Coeur, reins, intestins…: conseils et astuces pour prendre soin de ses organes
Le corps humain possède sa propre mécanique. Indispensables à son fonctionnement, nos organes peuvent être préservés à travers des gestes simples et des habitudes de vie plus saines. Coeur, cerveau, poumons, foie, reins, intestins: voici nos conseils.
Voici comment aider votre corps à bien fonctionner, à travers six organes.
Notre mode de vie a une influence sur la santé de notre cerveau et ses performances. Pour le préserver, il est recommandé de diversifier ses centres d’intérêt, de tisser des liens sociaux, de manger sainement et de bien dormir.
Empêchez vos neurones de mourir. Découvrez les trois aliments indispensables pour booster votre cerveau.» Les pubs de ce type foisonnent sur Internet. Le cerveau est aussi un filon éditorial inépuisable: chaque année, de nouveaux ouvrages consacrés à cet organe infiniment complexe, chef d’orchestre du corps humain, sont publiés.
86 milliards
Au meilleur de ses capacités, le cerveau compte 86 milliards de neurones. Il en perd 85 000 par jour, soit 1 par seconde. Les capacités cérébrales ne diminuent pas pour autant, car les neurones perdus sont remplacés par d’autres. Cette capacité de remplacement se réduit avec l’âge, mais ce sont surtout des connexions que l’on perd en vieillissant.
Grâce à l’imagerie cérébrale et aux progrès de la neuropsychologie, on en sait plus aujourd’hui sur l’organisation du système nerveux central, le mode de communication des neurones ou encore la plasticité cérébrale. Le cerveau répare, améliore, innove. Il nous permet d’apprendre, d’inventer et remédie lui-même à ses défaillances. «Si chacun de nous éprouve des sensations, construit sa pensée, apprécie, se souvient, s’adapte et décide, c’est grâce au cerveau, signale Bernard Sablonnière, médecin biologiste, auteur du livre Les Nouveaux Territoires du cerveau (Odile Jacob, 2016). Contrairement à ce que l’on pensait il y a encore trente ans, le cerveau n’est pas façonné dès la naissance: l’éducation et l’apprentissage exercent une forte emprise sur ses capacités futures.»
Diversifier ses activités
Notre hygiène de vie a une influence déterminante sur la chimie du cet organe de 1,3 kilo en moyenne, dont les dysfonctionnements (accident vasculaire cérébral, maladie d’Alzheimer, de Parkinson…) constituent 35% des maladies en Europe. Le cerveau souffre de la routine. «Il a besoin de découvrir sans cesse de nouveaux horizons, sans quoi il “rouille” et dégénère», souligne le Pr Sablonnière. Des occupations diversifiées lui sont bénéfiques: musique, lecture, écriture, cuisine, jardinage, bricolage, activités sportives, jeux de société, voyages… Etre curieux de tout et modifier de temps en temps ses habitudes contraint le cerveau à s’adapter, effort qui favorise la formation de nouvelles connexions neuronales.
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La survie de nos neurones dépend de la qualité et de la variété de notre alimentation. Les aliments pauvres en acides gras et riches en antioxydants naturels sont à privilégier: fruits, légumes, poissons, viandes blanches… La consommation d’oméga- 3, acides gras essentiels présents dans les poissons gras (sardine, hareng, maquereau, saumon), l’huile de lin, les noix… stabilise la membrane des neurones. Le carburant de base du cet organe qui ne s’arrête jamais est fourni par le glucose. «Il est donc nécessaire de consommer à chaque repas des aliments riches en sucres lents: féculents, pain, céréales», signale Amine Mestari, réalisateur de documentaires scientifiques et auteur du livre Les Pouvoirs incroyables du cerveau (Tallandier, 2016). En revanche, une surconsommation de produits comme les sodas et les aliments industriels, riches en sucres ajoutés, accélère le vieillissement du cerveau et le déclin cognitif.
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Eloigner les écrans
Avoir des amis, c’est bon pour le cerveau
Tisser des liens sociaux stimule le cerveau. Ce constat est confirmé par une étude franco-américaine menée sur un groupe de macaques rhésus, primates dont l’architecture cérébrale est comparable à celle de l’homme. Plus l’animal est populaire et affiche un nombre élevé de compagnons, plus certaines zones de son cerveau situées dans le lobe temporal sont développées.
Un moyen efficace d’éviter la «rouille» du cerveau est de faire régime de temps en temps. «La vie de nos ancêtres chasseurs- cueilleurs était ponctuée de périodes d’abondance et de manque de nourriture, alternance qui régule de nombreuses fonctions cérébrales», rappelle Bernard Sablonnière. En outre, boire de l’eau régulièrement est essentiel pour éviter la déshydratation, qui diminue les capacités cognitives comme la concentration et la mémoire à court terme.
Pratiqués régulièrement, la marche, la course à pied, le vélo… favorisent la fabrication de nouvelles cellules. Face au stress et à l’anxiété, qui causent des pertes de mémoire et des troubles de l’attention, la méditation invite le cerveau à ralentir le rythme de ses ondes. Le sommeil active des circuits capables de réguler les émotions, consolide l’encodage de nos souvenirs et nourrit l’imagination. De plus, le cerveau se contracte quand nous dormons, ce qui facilite l’élimination des déchets toxiques présents dans ses tissus. Manquer de sommeil désorganise la mémoire, augmente les risques d’AVC, de démence… Les spécialistes du cerveau recommandent donc, à l’heure du coucher, d’éviter l’exposition aux écrans et aux notifications, susceptible de réduire la durée et la qualité de nos nuits.
Le livre pour aller plus loin
Compliqués, les livres sur le cerveau? Pas tous. Dans Face à face avec son cerveau (Odile Jacob, 2021), le neuroscientifique Stanislas Dehaene commente une sélection d’images spectaculaires du cerveau et raconte l’histoire des découvertes sur cet organe.
Eviter le tabac ne suffit pas pour prendre soin de ses poumons. Pour notre respiration comme pour notre alimentation, rester vigilant aux facteurs environnementaux est un bon réflexe.
Il est de loin le plus meurtrier de tous: le cancer du poumon tue chaque année 6 500 patients en Belgique. Usual suspect, le tabac est responsable de l’apparition de 80% des cancers pulmonaires et de 95% des cancers à petites cellules, la forme la plus agressive de la maladie. Les autres pathologies les plus fréquentes qui dégradent les poumons sont la bronchopneumopathie chronique obstructive (pouvant être associée à différentes conditions pathologiques affectant la capacité respiratoire, telles que l’emphysème) et l’asthme.
80%
Le tabac est responsable de l’apparition de 80% des cancers pulmonaires et de 95% des cancers à petites cellules, la forme la plus agressive de la maladie.
Notre alimentation, l’air que nous respirons, l’exposition à des rayonnements ou à des radiations, certaines habitudes de vie: autant de paramètres qui entrent dans le champ de l’exposome, terme qui désigne l’ensemble des expositions actives ou passives à différents facteurs extérieurs que subit un humain dès sa conception. Or, comme le souligne l’Institut national français de la santé et de la recherche médicale (Inserm), les facteurs environnementaux seraient à l’origine de plus de 70 % des maladies non transmissibles, qu’il s’agisse de troubles cardiovasculaires ou métaboliques, de cancers ou encore de problèmes respiratoires chroniques. «Cet exposome peut être à l’origine d’inflammations du poumon et, in fine, de phénomènes de dégénérescence potentiellement aggravée en fonction des fragilités génétiques que chacun peut présenter», développe le Pr Julien Guiot, pneumologue et allergologue au CHU de Liège.
Du radon aux rayons
Outre le tabac, d’autres facteurs sont liés à des affections respiratoires pouvant toucher certaines catégories de personnes (mineurs, carriers, travailleurs exposés à l’amiante). On pense aussi au radon, présent dans les caves d’anciennes habitations. Selon l’Agence fédérale de contrôle nucléaire (AFCN), l’exposition au radon est d’ailleurs la deuxième cause des cancers du poumon dans notre pays (7%), le risque étant plus important encore chez les fumeurs.
La découverte
L’Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM) a mis en place un programme de rééducation des poumons par le chant, après un Covid long. Les premiers effets du projet «Respire», en partenariat avec l’Opéra de Montréal, sont encourageants. Une expérience similaire est menée à Londres.
Pour savoir si ce gaz radioactif pollue votre habitation, il est possible de réaliser des tests à l’aide d’un détecteur capable d’en mesurer la concentration (à commander sur actionradon.be). La surexposition aux irradiations médicales est encore un autre facteur défavorable. En 2016, lors du lancement de la campagne «Pas de rayons sans raisons», on constatait que la charge de radiations due aux examens médicaux en Belgique était environ 1,5 fois plus élevée qu’en France et jusqu’à trois fois plus grande qu’aux Pays-Bas. Mieux vaut donc s’assurer que chaque examen est bien nécessaire.
Gare aussi aux allergènes qui nous entourent. «Nous pratiquons de plus en plus, en médecine respiratoire, une analyse de toutes les particules dans les milieux intérieurs et extérieurs, précise le Pr Guiot. Les maisons peuvent être chargées d’allergènes. On pense souvent aux animaux de compagnie ou aux acariens, moins aux moisissures rejetées par l’humidité des murs ou aux sources de chaleur comme les poêles à bois ou à pellets. L’hygiène des habitations, qui passe aussi par l’isolation, l’assainissement, la ventilation, va dans le sens d’un poumon en bonne santé.»
Dans l’air mais aussi dans l’assiette
Nos modes de vie nous ont également rendus plus fragiles. «Nous sommes moins exposés qu’avant à certaines choses, ajoute le pneumologue. On a des activités moins rurales, on passe moins de temps à l’extérieur. Il y a probablement aussi un lien avec les changements d’habitudes alimentaires, qui pourraient mener à une modification de notre microbiote intestinal. Or, de manière similaire, le poumon bénéficie également d’un environnement microbien particulier. On sait que l’environnement au sens large, soit les infections, les antibiotiques, les pesticides peuvent changer le microbiote et être à l’origine d’une fragilité comme les allergies et les affections respiratoires chroniques.»
Le poumon est un organe en contact permanent avec le milieu extérieur et il peut également souffrir du dysfonctionnement d’autres organes. Ainsi, une toux, par exemple, peut être liée à une pathologie pulmonaire ou à des phénomènes de rhinite avec coulage postérieur ou du reflux gastro-œsophagien acide.
Le livre pour aller plus loin
Journaliste scientifique pour des publications américaines de renom, James Nestor a publié Respirer. Le pouvoir extraordinaire de la respiration (trad. française en 2021, Solar) , un ouvrage dédié à la respiration, «clé de notre santé et de notre bien-être». Pour nous apprendre à mieux respirer, l’auteur est allé à la rencontre de scientifiques, de grands maîtres du yoga et de sportifs de haut niveau.
Liés à l’hygiène de vie, à l’âge et aux antécédents familiaux, les facteurs de risque des maladies cardiovasculaires sont bien connus. Mais la Belgique ne brille pas sur le plan de la prévention. Comment prendre soin de son cœur ?
A cœur vaillant, rien d’impossible.» La devise de Jacques Cœur, grand argentier du royaume de France au XIVe siècle, renvoyait au courage, qui permet de surmonter toutes les épreuves. Donnons à l’expression un sens organique, pour rappeler que les maladies cardiaques peuvent entraîner une restriction des activités et provoquer douleur, essoufflement, anxiété, syncopes .
Non seulement les pathologies cardiovasculaires troublent la qualité de vie, mais elles sont aussi la cause de mortalité la plus courante dans les pays développés. «En Belgique, elles sont à l’origine de 22 000 hospitalisations et 30 000 décès par an», indique Antoine Bondue, chef du service de cardiologie de l’hôpital Erasme. En 2021 comme en 2020, elles ont été, dans notre pays, la principale cause de décès, devant les tumeurs et les maladies du système respiratoire.
Les femmes aussi
La découverte
Des chercheurs de la KULeuven ont mis au point une intelligence artificielle (IA) capable d’interpréter les scans de la rétine. D’après eux, cette technique permet de prédire les risques de crise cardiaque avec une précision de 70% à 80%. Un dépistage automatique avec cette IA serait ainsi utile pour identifier et orienter les patients à haut risque.
«Les maladies cardiovasculaires sont encore considérées comme des pathologies masculines, alors qu’elles sont la première cause de mortalité féminine en Belgique et dans le monde, avant le cancer du sein, signale Sandrine Daoud, directrice de la Ligue cardiologique belge. En quinze ans, le pourcentage de femmes de moins de 50 ans victimes d’un infarctus a triplé. Les femmes ont aujourd’hui les mêmes comportements à risque que les hommes. Le nombre de jeunes fumeuses a explosé et les femmes sont, plus qu’autrefois, confrontées au stress professionnel.»
Une enquête américaine révèle que les femmes victimes d’un arrêt du cœur sont 27% moins susceptibles que les hommes de bénéficier d’un massage cardiaque. «Car il y a une réticence à toucher la poitrine d’une inconnue, mais également parce que le grand public pense à tort qu’un malaise cardiaque concerne moins les femmes que les hommes», commente Sandrine Daoud.
Tiercé gagnant
Près de 80% des maladies cardiovasculaires sont liées à l’hygiène de vie. Les principaux facteurs de risque, outre l’âge et les antécédents familiaux, sont l’hypertension artérielle, le taux élevé de cholestérol, le diabète de type II, l’obésité, le tabagisme, la consommation excessive d’alcool, la sédentarité, le stress et la dépression. La prévention des maladies cardiovasculaires repose donc sur l’arrêt tabagique, une alimentation équilibrée et la pratique régulière d’une activité physique. Ce qui se résume par le moyen mnémotechnique 0-5-30: 0 cigarettes, 5 portions de fruits et légumes par jour et 30 minutes quotidiennes de marche, vélo, gymnastique…
«J’appelle les enfants à demander à leurs parents fumeurs de cesser de fumer en leur présence, car le tabagisme passif cause aussi des dégâts, alerte Sandrine Daoud. Mes autres conseils préventifs: se déshabituer du sel, qui provoque de l’hypertension, et éviter les sodas, qui abîment les artères.» Diminuer le taux de «mauvais cholestérol» passe par le remplacement des acides gras saturés, surtout présents dans les viandes grasses, les produits laitiers et les aliments préparés (pizzas, quiches, pâtisseries, viennoiseries, biscuits…), par des acides gras insaturés, dont les principales sources sont les noix, les graines (lin, chia, chanvre) et les poissons gras (saumon, sardines, hareng, maquereau…).
Consulter
75
Environ 75 transplantations cardiaques sont pratiquées chaque année en Belgique (une moyenne qui a chuté pendant la crise sanitaire), alors que près de 250 000 Belges sont atteints d’insuffisance cardiaque.
«Les facteurs de risque sont clairement identifiés, reconnaît le Dr Bondue. Pourtant, peu de personnes en Belgique connaissent leur tension artérielle, leur taux de cholestérol et leur niveau de sucre dans le sang. Ceux qui cumulent les facteurs de risque, dont l’hérédité, devraient consulter leur médecin traitant, se faire diagnostiquer et accepter une prise en charge.»
Même des personnes qui présentent des symptômes comme des douleurs thoraciques ou des troubles du rythme cardiaque tardent à consulter, constate le cardiologue. «Souvent, mes patients victimes d’un infarctus ou d’un accident vasculaire considèrent cette attaque comme un coup de tonnerre dans un ciel serein! Les dépistages du cancer se sont généralisés, pas les examens cardiovasculaires, alors que les maladies du cœur sont plus évitables que les tumeurs. Les pouvoirs publics ont une lourde responsabilité: la Belgique est à la traîne sur le plan de la prévention des maladies du cœur.»
Pour aller plus loin
Comment protéger son cœur et ses artères? Prévenir les maladies cardiovasculaires et leurs complications? Prendre en charge leurs facteurs de risque? Prenez votre cœur à cœur (éd. Odile Jacob, 2021) associe les compétences et l’expérience de deux médecins, Jacques Fricker, nutritionniste, et Patrick Assyag, cardiologue.
L’alcool n’est pas le seul ennemi du plus imposant de nos organes. La graisse, les médicaments et certains aliments lui mènent aussi la vie dure.
C’est l’organe le plus volumineux et le plus lourd de notre corps. Pourtant, il ne se plaint jamais lorsqu’il est en souffrance. C’est bien la première chose à savoir sur lui: l’absence de douleur n’est jamais une garantie du bon fonctionnement d’un foie. Les pathologies qui viennent le plus spontanément à l’esprit lorsqu’on évoque la santé de cet organe sont évidemment la cirrhose et ce à quoi elle mène lorsqu’elle dégénère, le cancer. Or, un autre fléau, bien plus répandu encore, touche nos sociétés occidentales: la stéatohépatite non alcoolique, aussi appelée Nash (Non-Alcoholic SteatoHepatitis) mais plus connue encore sous le nom de maladie du foie gras. Liée à la malbouffe, elle affecte déjà 20% à 30% de la population belge et est régulièrement détectée chez les personnes obèses ou celles qui présentent un syndrome métabolique, soit une surcharge pondérale abdominale, de l’hypertension, un taux de cholestérol trop élevé, etc. «Dans la grande majorité des cas, note le Pr Christophe Moreno, hépatologue à l’hôpital Erasme, cette pathologie reste bénigne.
30%
La maladie du foie gras toucherait aujourd’hui jusqu’à un tiers de la population belge. Liée à nos habitudes alimentaires, elle concerne surtout les personnes en surpoids ou qui présentent certains facteurs comme un excès en cholestérol ou une tension trop élevée.
Mais chez une petite partie de ces patients, qui ne présentent pas seulement de la graisse dans le foie mais également une inflammation (hépatite), on peut voir apparaître un phénomène de fibroses, soit des cicatrices susceptibles, si elles sont trop importantes ou trop nombreuses, d’évoluer vers la cirrhose. En général, le cancer ne se développe d’ailleurs que chez les patients qui ont une cirrhose ou une précirrhose.» Sans surprise, l’alcool est la première cause d’une cirrhose grave nécessitant une transplantation.
Des gammas GT au top?
Comment dépister les maladies hépatiques, étant donné qu’elles sont asymptomatiques? Une prise de sang permettant de vérifier certains marqueurs comme le taux de gamma-glutamyl transférase (GGT) est un bon début mais, met en garde Christophe Moreno, un taux normal de gamma GT ne signifie pas forcément que le foie est en parfait état. «Le taux de transaminases peut augmenter parce que vous avez beaucoup bu pendant plusieurs semaines ou plusieurs mois puis redescendre lorsque vous faites plus attention. Vous êtes alors faussement rassuré étant donné que les résultats de votre prise de sang ne vous indiqueront pas si votre foie présente de nombreuses cicatrices ou pas. La meilleure chose à faire, c’est de réaliser un dépistage au moyen d’une élastographie (NDLR: sorte d’échographie permettant d’évaluer l’élasticité du foie, celui-ci se durcissant lorsqu’il est malade) sur les patients présentant des facteurs de risque. L’ examen permettra de détecter ces fameuses fibroses, de voir s’il y a de la graisse dans le foie. Un bilan hépatique sanguin permet également de déceler la présence de lésions.»
Si aucun symptôme ne peut vous mettre la puce à l’oreille, d’autres signaux comme le jaunissement du blanc des yeux, signe d’une accumulation de bilirubine dans le sang, peuvent attirer votre attention.
L’effet protecteur du café
Une molécule prometteuse
Selon une étude randomisée à laquelle a participé l’hôpital universitaire d’Anvers et dont les résultats ont été publiés, en octobre 2021, dans The New England Journal of Medecine, le candidat médicament Lanifibranor s’est révélé prometteur dans le traitement de la maladie de Nash. L’étude clinique native de laquelle sont tirés ces résultats a démontré pour la première fois une combinaison de la résolution de la Nash et d’une amélioration de la fibrose hépatique avec la molécule prometteuse.
Soigner son foie avec des aliments ou des plantes qui le soulageraient – artichaut, radis noir, chardon- Marie –, est-ce une bonne idée? Aucun aliment ne «soigne» un foie malade, prévient encore le gastroentérologue. Le seul moyen de le préserver est d’éviter l’alcool et les aliments riches en sucre et en graisse. Aucun miracle à attendre non plus avec les compléments alimentaires ou les cures détox. Certains aliments, comme le riz rouge à qui on attribue la propriété de faire baisser le cholestérol, sont même potentiellement toxiques pour le foie. «Le seul qui ait montré un bénéfice chez les patients présentant des facteurs de risques, c’est le café. Les personnes qui en consomment au moins trois tasses par jour présentent moins de risques de développer une cirrhose que celles qui n’en boivent pas.»
Autre point d’attention: les médicaments, comme le paracétamol. Sa surconsommation ou sa prise régulière peut provoquer des hépatites aiguës très dommageables. «Tout ce qui est ingéré passe et est métabolisé par le foie. Or, il y a toujours un risque potentiel de toxicité. On sait, par exemple, que la première cause de toxicité médicamenteuse et de retrait d’un médicament du marché, c’est son effet sur le foie». Mollo sur l’alcool comme sur le paracétamol, donc. D’autant que les deux vont parfois de pair…
Pour aller plus loin
Quelles astuces mettre en place pour éviter de développer la maladie du foie gras? Comment notre foie se régénère-t-il et comment l’aider à réaliser cet exploit? S’appuyant sur les dernières découvertes médicales, Gabriel Perlemuter, chef du service d’hépato-gastro-entérologie et nutrition à l’hôpital Antoine-Béclère de Clamart (Paris), dévoilait, en 2018, Les Pouvoirs cachés du foie (Flammarion).
Nos organes en charge de la filtration du sang et de la production d’urine sont incroyablement efficaces mais pas infatigables. Sensibles aux excès, ils peuvent rapidement se dégrader sans que nous nous en rendions compte.
Au même titre que le cerveau ou le cœur, les reins font partie des «organes nobles», ceux dont la fonction est essentielle à la vie autonome et qui sont dépourvus d’une possibilité de se régénérer totalement. Tels des moulins à eau, ils turbinent en permanence pour filtrer quotidiennement 120 litres de sang.
150
Nos reins pèsent en moyenne entre 120 et 150 grammes. Des revues d’urologie ont cependant déjà fait état de reins jusqu’à neuf kilos, généralement chez des patients atteints d’une maladie autosomique dominante du rein polykystique.
Chaque rein contient environ un million de néphrons, ces unités productrices de l’«urine primitive», un liquide contenant de l’eau, du potassium, du sodium, du glucose, des acides aminés ainsi que de l’urée et de l’acide urique. Obtenu au cours de la filtration dite «glomérulaire», ce fluide est ensuite modifié de façon très élaborée et énergivore dans le tubule rénal – l’autre partie du néphron – pour finir en «urine définitive». Ce n’est qu’à travers ce processus que nous pouvons éliminer les déchets produits par notre métabolisme, réguler notre quantité d’eau et de sels minéraux ainsi que notre tension artérielle.
Nos reins ont un point commun avec le foie: ils ne provoquent pas forcément de symptômes ou de douleurs particulières lorsqu’ils sont en mauvaise santé. «La grande majorité des patients atteints d’insuffisance rénale ne se rendent pas compte que leurs reins ne fonctionnent pas correctement. Une douleur peut être perceptible lors d’infections aiguës mais une maladie chronique est généralement indolore. Ce qui rend l’annonce du diagnostic d’autant plus difficile pour les patients, car ils ne s’y attendent pas du tout», exposent le professeur Alain Le Moine, chef du service de néphrologie à l’hôpital Erasme, et sa collègue Camille Kieckens, diététicienne spécialisée en néphrologie, en charge du service de dialyse.
L’indicateur couleur
Se pose dès lors la question de la nécessité de se faire dépister si aucun symptôme ne nous alerte. Les patients souffrant de maladies cardiovasculaires (excès de cholestérol, hypertension, insuffisance cardiaque), qui sont en surpoids ou en obésité, sont plus à risque. C’est aussi le cas des personnes âgées, des diabétiques et prédiabétiques ou de celles qui souffrent d’infections urinaires fréquentes ou ayant des antécédents familiaux de maladies rénales ou des prédispositions génétiques. Pour toutes ces populations, un dépistage annuel par simple prise de sang et analyse d’urine est vivement conseillé.
Ceux qui ne sont pas à risque ne doivent néanmoins pas négliger l’impact des mauvaises habitudes. On ne le répétera jamais assez: nos reins ont besoin d’eau. Au moins un litre et demi par jour. En dessous de ce seuil, le débit de filtration est insuffisant pour assurer une bonne élimination des déchets. Pour savoir si votre organisme est suffisamment hydraté, il suffit de vérifier chaque jour la couleur de vos urines. Elles sont troubles ou foncées? C’est mauvais signe. Encore plus fiables, les bandelettes urinaires (en vente en pharmacie) permettent de détecter la protéinurie, soit une présence anormale de protéines dans l’urine et le sang. Les deux pouvant être le signe d’une maladie rénale.
Les aides à la gonflette
La découverte : moins de rejets
Des chercheurs de la KULeuven ont récemment découvert un mécanisme pouvant jouer un rôle important dans le rejet d’un rein après une transplantation. Basé sur le principe du «missing self», ce mécanisme ne recherche pas ce qui est étranger dans le corps, le traitement immunosuppresseur classique reposant sur l’idée que le système immunitaire s’attaque aux cellules étrangères à l’organisme, mais bien l’absence du type de tissu «propre». Au cours de ce processus, les cellules tueuses naturelles recherchent donc des protéines propres au nouvel organe. Des résultats encourageants alors que 15 à 20% des personnes transplantées présentent des symptômes de rejet.
Protéger ses reins, c’est aussi prendre ses distances avec ses ennemis jurés. Dans le viseur: le sel, que le Belge consomme en moyenne deux fois plus que la quantité recommandée. L’idéal à atteindre: se passer complètement de la salière à la cuisson et à table et réduire au minimum sa consommation de plats préparés et de produits transformés. Mais aussi les protéines, surtout d’origine animale. On recommande de consommer quotidiennement de 100 à 125 grammes de viande au repas principal mais aussi de varier les sources de protéines: poisson, volaille, œufs, légumineuses, produits laitiers. Le tableau noir est complété par les petites «crasses» habituelles dont on a du mal à se passer: les aliments trop gras, trop sucrés, les sodas, les jus de fruits, les boissons énergisantes…
Il y a donc les ennemis jurés, ceux qui nous tentent à l’ouverture du frigo, mais aussi les ennemis cachés, ceux dont on se méfie moins. C’est le cas des anti-inflammatoires non stéroïdiens et des préparations consommées dans le cadre de régimes hyperprotéinés: les protéines en poudre, les produits enrichis en protéines (boissons lactées, barres de céréales, biscuits, etc.), les shakes. «Ces produits sont très populaires auprès des jeunes qui souhaitent perdre du poids et prendre de la masse musculaire, déplore Camille Kieckens. Le danger, c’est qu’ils sont en vente libre et qu’ils ne sont pas contrôlés en quantité, voire même en qualité lorsqu’ils sont vendus sur Internet, et pas forcément associés à la pratique d’une activité physique. Cela se traduira par un excès de protéines qui se transformeront en déchets que vos reins se fatigueront à éliminer.»
Pour aller plus loin
Il s’appelle Valentin et il vous dit tout ce qu’il fait pour votre corps, les secrets de son fonctionnement et comment le garder en bonne santé. Après un premier ouvrage, Choisissez votre destin génétique (Fayard, 2018), Gilbert Deray, professeur de médecine et chef du service de néphrologie à la Pitié-Salpêtrière, a publié en 2019 Les Pouvoirs extraordinaires du rein, chez le même éditeur.
Un déséquilibre de la flore intestinale affaiblit l’immunité, perturbe l’humeur et le sommeil. Quelles habitudes modifier pour optimiser ce microbiote protecteur de notre santé?
L’intestin, quelle horreur! Il aura fallu du temps pour que cet organe sous-estimé, considéré comme un tuyau péteur ou un canal vers les égouts, gagne ses lettres de noblesse. C’est chose faite. On en veut pour preuve la popularité croissante de l’expression «l’intestin, notre deuxième cerveau». Le premier à qualifier ainsi (en 1999) l’organe qui contribue à la digestion des aliments et au passage des nutriments vers le sang et le reste de l’organisme est Michael Gershon, neuro-gastro-entérologue à l’université Columbia (New York). En médecine traditionnelle chinoise, le ventre a toujours été considéré comme le deuxième cerveau.
100 000 milliards
Organe de sept à huit mètres de long, l’intestin héberge plus de 100 000 milliards de bactéries, localisées surtout dans le côlon et, dans une moindre mesure, dans l’intestin grêle.
Comparer l’intestin au cerveau a du sens: près de deux cents millions de neurones tapissent un tube digestif, ce qui en fait un véritable système nerveux autonome. Il est en interaction permanente avec le cerveau, qu’il informe par le biais de secrétions hormonales et de neurotransmetteurs, telles la dopamine et la sérotonine, indispensables à notre santé psychique. L’intestin est l’organe où l’énergie émotionnelle peut stagner, d’où les expressions «la peur au ventre», «prendre aux tripes» ou «digérer la nouvelle». Près de 80% de notre système immunitaire est situé au niveau du tube digestif. La paroi intestinale joue un rôle de barrière protectrice. Couverte de villosités, elle se renouvelle toutes les 36 heures.
Intestins: allergies et intolérances
Les bactéries de l’intestin, associées à des virus, levures et champignons, forment la «flore intestinale», désormais rebaptisée «microbiote intestinal» par les scientifiques. «Ce monde pèse deux à trois kilos, indique Anne Ausloos, médecin nutritionniste, à Bruxelles. Il joue un rôle clé dans notre métabolisme, cerveau compris. Mais il est fragile. Un déséquilibre du microbiote perturbe l’humeur, le sommeil…» Le microbiote attire de plus en plus l’attention en raison de la multiplication des allergies et intolérances, notamment chez les enfants. Plus largement, les crampes au ventre, ballonnements, borborygmes, diarrhées ou constipations touchent plus d’une personne sur cinq. «Ces soucis intestinaux sont liés à la dégradation de la qualité de notre alimentation depuis plus d’un quart de siècle, assure la médecin-nutritionniste. En cause, la nourriture industrielle ultratransformée, les pesticides, ou encore les perturbateurs endocriniens, qui augmentent la perméabilité intestinale. La prise d’antibiotiques est aussi dommageable à la flore intestinale et aux défenses immunitaires.»
Nathalie Delzenne, professeure de métabolisme et nutrition à l’UCLouvain, reconnaît que «de plus en plus de patients parlent de leur inconfort intestinal. Mais le public a tendance à confondre deux états distincts: la maladie intestinale inflammatoire, qui fait l’objet d’un diagnostic précis, comme la colite ulcéreuse ou la maladie de Crohn, et le syndrome de l’intestin irritable, plus difficile à traiter.»
Bien mâcher… sans télé
La découverte
L’équipe de Patrice Cani, professeur à l’UCLouvain, est parvenue à prouver que la bactérie intestinale Akkermansia municiphila réduit les maux liés à l’obésité et au diabète de type 2. Un complément alimentaire à base de cette bactérie pasteurisée vient d’être mis sur le marché.
Les cinq règles d’or du bien-être des intestins, selon les nutritionnistes consultés: primo, bien mastiquer la nourriture, ce qui procurera plus rapidement le sentiment de satiété et facilitera la digestion. Secundo, ne pas prendre son repas devant un écran de PC, la télévision, ou en manipulant son smartphone, activités qui empêchent le cerveau de se mettre en pause et qui réduisent de 30% la libération d’enzymes digestives. Par conséquent, la nourriture mal digérée arrive dans le gros intestin, de mauvaises bactéries prolifèrent et fermentent, ce qui produit des gaz et ballonnements. Tertio, ne pas manger stressé. En cas de tension, faites le tour du quartier avant de passer à table. Il convient aussi de réduire sa consommation de viande rouge, de charcuterie, de sel et d’alcool et de privilégier les végétaux, afin de limiter les risques de polypes intestinaux et de cancer du côlon. Les végétaux fournissent la cellulose qui nourrit la croissance de bactéries bénéfiques à notre santé. Pour favoriser la prolifération de bonnes bactéries dans l’intestin, il est indiqué de laisser refroidir, avant de les réchauffer, riz, pâtes, pommes de terre et autres féculents. L’amidon est ainsi transformé, d’où une digestion plus lente, donc moins de ballonnements liés à la fermentation.
Pour aller plus loin
Quelles solutions face au syndrome de l’intestin irritable (SII)? Comment s’y retrouver entre probiotiques, hypnose et régimes alimentaires sans lactose, pauvres en gluten ou en fodmaps (aliments fermentescibles). Jean-Marc Sabaté, gastro-entérologue et hépatologue, éclaire ces questions dans son livre Intestin irritable: équilibrez votre microbiote et faites la paix avec votre côlon (Larousse, 2020).
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