De l’avion à Walibi, du bus au restaurant: comment la cigarette a été bannie de l’espace public… et ce n’est pas fini
L’odeur de tabac sera désormais plus rare à Walibi. Le parc d’attractions a décidé d’anticiper l’interdiction de fumer, qui se généralisera dans ce secteur en 2025. Les espaces publics où il est possible d’en griller une se raréfient. Retour sur l’histoire de l’invisibilisation de la clope.
Les accros à la nicotine doivent désormais ranger le briquet à Walibi. Le parc d’attractions wavrien est devenu non-fumeur pour sa réouverture, ce samedi 30 mars 2024, à l’exception de six zones bien délimitées.
Une première étape en forme de test pour Walibi, avant l’interdiction totale de la cigarette au 1er janvier 2025, date à laquelle l’ensemble des parcs d’attractions belges auront l’obligation légale d’être non-fumeurs. Bellewaerde et les parcs Plopsa ont également anticipé cette décision dès à présent.
Cette prochaine interdiction concerne également les parcs animaliers, les fermes pour enfants (pendant les activités), les plaines de jeux et vaudra autour des terrains de sport, notamment.
Une décision qui entend invisibiliser la cigarette dans tous ces espaces fréquentés par les mineurs. «L’idée n’est pas de faire la chasse aux fumeurs, mais bien de diminuer l’exposition des jeunes aux produits du tabac, détaille Nora Mélard, experte en prévention contre le tabagisme à la Fondation contre le cancer. Il faut continuer à dénormaliser la cigarette, la rendre moins visible, moins accessible. Les dernières mesures prises par la Belgique vont en ce sens».
Vers une “génération sans tabac”
Cette prochaine interdiction de fumer dans les parcs d’attraction n’est en effet pas la seule prise par la Belgique pour tendre «vers une génération sans tabac», comme le prévoit l’accord de gouvernement.
Fin 2023, le ministre fédéral de la Santé, Frank Vandenbroucke (Vooruit), dévoilait 10 mesures contre le tabagisme. «Nous voulons que les gens, et en particulier les jeunes, soient mieux protégés et qu’ils soient moins en contact avec le tabac ou d’autres produits à fumer, expliquait-il. C’est pourquoi nous augmentons les obstacles les uns après les autres, afin d’empêcher le lobby du tabac de commercialiser ses produits nocifs pour la santé.»
Outre les nouveaux lieux sans tabac, les points de vente temporaires ne seront plus autorisés, par exemple en festival, dès l’an prochain. Les supermarchés de plus de 400 mètres carrés verront également l’interdiction de vente du tabac avancée de 2028 à juillet 2025.
L’interdiction de la publicité pour la cigarette sera encore étendue l’an prochain, avec des règles visant à réduire totalement la visibilité des produits de tabac dans les points de vente («display ban», interdiction d’étalage). Seront visés également les produits assimilés, tels que les e-cigarettes, les produits à fumer à base de plantes, appareils, filtres, papiers etc. Les produits devront être placés dans une pièce séparée ou rangés dans un tiroir ou une armoire afin de ne pas être exposés.
De 1976 à 2025: la cigarette de plus en plus interdite
La cigarette continue donc de s’effacer progressivement de l’espace public. Un mouvement qui ne date pas d’hier. Transports en commun, restaurants, lieux de travail… Depuis bientôt 50 ans, le bannissement du tabac réduit les espaces «fumée admise».
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Dans une réaction aux dernières mesures anti-tabac, la Fondation contre le cancer salue globalement les décisions, sans se leurrer face à l’ampleur du combat qu’il reste à mener. La lutte contre le tabagisme ne se limitera pas à l’interdiction et à la sanction.
«Il est crucial d’aider également les personnes qui fument à surmonter leur dépendance. En Irlande, le tabagisme est considéré comme une maladie et le secteur des soins de santé s’engage structurellement à aider les personnes qui fument. Une femme enceinte sera testée, comme elle l’est pour le diabète, pour savoir si elle fume et recevoir une aide le cas échéant. Le modèle belge est loin de ça et la question globale de l’aide au sevrage est encore trop souvent délaissée», déplore Nora Mélard.
«Aujourd’hui, nous connaissons tous les effets néfastes de la cigarette sur la santé, poursuit l’experte. Si vous demandez à n’importe qui, même à un fumeur, s’il souhaite que ses enfants soient exposés au tabac, tout le monde dira non. Mais la cigarette est encore une norme, elle fait partie de notre société et est un facteur qui augmente les inégalités de santé».
24% de fumeurs
Selon les chiffres de la Fondation contre le cancer, le nombre de fumeurs tend bien à diminuer en Belgique, mais chez les personnes moins favorisées, la diminution est bien moins rapide.
«Commencer à fumer se fait en général entre 14 et 25 ans, et une grande majorité des fumeurs le sont devenus avant 18 ans. Les premières victimes du tabac, se sont donc les jeunes. Aujourd’hui, avec certains produits plus technologiques, ils ne savent même plus dire s’il y a de la nicotine ou pas dans ce qu’ils fument», complète la spécialiste du tabagisme.
Le site de la Fondation contre le cancer précise que 24 % de la population belge fume, dont 19 % quotidiennement, et ce, à raison d’environ quatorze cigarettes par jour, selon des chiffres de 2022. «Dans notre pays, le tabagisme est la principale cause évitable de cancer. Chaque jour, près de 40 Belges, soit 14.000 personnes par an, meurent du tabagisme. Sans compter les 300.000 Belges qui souffrent de maladies liées au tabac», lit-on encore.
Pour ceux qui souhaitent que ce mégot écrasé dans un cendrier soit le dernier, la Fondation contre le cancer renvoie à la plate-forme tabacstop, qui fournit des conseils et des aides. Le mois prochain, l’action «buddydeal» encouragera aussi ceux qui souhaitent arrêter de fumer, en se trouvant un partenaire dans ce défi. En Wallonie, l’action «Ensemble Vers Un Nouveau Souffle» se tiendra également.
Pour les autres, cachez cette cigarette que je ne saurais voir…
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