La coqueluche n’est pas la seule maladie à affecter les voies respiratoires en ce début d’été. © BELGAIMAGE

Coqueluche, Covid, pneumocoque: pourquoi tant de monde tousse cet été

Ludivine Ponciau
Ludivine Ponciau Journaliste au Vif

Plusieurs maladies respiratoires circulent en ce début d’été frisquet. Elles ne sont pas forcément plus agressives mais elles sont de sortie au même moment. La faute, en partie, à la pandémie.

La France est confrontée à une inquiétante recrudescence de cas de coqueluche depuis le début de l’année. Très contagieuse, l’infection respiratoire a déjà coûté la vie à dix-sept personnes, dont douze nourrissons, alarme Santé publique France. La flambée épidémique serait l’une des plus fortes enregistrées au cours des trente dernières années. En Belgique aussi, la maladie circule depuis quelques mois. Pas encore de manière aussi impressionnante que dans l’Hexagone, mais le nombre de cas reste plus élevé qu’il y a vingt ans, relève Sciensano, dont le centre national de référence pour la coqueluche reçoit actuellement un nombre important de demandes de diagnostic.

Chef du service pédiatrie à l’hôpital universitaire des enfants Reine Fabiola à Bruxelles (Huderf), le docteur Pierre Smeesters a également constaté une importante augmentation du nombre de jeunes malades ces dernières semaines. «En pédiatrie, nous sommes très préoccupés par la coqueluche et la rougeole, surtout chez les moins de trois mois. Nous avons été confrontés à des décès et à des cas difficiles. Ce qui est d’autant plus malheureux, c’est que la plupart de ces cas auraient pu être évités par une vaccination durant la grossesse. Or, on constate que l’information à ce sujet n’a pas assez circulé ou que certaines personnes se montrent encore très réticentes face à la vaccination».

En ce qui concerne la coqueluche, des études sérologiques démontrent une diminution marquée, voire une disparition des anticorps post-vaccinaux au cours des 5 à 10 ans qui suivent la dernière vaccination. Le dépistage par PCR ou sérologique plus fréquent de la coqueluche, notamment chez les nourrissons, explique également la hausse du nombre de cas signalés. Depuis 2010, on recense chaque année un à cinq décès de bébés liés à cette maladie en Belgique.

Causée par la bactérie Bordetella pertussis, la coqueluche affecte plus gravement les enfants de moins de six mois non vaccinés, ou insuffisamment, à qui des enfants plus âgés ou des adultes ont transmis la maladie. L’immunité de groupe joue donc un rôle important dans la protection des plus jeunes. Selon les études menées sur la propagation de l’infection bactérienne, une personne atteinte de coqueluche peut à elle seule contaminer 15 à 17 personnes en moyenne, via les gouttelettes provenant de son nez et sa bouche et surtout durant la première semaine de toux. Le risque de contagion est considéré comme nul trois à cinq jours après le début de la prise d’antibiotiques. Mais jusqu’à trois semaines en l’absence de traitement.

Les femmes enceintes moins protégées

Chez le petit enfant non vacciné, la coqueluche débute souvent par une toux a priori ordinaire avant l’apparition de quintes répétitives, violentes. Au point de conduire chez certains malades à des vomissements. Le son caractéristique, mais pas systématique, de cette toux liée à la coqueluche est souvent comparée au chant du coq. Chez les ados et les adultes anciennement vaccinés, la maladie prend généralement la forme d’une toux banale mais qui peut durer une bonne quinzaine de jours.

En réalité, entre la période d’incubation et la disparition totale des quintes de toux, il peut s’écouler plusieurs semaines, ce qui vaut à la maladie le surnom de « toux des 100 jours ».

En France, comme en Belgique, les autorités sanitaires insistent sur la vaccination contre la coqueluche des futures mères. A partir de la 30e semaine de grossesse, les anticorps de la mère apportent au fœtus une protection efficace contre la coqueluche. Les futures mères doivent également rester prudentes si elles entrent en contact avec de jeunes enfants susceptibles d’être porteurs du parvovirus (ndlr: aussi appelé érythème infectieux ou cinquième maladie) ou de la rougeole en raison des risques importants pour le fœtus.

L’autre raison de cette résurgence de la maladie, c’est l’effet Covid, comme l’explique le virologue Steven Van Gucht. «On constate une baisse de l’immunité dans la population mais ce n’est pas le principal problème. La coqueluche a toujours été une maladie cyclique qui réapparaît tous les quatre ou cinq ans. Ce qui est particulier cette année, c’est que d’autres virus ou bactéries sont également très présents en cette saison étant donné que leur cycle de circulation a été perturbé par le Covid-19. C’est le cas des infections à mycoplasmes, qui peuvent déboucher sur des pneumonies, ou le parvovirus. Quant au sous-variant JN.1 du Covid-19 et de ses deux « enfants », le KP2 et le KP3, s’ils n’ont rien de spectaculaire, ils contribuent à faire recirculer la maladie». A cela vient s’ajouter la météo maussade de ces dernières semaines, responsable de quelques bons gros rhumes. Sans oublier les allergies saisonnières qui peuvent elles aussi provoquer une irritation des voies respiratoires.

Une analyse que partage le Dr Smeesters, qui ajoute au tableau le virus respiratoire syncytial (VRS), la grippe et la pneumonie à pneumocoque. «Ces maladies aussi sont très présentes en raison d’un effet rebond lié au Covid-19. Elles avaient très peu circulé durant cette période et juste après. On assiste donc à un phénomène de rattrapage contre lequel on ne peut pas faire grand-chose, si ce n’est se prémunir grâce à la vaccination, le temps que la population puisse se refaire une immunité». Le médecin de l’Huderf ne préconise aucune mesure particulière pour les groupes d’enfants en plaines de jeu, camps ou stages. Le bon sens et la prudence en cas de symptômes tels qu’une toux sévère, une forte fièvre et une difficulté à s’alimenter chez l’enfant restent de mise.

Le nombre important d’infections s’explique par un effet rebond d’après-Covid. Les maladies ont moins circulé durant cette période. On assiste donc à un effet de rattrapage. © BELGAIMAGE

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