Les masques FFP2 obligatoires ? « Les gens doivent connaître la vérité »
Il y a un an, les masques étaient encore considérés comme « inutiles ». Aujourd’hui, les masques de type FFP2 deviennent obligatoires dans de nombreux endroits. « Et c’est une bonne chose », selon l’épidémiologiste Nicolas Van Larebeke.
Le Senior Living Group, qui gère 121 maisons de repos, va rendre obligatoire le port du masque buccal FFP2 pour les visiteurs de ses centres de soins. Le personnel des maisons de retraite du groupe doit également porter un masque FFP2 à partir de maintenant. Ils sont les premiers en Belgique, mais probablement pas les derniers. Car lorsque les salons de beauté et de coiffure rouvriront le 13 février, le personnel devra peut-être aussi porter de tels masques.
D’autres pays européens se montrent eux aussi plus stricts quant au type de masques exigés. L’Allemagne a introduit l’obligation de masques FFP2 dans les transports publics, les aéroports, les avions et les magasins. En Autriche, ils sont également obligatoires sur les remontées mécaniques et lorsque les gens se rendent visite. En France, le gouvernement déconseille d’utiliser des masques faits maison.
« Une décision justifiée », déclare l’épidémiologiste Nicolas Van Larebeke (UGent). Il est crucial de se protéger non seulement contre les grosses gouttes de salive, mais aussi contre les aérosols. Nous savons maintenant que ces petites particules qui restent en suspension dans l’air pendant des heures et peuvent être porteuses de particules virales infectieuses jouent un rôle important. Ce n’est pas que les masques en tissu ou les masques chirurgicaux ne servent à rien, mais les masques FFP2 sont clairement plus efficaces. Et cela vaut aussi pour les enfants, parce qu’en fin de compte ils ne diffèrent pas beaucoup des adultes à cet égard ».
La discussion sur quel type de masque il faut porter intervient à un moment où différentes variantes du coronavirus font leur apparition dans toute l’Europe. Van Larebeke : « La variante britannique du coronavirus semble être beaucoup plus contagieuse, d’où l’importance de porter de bons masques. S’il y a plus de virus ou si le virus est plus virulent, nous avons besoin de masques plus efficaces ».
Contrairement aux masques en tissu, aux masques de confort en papier et aux masques chirurgicaux, les masques « Filtering Face Piece » ne protègent pas seulement les autres. Ce type de masque vous protège surtout vous. Cela s’explique en partie par le fait qu’ils sont plus ajustés autour du nez et de la bouche, de sorte que tout l’air, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, passe à travers le masque et est filtré. Le degré de filtration change en fonction de la catégorie, mais même les plus performants ne filtrent pas à 100 %.
Il existe trois catégories : FFP1, FFP2 ou FFP3. Plus le nombre est élevé, meilleure est la protection. Le FFP2 est le plus utilisé, car il arrête 94 % des particules fines (0,3 micromètre). Aux États-Unis, ces masques sont appelés N95. Les masques FFP3 offrent une protection de 99 % (N99), mais sont plus chers et surtout très inconfortables à porter. Comme il est très difficile de respirer avec un masque FFP3, certains de ces masques ont une valve, ce qui vous permet de mieux respirer, mais laisse la personne en face de vous sans protection.
Pour le grand public ?
Le virologiste Steven Van Gucht de Sciensano n’est pas favorable aux masques FFP pour le grand public, même pour les nouveaux variants du covid. « Rien n’indique que ceux-ci se répandraient de différentes manières », dit-il. « D’ailleurs les masques FFP2 ne sont efficaces que s’ils sont portés correctement ». Or, toujours selon Van Gucht, le porter correctement demande une certaine dextérité et quelques préparatifs. « Ainsi il faut être rasé de près et le masque doit bien s’adapter au visage », explique Van Gucht. Dans le secteur médical, on vérifie à l’aide de tests quel type de masque est le plus adapté pour telle personne tant celui-ci peut varier d’une personne à l’autre. De tels tests sont difficilement applicables au grand public.
Van Larebeke : « Un masque, quel qu’en soit le type, doit toujours être mis de manière réfléchie. Par expérience, je sais qu’il existe des masques FFP2 qui se resserrent très bien d’eux-mêmes. Vous pouvez en essayer plusieurs types. Si vous vous inquiétez de la concentration en CO2 qui augmente trop vite avec un masque aussi serré, vous n’avez rien à craindre. Vous pouvez comparer ça avec le moment où vous dormez avec la couverture sur votre tête. Personne n’en est jamais mort, alors que la concentration de CO2 sous la couverture est beaucoup plus élevée que dans le reste de la pièce.
Une question reste encore et toujours la même : y en a-t-il assez ?
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) ne recommande actuellement les masques FFP que pour les travailleurs de la santé, les personnes atteintes de covid, les personnes qui s’occupent d’un malade du covid, les personnes de plus de 60 ans et les patients à haut risque pour lesquels la distance physique ne peut être maintenue. Erika Vlieghe trouve aussi que ce genre de masques peuvent effectivement être utiles pour les patients à haut risque. « Mais il faut à tout prix éviter de se retrouver dans la situation où il n’y a pas assez de masques FFP2 pour les soins », a-t-elle ajouté.
Selon les chiffres de l’Agence fédérale des médicaments et des produits de santé, il y a actuellement 14 020 400 masques FFP2 de haute qualité disponibles en Belgique. Par rapport aux 124 632 480 masques chirurgicaux, ce n’est pas beaucoup, car les masques FFP1, 2 ou 3 doivent en principe être jetés après une seule utilisation. En période de pénurie, ils peuvent éventuellement être réutilisés jusqu’à trois fois en les stérilisant par un procédé au peroxyde d’hydrogène, selon Sciensano.
Un an après la saga des masques ordinaires, la question se pose à nouveau : y a-t-il assez de masques buccaux FFP2 ? « Il est en effet à craindre qu’il y ait un rush autour des masques FFP2 s’ils sont obligatoires », déclare M. Van Larebeke. « Mais en tant que scientifique, je pense que les gens doivent connaître la vérité et il ne s’agit pas d’adapter le message s’il n’est plus opportun. C’est aussi pourquoi ce n’est pas aux scientifiques de prendre des décisions, mais aux hommes politiques. Personnellement, je porte un masque FFP2 depuis qu’ils sont devenus accessibles aux particuliers. Au début de la pandémie, il était évident qu’ils étaient exclusivement réservés au personnel de santé ».
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