Les dons anonymes ne seront plus possibles.

Fin de l’anonymat pour les donneurs de sperme et d’ovocytes

Ludivine Ponciau
Ludivine Ponciau Journaliste au Vif

L’accord du nouveau gouvernement Arizona ne tranche pas la question de l’allongement du délai légal pour avorter. Il comporte par contre des mesures qui auront un impact direct sur la filiation.

Sur 209 pages, une seule est consacrée aux questions éthiques. Le volet a fait l’objet d’ultimes discussions avant que Bart De Wever ne se rende enfin chez le Roi présenter l’accord arraché au terme de plus de cinquante heures de négocations.

La principale mesure concerne les enfants nés dans des contextes particuliers puisqu’il s’agit de mettre fin à l’anonymat des donneurs de sperme et d’ovocytes. Pour les dons déjà realisés, une mesure transitoire sera proposée, «conformément à l’arrêt de la Cour constitutionnelle», afin de garantir un équilibre entre les droits des enfants, des parents d’intention et des donneurs de gamètes. La Cour constitutionelle sommait en effet le législateur d’octroyer à chaque enfant la possibilité de connaître ses origines.

A l’heure actuelle, la loi belge relative à la procréation médicalement assistée permet au donneur de sperme ou d’ovocytes qui le souhaite de rester anonyme, sans pour autant empêcher l’enfant issu de ce don de rechercher son parent biologique, notamment via les tests génétiques. Il existe donc deux types de dons, le don dirigé (lorsque le donneur est connu) et le don (toujours anonyme) à une banque de sperme. Cet anonymat ne sera donc plus garanti.

L’accouchement anonyme reste non-autorisé. Cependant, le gouvernement entend rendre possible l’accouchement discret. Les données relatives à la mère seront conservées par un organisme indépendant et ne seront accessibles qu’à l’enfant né de cet accouchement. L’enfant conservera ainsi la possibilité de contacter ultérieurement sa mère biologique par l’intermédiaire de cet organisme. Un équilibre, décrit l’accord, «qui permettra de protéger conjointement la mère et l’enfant en prévoyant la possibilité pour la mère d’accoucher en toute discrétion tout en préservant la possibilité pour l’enfant de naître dans de bonnes conditions et de pouvoir retrouver ses racines s’il le souhaite».

Un cadre législatif est également prévu pour les cas de maternité altruiste sans lien génétique entre la mère porteuse et l’enfant. Il aura pour conséquence d’accorder automatiquement aux parents d’intention (y compris les célibataires et les couples LGBT+) tous les droits parentaux et ce, dès la naissance. Il s’agit d’une avancée significative. A l’heure actuelle, la mère d’intention doit entamer une procédure d’adoption de l’enfant né d’une mère porteuse, laquelle doit alors renoncer à ses droits parentaux. Une procédure qui peut s’étirer jusqu’à deux ans.

Aucune discussion en vue par contre pour établir un cadre pour d’autres formes de parentalités, comme la coparentalité par exemple, pour lequelles les demandes sont croissantes.

L’Arizona ambitionne également de progresser sur le terrain de l’euthanasie. La formation est favorable à l’élargissement de la déclaration anticipée aux personnes atteintes de démence et qui sont dans l’incapacité de signifier leur consentement. En fin de législature passée, les libéraux flamands avaient encore tenté d’opérer ce changement, mais il y avait un manque de consensus à ce sujet dans la Vivaldi. Un cadre viendra fixer les conditions dans lesquelles ce concentement pourrait être pris en compte s’il a fait l’objet d’une déclaration anticipée.

Les associations qui militent pour un élargissement du droit à l’avortement n’apprendront rien de neuf en parcourant l’accord, qui se limite à confirmer que le débat sociétal se poursuivra sur la base du rapport du comité d’experts. «Nous modifions la législation actuelle sur l’avortement après consensus au sein des partis de la majorité».

Ce n’est pas une surprise: sur ce dossier, N-VA, CD&V, Vooruit, MR et Engagés n’étaient pas sur la même longueur d’onde. N-VA et le CD&V s’opposaient à l’allongement du délai au cours duquel l’avortement est autorisé. Vooruit, lui, y était favorable. Les cinq formations avaient déjà décidé de rejeter tous les textes à l’agenda du Parlement, sauf si un consensus pouvait être dégagé, «indépendamment de leur position sur le fond». 

Le 20 janvier 2025, la plateforme de lutte pour le droit à l’IVG Abortion Right rappellait ses exigences aux cinq formations qui, au moment des négociations, hésitaient entre deux options: porter le délai légal de 12 à 14 semaines post-conception et réduire le délai de réflexion obligatoire entre l’entretien préalable et l’IVG, actuellement fixé à 6 jours, ou laisser le libre vote au Parlement.

La plateforme s’inquiétait du fait que la première option soit finalement adoptée et réitèrait, dans un communiqué, l’importance de tenir compte du rapport académique commandé par le précédent gouvernement pour évaluer la loi et la pratique de l’avortement en Belgique. Elle réclamait dès lors l’allongement du délai légal à 18 semaines de grossesse, la suppression du délai de réflexion obligatoire, la reconnaissance de l’avortement comme un soin de santé, ainsi que la suppression des sanctions pénales à l’égard des femmes. Et appellait les partis négociant l’Arizona à garantir la liberté de vote du Parlement. Les débats se poursuivront donc.

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