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glaucome © Getty

Le glaucome, ce voleur de vue insidieux

Celine Bouckaert
Celine Bouckaert Journaliste au Vif

A l’occasion de la Semaine mondiale du glaucome, l’Association de soutien des personnes aveugles et malvoyantes Eqla insiste sur l’importance d’un dépistage régulier. Deuxième cause de cécité dans le monde après la cataracte, il toucherait 3% de la population belge. « Les Belges vont chez le dentiste une fois par an, mais ils n’ont pas du tout le même réflexe pour les yeux ».

« Actuellement, mon champ visuel est de 1/10e. Je ne vois que ce qu’il y a au centre, mais rien à la périphérie. Ma canne de signalisation me permet de repérer les obstacles dans la rue, mais lire devient très difficile. Le glaucome, c’est une maladie insidieuse », témoigne Lucie, une jeune femme âgée de trente ans atteinte d’un glaucome depuis dix ans.

Le glaucome est une affection provoquée par la destruction progressive du nerf optique, le plus souvent due à une pression intra-oculaire trop importante. La maladie est indolore et ses premiers signes passent souvent inaperçus. Les dégâts causés par le glaucome sont toutefois irréversibles. Des traitements comme l’utilisation de collyres ou la chirurgie permettent de stopper son évolution, mais il est impossible de restaurer la vision lorsqu’elle a déjà été perdue.

« On estime qu’entre 250.000 à 300.000 personnes seraient atteintes d’un glaucome en Belgique. Cela représente 3 % de la population », explique Rafal Naczyk, porte-parole de l’association Eqla. « « Cependant, comme la maladie est indolore et asymptomatique, beaucoup de personnes sont atteintes sans le savoir. On estime que la moitié des personnes diagnostiquées ne savaient pas qu’elles étaient atteintes du glaucome. Cela peut durer un certain nombre d’années avant que l’on se rende compte qu’on commence à manquer d’informations visuelles. Le stade avancé du glaucome, c’est une vision tubulaire. Le patient voit uniquement ce qui est au centre, comme à travers une paille, mais son champ visuel étant atteint, il n’a plus de vision périphérique. Et s’il n’a pas suivi de traitement ou si ceux-ci ne sont pas efficaces, c’est la cécité. »

Les patients les plus à risque

Certaines personnes courent plus de risques que d’autres de développer un glaucome. Ophtalmologue spécialisée dans le glaucome au CHU Saint-Pierre à Bruxelles, Mary Bartik souligne que « les personnes qui ont un membre de la famille atteint de la maladie courent dix fois plus de risques de souffrir d’un glaucome. »

Les patients qui prennent de la cortisone sont également invités à se faire dépister régulièrement. « La cortisone peut faire monter la tension oculaire auprès de 30% de la population. Il faut veiller à ne pas prendre trop de traitements à base de cortisone sans prescription médicale. Il y a toute une liste de médicaments qui peuvent avoir des effets secondaires », met en garde Mary Bartik. Aussi conseille-t-elle aux patients sous corticoïdes de consulter régulièrement leur ophtalmologue pour vérifier si ceux-ci n’augmentent pas la tension oculaire.

Par ailleurs, certaines populations sont plus frappées que d’autres. Le glaucome est beaucoup plus présent auprès des personnes originaires d’Afrique subsaharienne, car elles ont une cornée beaucoup plus fine que celles des profils caucasiens. La cornée sera donc atteinte plus rapidement à l’inverse des populations asiatiques qui elles vont avoir tendance à développer un glaucome à angle fermé.

Le glaucome aigu

Certains patients développent un glaucome aigu, lié à l’anatomie de l’œil, qui est lui très douloureux. « Il touche souvent les hypermétropes, l’inverse de la myopie, car ces personnes ont souvent un œil plus court, un cristallin un peu plus rond », explique Mary Bartik. Lors d’une crise de glaucome aiguë, la tension dans l’œil augmente, et le liquide intra-oculaire ne peut plus s’écouler travers le trabéculum (le système qui assure la filtration de l’œil). « C’est là que survient une crise de glaucome aiguë, l’une des deux vraies urgences en ophtalmologie, car si on ne lève pas la crise endéans les 24 heures on perd la vue », met-elle en garde.

Par conséquent, la spécialiste insiste sur l’importance d’un dépistage précoce et régulier. « Nous conseillons de se faire dépister une fois par an, surtout si on a déjà des antécédents familiaux ou si l’on souffre de comorbidités, telles que l’hypertension ou de diabète. Comme c’est une maladie extrêmement insidieuse, car asymptomatique à ses débuts, le risque c’est que la maladie soit dépistée trop tard lorsque le glaucome est déjà bien installé. C’est pour cette raison qu’à partir de 40 ans, nous recommandons de se faire dépister au moins une fois par an. Les Belges vont chez le dentiste une fois par an, mais ils n’ont pas du tout le même réflexe pour les yeux », souligne Rafal Naczyk, porte-parole d’Eqla.

Pas de traitement curatif

« Comme le nerf optique vient du cerveau, il n’est pas possible de le réparer. Il n’y a pas encore de greffe du cerveau. Nous espérons tous qu’il soit possible de guérir le glaucome un jour, mais nous n’y sommes pas encore. Nous essayons de faciliter la vie du patient, car la compliance (NDLR : la capacité du patient à observer le traitement) est un facteur important, ainsi que l’adhérence au traitement », explique Mary Bartik.

Deux entreprises pharmaceutiques belges œuvrent à des médicaments qui freinent l’évolution de la maladie. « Istar Medical, société basée à Wavre, a développé un implant ophtalmique, un dispositif que l’on introduit dans l’œil pour permettre le drainage de l’œil et combattre ainsi le glaucome. Ce dispositif de chirurgie micro-invasive du glaucome est désormais homologué en Europe pour les personnes atteintes de glaucome à angle ouvert, et un premier patient a déjà bénéficié de cette chirurgie en Allemagne. EyeD Pharma travaille également sur un implant intra-oculaire en polymère. Il libère lui-même la quantité prédéterminée de médicament par jour », explique le porte-parole d’Eqla.

Dépistage gratuit

Cette semaine du glaucome se déroule du 13 au 19 mars. Le Service d’Ophtalmologie du CHU Saint-Pierre organise une journée de dépistage gratuit le vendredi 17 mars, de 8h30 à 16h30, sur son site Porte de Hal, à Bruxelles. Il n’est pas nécessaire de prendre rendez-vous.

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