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Glucose mania: pourquoi les personnes en bonne santé sont soudainement captivées par le taux de sucre dans leur sang

L’essentiel

• De plus en plus de personnes en bonne santé se mettent à surveiller leur glucose, notamment sous l’influence d’un best-seller sur le sujet.

• Des doutes scientifiques existent quant à la pertinence d’utiliser un glucomètre lorsqu’on n’est pas atteint du diabète.

• Mais selon la diététicienne Hella Van Laer, mesurer permet de se rendre compte de certaines réalités.

• Ne pas consommer trop de produits sucrés reste de toute façon un bon conseil, même s’il est dangereux de vouloir se passer complètement de glucose.

Désormais, les influenceurs soucieux de leur santé affichent fièrement un glucomètre à leur bras. À quoi ça sert? Tout le monde doit-il s’en équiper? «Cela peut permettre d’ouvrir les yeux».

Chez les personnes souffrant du diabète, ils sont absolument vitaux. Dans le monde du sport, ils sont omniprésents. Le cycliste Wout Van Aert ne s’entraîne même plus sans. Les lecteurs de glycémie en continu sont des appareils qui se fixent à l’aide d’une aiguille dans la peau du bras ou de l’abdomen et qui transmettent les valeurs de glycémie en temps réel à une application sur un smartphone.

Pour les sportifs, il peut être intéressant de savoir exactement quand consommer des glucides afin de maintenir l’organisme dans un état d’énergie adéquat. Mais désormais, les non-athlètes et les non-diabétiques s’empressent également d’enregistrer leur taux de glucose.

La déesse du glucose qui a mis la glycémie à l’agenda

La faute, en partie, à Faites votre glucose révolution (éditions Robert Laffont), le best-seller publié par Jessie Inchauspé il y a deux ans. La biochimiste française y raconte comment elle a détecté ses problèmes de santé lorsqu’elle a dû essayer un glucomètre pour la société de données pour laquelle elle travaillait. Cela a changé sa vie: sa dépression et son anxiété se sont révélées être le résultat d’un déséquilibre de son taux de sucre, qui présentait des pics gigantesques et rapides et des chutes profondes en raison de la nourriture qu’elle consommait.

Jessie Inchauspé, qui s’est transformée en «déesse du glucose», célèbre influenceuse en matière de glycémie, s’est plongée dans la science et a découvert toutes sortes d’astuces nutritionnelles pour maintenir une glycémie équilibrée. Ce qui, étonnament, est possible à réaliser sans avoir à abandonner les aliments riches en glucides, comme le pain et les pâtes. Désormais, elle partage ses conseils avec ses 4,6 millions d’abonnés sur Instagram.

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«Les informations données par Jessie Inchauspé sont fondées sur des preuves, estime la diététicienne Hella Van Laer. Il est juste dommage qu’elle en fasse maintenant une exploitation commerciale en vendant des compléments alimentaires à prendre avant les repas. Vous n’avez pas besoin de compléments pour équilibrer votre glycémie si vous êtes suffisamment conscient de ce que vous mangez. Son conseil de boire un verre d’eau vinaigrée avant chaque repas est également controversé. Nous ne savons pas ce que cela donne à long terme et c’est mauvais pour les dents.»

La glycémie peut-elle encore monter en flèche ?

Pour mémoire, l’organisme a besoin de glucose, source d’énergie pour les muscles, les tissus et les organes. Sans sucre dans le sang, c’est la mort. L’idée n’est donc pas d’éliminer le glucose de l’organisme.

«Il est tout à fait normal que la glycémie augmente en réponse à la consommation d’aliments et de liquides riches en hydrates de carbone, insiste Hella Van Laer. La glycémie peut présenter quelques vagues. Ce n’est que dans notre culture occidentale, où nous sommes constamment à la recherche d’en-cas sucrés, que cela se produit trop souvent et avec des valeurs aberrantes trop élevées

Les symptômes qui peuvent accompagner les pics d’une glycémie hors de contrôle sont la fatigue, les fringales, le fait d’avoir à nouveau faim rapidement après les repas, les baisses d’énergie, l’acné, les troubles du sommeil, le brouillard cérébral et les problèmes de concentration. À plus long terme, cela peut conduire au diabète de type 2, à la démence, à des symptômes de ménopause plus graves et à des maladies chroniques.

Mais le problème est qu’aujourd’hui, nous mettons au menu beaucoup trop de produits riches en amidon qui contiennent à peine des fibres, comme le pain blanc, le riz blanc ou les pâtes blanches

Hella Van Laer

Diététicienne

«Ce n’est pas en mangeant un plat de pâtes une fois par semaine que l’on devient diabétique, affirme Hella Van Laer. Mais le problème est qu’aujourd’hui, nous mettons au menu beaucoup trop de produits riches en amidon qui contiennent peu de fibres, comme le pain blanc, le riz blanc ou les pâtes blanches. Aussi, nous mangeons aussi toute la journée, ce qui maintient la glycémie à un niveau chroniquement élevé.»

«Si ces en-cas consistent en un œuf dur, des noix ou une branche de céleri, pas de problème, poursuit la diététicienne. Mais dans les faits, nous préférons de loin un café sucré, un biscuit ou une petite douceur. Ces pics et creux constants de sucre obligent l’organisme à produire en permanence de l’insuline. À un moment donné, cela peut entraîner une résistance à l’insuline, voire un diabète. En outre, de nombreuses personnes sont assises sur une chaise toute la journée, ce qui signifie que les sucres excédentaires ne sont pas consommés et sont stockés sous forme de graisse, ce qui favorise l’obésité.»

Tout le monde doit-il mesurer son glucose?

Moins de grignotage et un peu de bon sens: les secrets principaux d’une bonne santé. Faut-il dès lors investir dans un glucomètre, souvent coûteux? De nombreuses entreprises proposant des applications de santé de ce type voient un marché lucratif émerger. Le capteur coûte la coquette somme de 100 euros et ne dure que 14 jours. La plupart des gens le portent une fois tous les trois ou six mois.

Les opposants à la surveillance de la glycémie chez les non-diabétiques estiment que ce marketing est en avance sur une science encore en développement. Il serait beaucoup trop tôt pour formuler des conseils diététiques personnalisés basés sur la glycémie d’une personne. Les études montrent que les glucomètres ne sont pas toujours précis chez les personnes en bonne santé et qu’il n’est généralement pas possible de tirer des conclusions à partir d’une période de suivi de deux semaines. La communauté scientifique n’est pas encore totalement convaincue que le fait d’éviter les pics de glycémie a des effets bénéfiques sur la santé des personnes qui ne sont pas malades.

La vision contemporaine de la nutrition est également critiquée, car elle se concentre beaucoup trop sur des éléments tels que le glucose et le cholestérol, alors qu’une bonne alimentation est un concept holistique dans lequel la glycémie est déterminée non seulement par le contenu de l’assiette, mais aussi par le stress, le microbiome, le sommeil et le mode de vie sédentaire.

Le fait de mesurer incite au changement de comportement

Hella Van Laer

Diététicienne

Hella Van Laer se montre plus pragmatique. «Mesurer, c’est savoir. Nous connaissons tous les règles d’une alimentation saine, mais l’obésité et le diabète continuent d’augmenter. Une visualisation sous la forme d’un graphique de sa propre glycémie incite à un changement de comportement bien plus important que la simple lecture de quelques conseils de santé dans une brochure. Pour les personnes qui grignotent toute la journée et font peu d’exercice, il peut être très révélateur de constater qu’un sandwich complet avec de la confiture a un effet nettement plus négatif sur l’organisme qu’un sandwich complet avec du fromage et des crudités.»

«Etant donné son coût, le glucomètre n’est pour l’instant réservé qu’aux personnes très motivées » admet la diététicienne. Mais à l’avenir, les appareils de ce type deviendront de plus en plus populaires, et également moins chers.»

Attention à la «glucorexie nerveuse»

Compter les calories, marcher un certain nombre de pas, mesurer la glycémie… La frénésie de la mesure peut aussi conduire au stress et à la panique. Hella Van Laer déconseille le capteur à certaines personnes. «Ceux qui utilisent déjà des glucomètres aujourd’hui doivent veiller à ne pas devenir obsédés par les données et à ne pas trop se concentrer sur un graphique de glycémie plat», prévient-elle.

Ces personnes risquent de supprimer certains groupes d’aliments de leur régime, et celles ayant des antécédents de troubles alimentaires pourraient suivre un régime trop strict. Certains médecins ont baptisé ce phénomène «glucorexie nerveuse ».

Mais même sans glucomètre, il est possible de freiner sainement les montagnes russes de la glycémie grâce à quelques conseils diététiques simples. Ains, un fruit accompagné d’un peu de skyr risque moins de faire grimper la glycémie qu’un fruit seul. Il en va de même pour des pâtes avec beaucoup de légumes par rapport à un plat de pâtes avec seulement de la sauce tomate. Faire de l’exercice après un repas contribue à faire baisser le taux de glucose.

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