Pourquoi fait-il froid chez vous, malgré le chauffage ? © Getty Images

Frigorifié malgré le chauffage allumé? Voici 3 paramètres qui expliquent la sensation de froid (et 2 solutions)

Le thermostat affiche 20 degrés dans votre maison, mais vous frissonnez toujours. Le froid, c’est avant tout une question de ressenti, qui dépend de plusieurs paramètres. Voici comment mieux se chauffer.

Un air glacial qui s’infiltre jusque dans les os… Le froid a fait son retour en Belgique. Températures flirtant avec zéro et chutes de neige, l’hiver approche au plat pays. De quoi se calfeutrer près du chauffage. Pourtant, malgré un thermomètre affichant 20 degrés dans la maison, vous grelottez toujours. Comment l’expliquer?

La sensation de froid est un «déséquilibre physiologique entre notre production de chaleur et notre perte de chaleur», pose d’abord Geoffrey Van Moeseke, professeur d’architecture à l’UCLouvain. Et cette sensation est liée à beaucoup plus de paramètres que la seule température ambiante.

1. Les paramètres «d’ambiance»

«Le confort thermique, c’est la moyenne entre la température de l’air et celle des parois», renseigne Jacques Claessens, professeur émérite d’architecture à l’UCLouvain. Si une pièce est chauffée à 20 degrés mais que les murs en font quatorze, il fera une température ressentie de 17 degrés. C’est le principe de rayonnement: le corps échange de la chaleur avec les surfaces environnantes.

L’humidité et les courants d’air entrent aussi en jeu dans le ressenti du froid. Pour un bon confort thermique, un taux de 40 à 60 % d’humidité est recommandé. «Mais ce n’est pas le paramètre le plus important», précise Geoffrey Van Moeseke. Il n’est donc pas forcément intéressant d’installer un déshumidificateur, par exemple. «Les courants d’air sont un paramètre beaucoup plus déterminant».

2. Les paramètres physiologiques

La sensation de froid est aussi liée au corps et est propre à chaque individu, pointe Geoffrey Van Moeseke : «Le point d’équilibre n’est pas à la même température pour tout le monde».

Là encore, la production de chaleur est influencée par plusieurs paramètres lié à l’état de santé. Le stress, la fatigue, la déshydratation, le poids affaiblissent la régulation thermique du corps. Le gras est un isolant, et plus il fait froid, plus le besoin en calories est conséquent. La thermogénèse, soit la production de chaleur, mobilise la moitié des dépenses caloriques. L’âge et le sexe peuvent aussi entrer en jeu. En vieillissant, le métabolisme ralentit et le corps produit moins de chaleur. «Les personnes âgées sont généralement moins actives, et se réchauffent moins par le mouvement», note aussi le professeur de l’UCLouvain.

L’idée selon laquelle les femmes seraient plus frileuses que les hommes n’est pas une légende. Selon plusieurs recherches, la température de confort est plus haute de 2 degrés pour les femmes que pour les hommes. Une étude de l’Université de Lille a mis en évidence le rôle des hormones dans la thermogenèse et la thermosensation (captation de la température extérieure). La testostérone, hormone masculine, inhibe la protéine qui capte le froid, tandis de l’œstrogène, hormone féminine, épaissit le sang, vecteur de chaleur, qui ne circule pas suffisamment jusqu’aux extrémités.

Mais attention: avoir les pieds, les mains ou le nez constamment froids peut être lié au syndrome de Raynaud, un trouble temporaire de la circulation sanguine. D’autres maladies ou troubles de santé jouent un rôle sur la sensation de froid, comme le manque de fer (anémie) ou un dérèglement de la thyroïde.

Geoffrey Van Moeseke se méfie toutefois du paramètre sexe. «Le déséquilibre physiologique est plus intense pour une femme. Elle ressent davantage le froid, mais cela peut être lié à une norme sociale, avance le professeur. On demande aux femmes d’être moins vêtues, on adapte le chauffage aux hommes. C’est une question de sexe ou de genre.»

3. Paramètres comportementaux et psychologiques

La question de l’habillement entre dans les paramètres comportementaux, poursuit encore Geoffrey Van Moeseke. La liberté de s’habiller à sa guise, l’accès à des boissons chaudes, par exemple, sont liés à des comportements culturels, qui influencent également la sensation de froid.

Il existe aussi a un aspect psychologique. Un mal-être psychologique, un sentiment d’insécurité ou encore la décoration d’une pièce peut jouer sur le psyché et la perception du froid. Ce n’est pas pour rien qu’on parle d’une pièce chaleureuse.

4. Les solutions: isolation et slow heat

Pour lutter contre le froid, il faut avant tout isoler son logement. En particulier le sol et les fenêtres. Exit les simples vitrages qui laissent passer l’air.

Un simple vitrage simple a un coefficient U de 6, détaille Jacques Claessens. Le coefficient U est un coefficient de transfert thermique, qui permet de quantifier la perdition thermique d’un matériaux. Il se mesure en watt/m2/Kelvin. «Les doubles vitrages d’aujourd’hui ont un coefficient U égal 1, poursuit l’architecte. Ce n’est plus de l’air qu’il y a entre les deux vitres, contrairement aux doubles vitrages des années 1990, mais un gaz et une couche d’oxyde métallique, qui a comme propriété de peu rayonner. C’est le même concept que le thermos». Il existe aussi des nouveaux doubles vitrages très performants, avec du vide entre les deux vitres, renseigne encore le professeur. «Le coefficient U est de 0,6 mais le produit est encore cher et certains doutent subsistent quant à sa durabilité.»

Le coût de changement des fenêtres et des châssis peut se révéler assez onéreux. Pour les personnes qui n’auraient pas les moyens, ou les locataires, il existe également des films thermorétractables, poursuit l’architecte. C’est un collant double face invisible qui se place sur le pourtour d’un châssis. Jacques Claessens recommande aussi de créer des «zones tampons» en utilisant des rideaux entre les espaces extérieurs et intérieurs d’un logement.

Mais se protéger des courants d’air ne doit pas se faire au détriment de la ventilation. «Avant de tout calfeutrer chez soi, il faut un bon système de ventilation», prévient Geoffrey Van Moeseke. Une absence d’aération entraîne de l’insalubrité. D’autant qu’aérer ses pièces permet d’évacuer l’humidité.

Geoffrey Van Moeseke est aussi président de Slow Heat, un collectif citoyen et programme de co-recherche qui finance et soutient l’innovation dans la Région de Bruxelles-Capitale. La philosophie: mieux se chauffer pour diminuer sa consommation de chauffage.

Au lieu d’augmenter le thermostat, le collectif recommande de chauffer son corps et pas son logement. «Il est possible de ne chauffer sa maison qu’à 15 degrés avec le chauffage central, et chauffer son corps avec des vêtements appropriés, et des apports de chauffage ciblés», explique Geoffrey Van Moeseke. Douze ou treize degrés Celsius étant la limite de salubrité.

Alors comment faire ? Comme le dit l’adage, il n’y a pas de mauvaise météo, il n’y a que des mauvais vêtements. Il est préférable de privilégier les matières chaudes, comme la laine, et de se couvrir les extrémités. «Si vous être en télétravail, vous pouvez ajouter des éléments chauffants dans votre clavier d’ordinateur, ou mettre des mitaines chauffantes. Si vous avez froid avant d’entrer dans votre lit, utiliser une bouillotte ou un matelas chauffant. Enveloppez-vous dans un plaid, lorsque vous êtes dans le canapé, énumère le président de Slow Heat. Ca dépend du mode de vie, à chacun d’explorer les technique.»

Il s’agit aussi de chauffer «le bon espace au bon moment». «Le problème du chauffage central est qu’il est long à se déclencher, un chauffage d’appoint électrique peut être pertinent pour cibler une pièce ou espace bien précis temporairement». Il n’est pas non plus nécessaire de chauffer toutes les pièces de la maison, seulement celles qui sont le plus utilisées. Une méthode qui fera plaisir au portefeuille et à l’environnement.

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