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Immunité collective, recontamination, vaccin : que sait-on de l’immunité face au coronavirus ?

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

Faut-il laisser circuler le coronavirus pour atteindre l’immunité collective ? Lors de la première vague, le débat faisait rage entre partisans de cette stratégie, et partisans d’un confinement. Mais que sait-on au juste de l’immunité face au coronavirus ? On fait le point.

Alors que la propagation du virus repart de plus belle dans de nombreux pays, notamment européens, l’OMS a décidé de prendre ouvertement position sur le sujet : il est inenvisageable de laisser le Covid-19 circuler librement pour que la population accède, comme certains l’ont suggéré, à l’immunité collective.

L’immunité collective, pas une option

« Jamais, dans l’histoire de la santé publique, l’immunité collective n’a été utilisée comme stratégie pour répondre à une épidémie, et encore moins à une pandémie. C’est scientifiquement et éthiquement problématique », a déclaré le directeur général de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus. « Laisser libre cours à un virus dangereux, dont nous ne comprenons pas tout, est tout simplement contraire à l’éthique. Ce n’est pas une option. » Certains pays ont pourtant eu recours à cette stratégie. Mais « l’immunité collective est obtenue en protégeant les personnes contre un virus, et non en les exposant à celui-ci », a-t-il martelé.

Selon l’OMS, qui cite diverses études épidémiologiques, le taux de létalité moyen du coronavirus s’élève à environ 0,6%, même s’il y « une forte augmentation du taux de létalité avec l’âge ». Une donnée qui peut sembler faible, mais qui est en réalité « beaucoup plus élevée que pour la grippe ».

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D’autant que, pour atteindre l’immunité collective, il faut atteindre un certain seuil dans la population. Or, « les enquêtes de séroprévalence suggèrent que dans la plupart des pays, moins de 10% de la population a été infectée », a détaillé pour sa part Tedros Adhanom Ghebreyesus. C’est loin d’être suffisant. Le concept d’immunité collective est notamment utilisé dans les campagnes de vaccination, mais, selon la maladie ciblée, le taux est différent. Et il doit toujours être assez important. Pour la variole, il faut que 95% de la population soit vaccinée pour que les 5% restant soient protégés. Pour la polio, ce taux est de 80%. Pour le coronavirus, on n’en sait encore rien.

Pas fiable, l’immunité ?

Et c’est bien cela le problème : si les connaissances scientifiques sur le Covid-19 grandissent chaque jour, les incertitudes sont encore nombreuses. Pourtant, cela n’a pas empêché le président américain Donald Trump, récemment infecté, de déclarer fièrement : « Je suis immunisé. » Vraiment ?

https://twitter.com/realDonaldTrump/status/1315316071243476997Donald J. Trumphttps://twitter.com/realDonaldTrump

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Certains individus ont nouvellement été réinfectés, ce qui pose questions sur notre immunité à long terme face à ce virus. La plupart des personnes infectées par le virus développent une réponse immunitaire au cours des premières semaines, mais nous ne savons pas si cette réponse est forte ou durable, ni si elle diffère d’une personne à l’autre.

Les cas de recontamination sont encore très rares, mais posent de nombreuses questions sur l’immunité. Chez certains patients, la deuxième infection est plus grave que la première. Mais chez d’autres, c’était l’inverse, preuve que le système immunitaire a appris à se défendre après la première infection. Quelle que soit leur cause, « les réinfections nous montrent que nous ne pouvons pas nous appuyer sur l’immunité acquise par l’infection naturelle pour atteindre une immunité de groupe », écrit la Pr Iwasaki, selon qui « cette stratégie est non seulement mortelle pour de nombreuses personnes, mais aussi inefficace ». Ces cas relancent une question cruciale : quels sont le niveau et la durée de l’immunité contre le SARS-CoV-2, le coronavirus responsable du Covid-19?

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Un système immunitaire complexe

Pour alimenter leur réflexion, les scientifiques se basent souvent sur ce qu’ils connaissent. Il n’est donc pas idiot de regarder comment les autres coronavirus qui ont croisé l’être humain se sont comportés, notamment du point de vue de l’immunité. Selon une étude, qui n’a pas encore été validée, le laps de temps avant une réinfection pourrait être assez court. Pour le virologue américain Anthony Fauci, qui conseille la Maison-Blanche sur le coronavirus, il y a de fortes chances que le Sars-Cov-2 se comporte comme les autres coronavirus : « Si vous regardez l’histoire des coronavirus, l’immunité protectrice varie de trois à six mois, à presque toujours moins d’un an. »

Ces derniers mois, les recherches sur la façon dont le système immunitaire réagit au Covid-19 se sont principalement concentrées sur les anticorps. Ce sont des protéines qui adhèrent à la surface de l’agent pathogène et l’empêchent d’infecter les cellules du corps. Il a déjà été démontré que les anticorps disparaissent du sang après une courte période de temps. Les personnes présentant des symptômes légers peuvent même ne pas produire d’anticorps.

Mais heureusement ce ne sont pas les seules à entrer en jeu. Notre corps est également constitué cellules immunitaires, comme les cellules T, qui créent des sortes d’aide-mémoire pour les infections futures. Ces cellules mémoires peuvent rapidement identifier et détruire une seconde infection que les anticorps ne peuvent plus contrôler. Les cellules B sont alors à leur tour capable de produire de tout nouveaux anticorps. Plusieurs études montrent que les cellules T et B font un travail remarquable contre le SARS-CoV-2 et fournissent une certaine forme de protection.

Et pour le vaccin ?

La situation la plus aisée pour les fabricants est qu’un vaccin génère une immunité à vie, comme la rougeole et la rubéole. Ce n’est généralement pas le cas des virus respiratoires, de sorte qu’un vaccin contre le Covid-19 ne peut pas empêcher une deuxième infection, mais il peut atténuer l’évolution de la maladie.

Un point positif possible est que l’immunité générée par un vaccin peut être plus puissante et protectrice que celle générée par une infection naturelle. Par exemple, l’immunité naturelle contre le papillomavirus, qui provoque le cancer du col de l’utérus, est plutôt faible. Une forte concentration de la protéine de surface du virus dans le vaccin produit des anticorps plus puissants et assure une meilleure protection. En outre, de nombreux virus tentent de désactiver le système immunitaire en cas d’infection, alors que les vaccins n’ont pas cette caractéristique. Les vaccins, en revanche, contiennent des excipients qui améliorent leur action.

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