Covid long: comment le coronavirus affecte le cerveau
Le Covid-19 affecte le cerveau humain. Chez certains, les symptômes peuvent même apparaitre ou persister sur le long terme. Des études tentent de lever le voile sur ce phénomène.
Le coronavirus provoque des symptômes phares : fièvre, toux, fatigue, courbatures… Mais les séquelles sur les patients vont bien au-delà: AVC, délire, anxiété, confusion, problèmes de mémoire, difficulté à se concentrer, fatigue… le cerveau et le système nerveux sont également touchés de plein fouet par la maladie. Des symptômes qui peuvent également perdurer dans le temps. Des symptômes qui peuvent se manifester sur le long terme et que de nouvelles études permettent de mieux appréhender.
Des centaines d’études menées dans le monde ont révélé une prévalence d’anomalies neurologiques chez les patients atteints de Covid-19, allant de symptômes légers comme des maux de tête, une perte d’odorat et des sensations de picotement, à des résultats plus graves comme l’aphasie (incapacité de parler), des accidents vasculaires cérébraux et des crises d’épilepsie.
Dès le début de l’épidémie
C’est ce qu’on appelle le « Covid long », des conséquences de l’infection que nous n’avions pas prévues au départ. De nombreux patients se plaignent, des mois après leur rétablissement de la maladie, de difficultés à se concentrer, à trouver leurs mots et à accomplir des tâches compliquées.
Dès le mois d’avril 2020, une étude publiée dans la revue spécialisée JAMA Neurology rapportait que, sur 214 patients de Wuhan atteints de Covid-19, 36% avaient des symptômes neurologiques (douleurs nerveuses, crises convulsives, AVC…). Même observation dans le New England Journal of Medicine où des médecins de Strasbourg notaient que, sur 58 patients atteints de Covid-19, 40 présentaient une agitation anormale, 26 souffraient de confusion mentale, et environ un tiers présentaient une désorientation, une inattention ou encore des mouvements mal contrôlés.
Perte d’odorat
Ce n’est pas un cas unique : les virus impactent souvent le cerveau, à des degrés divers. Dans le cas de certaines infections, les conséquences sont modestes, avec une fatigue passagère ou des maux de tête. Mais dans d’autres cas, on retrouve des virus capables d’infecter directement et de détruire des cellules du cerveau, causant des dommages durables et entraînant des déficiences permanentes.
Une atteinte qui peut expliquer un autre symptôme phare du virus : la perte d’odorat. « Certains virus respiratoires ont une affinité pour les cellules du système nerveux. (…) Les cellules olfactives sont très sensibles à l’invasion virale et sont particulièrement ciblées par le SRAS-CoV-2, et c’est pourquoi l’un des principaux symptômes du Covid-19 est la perte d’odorat », explique ainsi le Dr Sudha Seshadri, professeure de neurologie et co-auteure d’une étude sur l’impact du SRAS-CoV-2 sur le système nerveux central. Les cellules olfactives sont concentrées dans le nez. Par leur intermédiaire, le virus atteint le bulbe olfactif dans le cerveau, qui est situé près de l’hippocampe, une zone du cerveau impliquée dans la mémoire à court terme.
Infection des neurones
Au début, on retrouve essentiellement de la confusion, des maux de tête et autres symptômes neurologiques aigus, symptômes qui s’améliorent généralement au fur et à mesure du rétablissement du patient. Mais d’autres syndromes peuvent apparaitre ou persister au fil des semaines.
D’où viennent ces symptômes ? L’hypothèse la plus sérieuse selon les chercheurs est celle de l’orage de cytokine. Le corps déclencherait une réaction de défense disproportionnée face au Covid, pouvant entraîner une surchauffe du cerveau, avec des conséquences neurologiques spécifiques.
Mais cela peut également venir d’une infection plus directe. De nombreuses études ont lieu depuis des mois pour tenter de faire la lumière. Une récente recherche menée par l’université de Yale et l’Institut du cerveau en France suggère par exemple que le coronavirus peut infecter les neurones. L’étude, publiée dans la revue Journal of Experimental Medicine, indique que le coronavirus peut « pénétrer dans les neurones et utiliser leurs composants pour se multiplier, entraînant alors des changements métaboliques dans les cellules infectées, sans pour autant les détruire », explique l’Institut du cerveau. Cependant, « les cellules voisines des neurones infectées se voient privées d’oxygène et finissent par mourir ».
Selon les chercheurs, des études sont encore nécessaires pour identifier de manière claire la voie empruntée par le virus pour entrer dans le cerveau et confirmer « le lien entre les changements cellulaires observés au niveau des neurones et les symptômes neurologiques rapportés ».
Brouillard cérébral
Parmi tous les symptômes neurologiques évoqués dans les diverses études, c’est sans doute le « brouillard cérébral » qui est le plus spécifique des suites du Covid. Ce symptôme, traduit du terme « brain fog » en anglais, n’est pas clairement défini, car il est assez nouveau. Il représente une sorte de signal d’alarme du cerveau, indiquant que son équilibre a été perturbé.
Il se présente sous la forme d’une fatigue intellectuelle, menant à un sentiment de confusion, un manque de clarté mentale et de concentration. Des pertes de mémoire, des sautes d’humeur ou encore un manque de motivation peuvent également survenir. Ces désagréments peuvent ne durer que quelques minutes, mais il arrive qu’ils persistent durant des semaines.
D’après des travaux menés par Adam Hampshire, médecin à l’Imperial College de Londres, les malades ayant souffert d’une forme grave du Covid-19, obtiennent de moins bons résultats aux tests cognitifs dans plusieurs domaines que ce à quoi on pourrait s’attendre compte tenu de leur âge. Une baisse de performance équivalente à un vieillissement cérébral de 10 ans.
Les personnes qui survivent au coronavirus sont nombreuses à consulter par la suite des neurologues. Si certains présentent encore des symptômes après six mois, impossible de prédire aujourd’hui leur durabilité. Le passage en réanimation peut, en soi, créer la confusion, en particulier à cause des médicaments. Mais des neurologues ont constaté que le retour à la normale, pour les patients Covid, semblait prendre plus longtemps que pour ceux qui ont survécu à une crise cardiaque ou un AVC.
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici