© GETTY

Migraine : « Bien plus qu’un simple mal de tête ! »

La migraine touche encore bien trop de patients à leur insu, et c’est bien dommage car un traitement adéquat peut rendre la maladie nettement plus supportable.

Chaque année en Europe, on estime que 5 à 6 % d’hommes et trois fois plus de femmes souffrent de crises de migraine une fois par an à plusieurs fois par mois.  » Il s’agit d’un problème extrêmement fréquent, souligne le Pr Jan Versijpt, chef de clinique en neurologie à l’UZ Brussel. Mais de nombreux patients ne bénéficient pas d’un traitement optimal parce qu’ils ne sont pas bien conscients de leur maladie.  » Une étude réalisée il y a quelques années par l’UGent dans 152 pharmacies belges (1) était déjà parvenue à la même conclusion. Sur 1200 adultes venus se procurer des antalgiques en vente libre pour des maux de tête récurrents, 44 % n’avaient jamais fait l’objet d’un diagnostic en bonne et due forme. Or, d’après un test de dépistage, 40 % d’entre eux souffraient très probablement de migraines. Il était en outre question d’une surconsommation d’antalgiques (plus de 10 jours d’utilisation par mois) chez 24 % d’entre eux… et 15 % à peine avaient conscience que ces abus peuvent paradoxalement favoriser les maux de tête.

Bref, si vous souffrez régulièrement de maux de tête, parlez-en à votre médecin, car ce problème mérite toujours un diagnostic.

Un éventail de symptômes

 » La migraine est un trouble cérébral qui fait intervenir des facteurs génétiques et environnementaux, explique le Pr Versijpt. Elle se caractérise par des crises de céphalées qui peuvent survenir soit spontanément, soit sous l’effet de déclencheurs (lire encadré). Ces douleurs, qui persistent de 4 à 72 heures, sont d’intensité modérée à sévère, souvent pulsatiles et unilatérales dans 60 % des cas. Elles sont souvent aggravées par l’effort physique et peuvent s’accompagner de nausées, de vomissements et d’une hypersensibilité à la lumière, au bruit et aux odeurs.  »

Malheureusement, la migraine ne s’arrête pas aux maux de tête et s’accompagne typiquement d’autres symptômes avant ou après la crise.  » La fatigue, des troubles de la concentration, une raideur dans le cou, une hypersensibilité à la lumière, au bruit et aux odeurs, des nausées et vomissements ou une sensation de faim… On observe aussi chez 20 à 30 % des patients un phénomène appelé ‘aura’, qui peut prendre la forme d’une perturbation de la vision (le patient voit des taches noires ou des éclairs lumineux), de picotements, d’un engourdissement des lèvres, du visage ou des mains, de difficultés à s’exprimer, etc.  »

Réagir rapidement

Réagir de manière adéquate dès les premiers symptômes de la crise vous aidera à les maîtriser.  » Installez-vous au calme ou essayez de dormir pour que le cerveau rétablisse son équilibre interne, conseille le Pr Versijpt. Une compresse froide peut aussi soulager. Si vous avez besoin de médicaments, privilégiez un anti-inflammatoire ou du paracétamol, en veillant à ce que la dose soit suffisante – demandez conseil pour cela à votre médecin ou pharmacien. Si vous souffrez également de nausées/vomissements, vous pouvez aussi prendre un antiémétique. L’objectif est d’être délivré des maux de tête par les médicaments dans les deux heures. Si ce n’est pas le cas, des médicaments soumis à prescription – tels qu’un triptan sous forme de comprimé ou de spray nasal, ou éventuellement sous forme injectée en présence de vomissements – pourraient être plus utiles.  »

Migraine :

Des hypotenseurs au botox

Si malgré ces traitements, vous restez incapable de fonctionner normalement deux jours par mois ou plus, vous pourriez être candidat(e) à une approche préventive.  » Pour abaisser la fréquence et la gravité des crises de migraine, nous utilisons actuellement des médicaments destinés à d’autres maladies, comme des bétabloquants hypotenseurs ou des antiépileptiques comme le topiramate, sous forme de comprimés. Des injections de toxine botulique (le Botox®), peuvent également être envisagées, mais uniquement dans les migraines chroniques – comprenez, chez les patients qui souffrent de maux de tête au moins 15 jours par mois et de migraines au moins 8 jours par mois.  »

Malheureusement, ces médicaments ne pas tous également efficaces, souligne le Pr Versijpt.  » Comme tout médicament, ils peuvent aussi provoquer des effets secondaires, qui sont surtout liés à leur action aspécifique. La bonne nouvelle, c’est que les chercheurs s’attachent actuellement à développer des traitements préventifs spécifiques : des anticorps capables de contrecarrer la protéine CGRP impliquée dans l’apparition des crises (lire encadré). Ces nouveaux médicaments ne sont pas encore disponibles pour tous les patients et pourraient s’avérer coûteux (500a par mois) en l’absence de remboursement.  »

Enfin, il existe également des traitements alternatifs reposant sur des preuves scientifiques plus ou moins tangibles, dont notamment l’acupuncture, la mélatonine et les techniques de neuromodulation, qui consistent à soumettre les nerfs à une stimulation électrique.  » Parlez-en à votre médecin, qui vous aidera à déterminer si et dans quelle mesure ces approches peuvent être utiles dans votre cas spécifique « , insiste Jan Versijpt.

Migraine :
© GETTY

Un régime anti-migraine a-t-il un sens ?

Si certains aliments peuvent être des déclencheurs potentiels, il est fréquent qu’ils soient accusés à tort ! Un cinquième des patients migraineux sont en effet sujets en début de crise à des fringales et envies de sucré, qu’ils comblent par exemple avec du chocolat. Lorsque les céphalées se manifestent peu de temps plus tard, ils ont donc tôt fait d’accuser cet aliment d’être la cause de leurs malheurs. Or la crise était en réalité déjà là avant qu’ils ne le mangent. Ne surestimez donc pas le rôle de l’alimentation : un régime anti-migraine n’a en réalité aucun sens.

Faites le test !

L’ID Migraine Screener est un test de dépistage validé qui invite les migraineux potentiels à répondre aux questions suivantes :

– Souffrez-vous de nausées ou de maux d’estomac lorsque vous avez des maux de tête ?

– La lumière vous dérange-t-elle lorsque vous avez des maux de tête ?

– Vos maux de tête ont-ils limité vos activités quotidiennes au moins un jour au cours des 3 derniers mois ?

Si vous avez répondu par l’affirmative à au moins 2 de ces 3 questions, cela correspond à un score positif et la probabilité qu’un examen plus poussé réalisé par un médecin débouche sur un diagnostic de migraine est de 93 %.

Gérer les déclencheurs

Tenir un journal de vos migraines vous aidera à dresser un tableau clair de la nature et de la fréquence des crises ou de la prise de médicaments, mais aussi à tenter d’identifier les facteurs susceptibles de les provoquer chez vous. Vous pourrez ainsi éviter le plus possible ces  » déclencheurs « , qui varient fortement d’une personne à l’autre.

Quelques déclencheurs possibles :

– L’alcool

– L’abus de caféine

– La déshydratation

– Le fait de sauter des repas

– Des habitudes de sommeil irrégulières

– Les lumières violentes ou clignotantes

– Les orages et fortes chaleurs

– Le stress… mais aussi la détente après le stress

– Les règles

Appel

La recherche scientifique sur les inhibiteurs du CGRP, notamment, en est actuellement à sa dernière phase de test. Si vous souffrez de migraines et souhaitez de plus amples informations sur les essais cliniques en cours, contactez la clinique des céphalées et douleurs de la face de l’UZ Brussel à l’adresse jan.versijpt@uzbrussel.be.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire