Focus, l’invention belge qui permet aux enfants d’apaiser leur stress
Le stress est omniprésent dans la vie des enfants et des adolescents. Une chercheuse de l’UCLouvain a développé un dispositif leur permettant de gérer leurs émotions et de canaliser leur énergie.
A l’avenir, la scène deviendra peut-être courante dans les salles de classe et les cours de récréation. Dans sa main, un enfant tient un objet en forme de feuille afin de mieux gérer son stress. Focus – c’est son nom – a été développé par deux psychologues. Doté de capteurs, il mesure la fréquence cardiaque, mais aussi sa variabilité, à savoir la vitesse à laquelle le coeur accélère et freine: un indicateur direct du niveau de stress. Pour l’abaisser, l’enfant peut recourir à la cohérence cardiaque, c’est-à-dire respirer à un rythme régulier et défini, bien plus lentement qu’en temps normal, soit six respirations par minute. Focus l’y aidera.
Nous préconisons de réaliser au moins trois séances de cinq minutes par jour.
Tout en gardant le doigt sur le capteur de fréquence cardiaque, l’enfant respire au rythme défini par l’objet. Lorsque celui-ci s’éclaire latéralement ou qu’il vibre, il lui faut inspirer par le nez.
Au contraire, lorsque l’intensité lumineuse latérale diminue ou que la vibration cesse, c’est le signe qu’il faut expirer par la bouche. « Au fur et à mesure de l’exercice, une jauge lumineuse, au centre du dispositif, prend de plus en plus de place, indiquant en direct à l’enfant que son niveau de stress diminue », précise Valérie Dormal, chercheuse en psychologie à l’UCLouvain, codéveloppeuse de Focus, avec Sandrine Mejias, une consoeur de l’université de Lille, dans le cadre du programme First spin-off du Service public de Wallonie. Le dispositif, à emporter partout avec soi, vise à aider les enfants de 6 à 16 ans à reprendre le contrôle de leurs émotions et à diminuer leur niveau de stress.
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A l’instar des adultes, le stress affecte durement les enfants au quotidien. « L’école en est une source non négligeable, de même que la sphère familiale et amicale, souligne Valérie Dormal. Ces derniers mois, les confinements et les restrictions sanitaires les ont profondément affectés. Les adolescents ont très mal vécu l’isolement et, aujourd’hui, ils ont du mal à retrouver le contact avec les autres. » Grâce à Focus, l’enfant peut réaliser un exercice antistress de façon autonome. « En cinq minutes, la cohérence cardiaque enclenche des réactions physiologiques, poursuit la chercheuse. Elle influence le système nerveux parasympathique, lequel gère le stress. Cela a un effet bénéfique sur le corps: rapidement, l’enfant se sent moins angoissé, mieux dans sa peau, notamment grâce à la libération d’hormones antistress. Selon la littérature scientifique, l’état de bien-être perdure trois à quatre heures après l’exercice de cohérence cardiaque. C’est pourquoi nous préconisons d’en faire au moins trois séances de cinq minutes par jour. »
Une application à installer sur le téléphone des parents a été créée pour accompagner l’enfant dans sa démarche autonome. Y sont rapportés la fréquence à laquelle l’enfant se livre à l’exercice de cohérence cardiaque, le temps qu’il y consacre et la qualité des séances. En fonction de la performance de l’enfant, des conseils personnalisés sont promulgués par l’application.
Des premiers résultats positifs
Les bienfaits de Focus ont été mis en avant lors d’une première étude de cohorte, réalisée en 2021. Quelque 198 enfants, âgés de 6 à 16 ans, ont testé le dispositif durant cinq minutes pendant qu’une centaine d’autres s’adonnaient à cinq minutes de coloriage libre. « Des mesures physiologiques (fréquence cardiaque) et cognitives (stress et concentration) ont été prises juste avant et juste après le test. Chaque enfant a également été amené à répondre à un questionnaire d’anxiété et d’état de stress perçus », note Valérie Dormal.
Résultats? Tant dans le groupe testant Focus que dans le groupe témoin, un abaissement de la fréquence cardiaque est remarquée. « Mais avec notre dispositif, en sus, une diminution des niveaux de stress et d’agitation est rapportée par l’enfant: de lui-même, après la séance, il place le curseur plus bas sur une échelle de 1 à 100. De meilleures performances attentionnelles sont aussi observées. »
A la suite de cette première phase de tests, réalisés sur enfants sans stress particulier, d’autres essais sont prévus, avec l’aide d’une dizaine de mémorantes, dans les prochains mois. Et ce, en particulier sur des enfants souffrant de troubles de l’anxiété (anxiété générale ou phobique spécifique) ainsi que des ados suivis pour troubles anxieux ou dépressifs.
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