L’e-cigarette et sa panoplie d’arômes, un danger ?
La cigarette électronique fait de plus en plus d’adeptes, avec son lot de goûts en tout genre. Un produit qui attire notamment les jeunes. Faut-il se méfier de ce produit et comment le réguler ? Éléments de réponse avec Suzanne Gabriels, experte prévention tabac à la Fondation contre le Cancer.
Il y a quelques jours, le Comité national contre le tabagisme (CNCT) a publié en France une étude sur le développement « anarchique » des nouveaux produits liés à la nicotine. Ses conclusions ? L’organisme alerte sur le statut des cigarettes électroniques et demande l’interdiction des arômes (autres que celui du tabac) et de la publicité faite par les influenceurs et par les buralistes.
Dans son rapport, le CNCT pointe surtout l’influence que ces arômes pourraient avoir sur les jeunes. Selon le comité, la diversité des goûts est un moyen d’hameçonner la jeunesse dans la consommation de tabac. En Belgique, comme le souligne Suzanne Gabriels, experte prévention tabac à la Fondation contre le Cancer, l’avis est plus nuancé. “Il faut se méfier. Le secteur du tabac développe évidemment une stratégie concernant la cigarette électronique, notamment en ciblant les jeunes. D’un autre côté, l’e-cigarette peut aussi être un possible outil de sevrage. Là, les arômes peuvent aider à choisir un goût et abandonner progressivement la cigarette classique. Il y a donc deux volets et c’est difficile d’y voir clair. »
Une question se pose alors : faut-il faire la promotion de la cigarette électronique pour aider les fumeurs, au risque d’entraîner la jeune génération vers une consommation de nicotine ? L’experte ouvre des pistes de réflexion pour trouver le bon compromis.
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Changer la communication
Au Pays-Bas, les organismes de lutte contre le tabac militent activement pour arrêter tous les arômes sauf le goût « tabac ». Pour la Fondation contre le Cancer, si l’on encourage les buralistes à cacher les e-cigarettes derrière les armoires ou encore éviter de commercialiser les e-cigarettes avec des couleurs flashys, cette solution proposée par nos voisins ne serait pas forcément bénéfique pour une partie de la population. « C’est une fausse bonne idée, parce que les fumeurs veulent justement prendre de la distance avec le tabac et donc aider dans le sevrage », indique Suzanne Gabriels.
Selon l’experte, c’est avant tout dans la communication sur les produits que les choses doivent changer. « La communication et les règles ne doivent pas être aux mains du commercial. C’est la tâche du gouvernement, du SPF Santé, de Sciensano, des organismes officiels de s’en charger de manière indépendante, en se basant sur des études. » Elle ajoute que si l’e-cigarette est moins nocive que la cigarette classique, il n’y a pour l’instant aucune connaissance quant à la nocivité sur le long terme.
La vape étant un produit potentiel dans le cas où le fumeur souhaite arrêter sa consommation de tabac, se fournir en substituts nicotiniques en pharmacie reste alors le meilleur moyen pour se lancer. Grâce au plan anti-tabac, validé par le gouvernement fédéral et les entités fédérées en décembre 2022, le cœur de cible de cette transition vers l’e-cigarette sera bientôt exclusivement pour les fumeurs. « Il est prévu d’obliger de mettre une brochure dans les paquets de cigarettes avec les pour et contre du sevrage et de la cigarette électronique. A ce moment-là, on cible les fumeurs. C’est différent d’une campagne de masse qui pourrait avoir un effet pervers, c’est-à-dire attirer les jeunes. »
Une liste du SPF Santé à revoir
Depuis l’arrivée de l’e-cigarette sur le marché belge, le SPF Santé fournit une « liste positive » reprenant toutes les vapes notifiées pour la vente. Si le mot « positif » peut surprendre, il faut avant tout le prendre avec des pincettes. « Cela ne veut pas du tout dire que ces arômes sont bons pour la santé, mais plutôt que la procédure administrative est respectée. C’est pour cela qu’il ne faut pas du tout faire confiance à un secteur commercial, dont l’objectif est de vendre au maximum », souligne Suzanne Gabriels.
Cette liste, longue de 809 pages, est totalement à revoir, selon la Fondation. Mais maintenant qu’il est en place, ce répertoire pourrait être l’occasion de créer une base reprenant tous les arômes et de progressivement les supprimer voire, pourquoi pas, de créer une liste négative. « Cette suppression pourrait se faire grâce à des études qui sortiront et qui indiqueront que tel ou tel produit est finalement néfaste. Ou alors si certains goûts attirent particulièrement les jeunes. Mais nous savons que cela demande beaucoup de travail. »
Une sonnette d’alarme doit dans tous les cas être tirée, sachant notamment que dans la dernière enquête menée par la Fondation a constaté que près d’un quart de la population fume.
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