La fatigue musculaire des athlètes mesurée grâce à une nouvelle technologie créée par une startup liégeoise
Si la fatigue musculaire est bien documentée chez les athlètes, la mesurer avec précision n’est pas une sinécure. Pour y voir clair, une start-up liégeoise vient de créer un dispositif innovant mêlant électrodes et algorithmes.
Jusqu’ici, les entraîneurs de sportifs de haut niveau surveillaient communément la fréquence cardiaque au repos de leurs athlètes pour évaluer leur état de fatigue. Une mesure ni très précise ni très reproductible. Face à ce constat, le Dr Pierre Rigaux, médecin du sport et entrepreneur liégeois, a développé, au sein de sa start-up Myocene, un nouveau dispositif capable de mesurer précisément la fatigue musculaire.
Celle-ci s’exprime par une diminution tant de la force que de la vitesse des contractions. Si elle s’étend durant quelques secondes, voire quelques minutes, une courte période de repos permet à l’athlète de récupérer. Par contre, si elle dure plus de quelques heures, le sportif subit alors une fatigue généralisée, appelée « fatigue calcique ». La récupération peut prendre plusieurs jours.
Le hockeyeur belge John-John Dohmen, médaillé d’or aux Jeux olympiques de Tokyo en 2021, est le premier athlète à avoir fait confiance au système Myocene: « En mesurant la fatigue musculaire, il donne une idée du risque de blessure encouru. De quoi optimiser l’entraînement. Soit en l’intensifiant car les muscles sont peu fatigués, soit en le diminuant car la fatigue est telle qu’elle pourrait être source des blessures. »
Pour réaliser cette mesure de la fatigue musculaire, le sportif s’assied sur une table, en intérieur ou en extérieur, les pieds pendant dans le vide. Des électrodes sont disposées sur l’un de ses quadriceps. Cet imposant muscle de la jambe n’a pas été choisi au hasard, il joue un rôle capital dans une large gamme de sports: du football au ski, en passant par le cyclisme et le hockey. A chaque neurostimulation, parfaitement identique à l’influx nerveux suivant, le muscle se contracte, entraînant une tension dans la jambe et un mouvement du tibia vers l’avant. Un capteur placé au niveau de celui-ci permet de mesurer précisément la réaction du muscle, et plus particulièrement sa force d’appui sur le capteur. Plus le muscle est fatigué, plus la force qu’il produit est faible. Un algorithme et une intelligence artificielle spécialement développés pour cette mesure musculaire entrent alors en piste. « Une séance de deux minutes, durant laquelle quarante-huit mesures sont effectuées, suffit à déterminer immédiatement et avec une grande précision l’état de fatigue du quadriceps de l’athlète », précise Pierre Rigaux. L’état du quadriceps est ensuite extrapolé au sportif tout entier.
En répondant à un besoin, Myocene espère voir son dispositif innovant – vendu 20 000 euros pièce – adopté par les clubs sportifs, les centres de préparation, les fédérations, les universités européennes mais aussi étasuniennes. Quoi qu’il en soit, pour que cette première année de commercialisation soit réussie, environ cinquante dispositifs doivent trouver acquéreur d’ici à fin 2022.
Prévention et traitement des migraines
Pierre Rigaux, fondateur de Myocene, n’est pas un inconnu. Ancien patron de Cefaly Technology, il est ce que certains appellent un « serial entrepreneur ». Il a notamment développé des dispositifs médicaux en forme de diadème à apposer sur le front, permettant de soulager, par des impulsions électriques, les personnes souffrant de migraines chroniques ou aiguës. Les bienfaits de cette neurostimulation crânienne ont été prouvés par plusieurs études cliniques. A la fois comme outil de prévention des crises sévères que comme traitement de fond. Avec une efficacité (réduction ou disparition des migraines) chez plus de 70% des patients, soit un taux supérieur à celui des médicaments antimigraines, lesquels peuvent s’accompagner de contre-indications et d’effets secondaires. Forte de ce succès, Cefaly Technology a obtenu l’autorisation de mise sur le marché de son diadème aux Etats-Unis. Résultat: son chiffre d’affaires a bondi de 24% en 2017 et de 48% en 2018, ce qui a permis à Pierre Rigaux de céder, en 2019, 80% de sa société au fonds canadien DW Healthcare Partners.
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