, le virus passe par ces récepteurs ACE2 et se retrouve facilement dans l’épithélium olfactif. Il détruit alors les cellules qui permettent de sentir les odeurs.
« La prévalence de la perte de l’odorat dépend des différents variants », explique le professeur Lechien. « Avec la première souche de Covid, entre 60 et 86% des personnes touchées par le virus étaient concernées. Avec la souche actuelle, Omicron, on serait aux alentours de 30%. »
Chez plus de 50% des gens, la récupération va se faire en deux ou trois semaines. Mais chez certains, la perte d’odorat persiste. Il arrive aussi de récupérer son sens olfactif, mais avec une perception des odeurs modifiée. C’est ce qu’on appelle la parosmie. « Certains patients me disent ne plus pouvoir boire leur café le matin, car ils sentent une odeur de pourriture », rapporte le professeur Lechien. « Ces troubles olfactifs peuvent être handicapants pour les personnes concernées, entraînant des pertes de poids et des baisses de moral. »
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