kéfir
kéfir © Getty Images

Bonne humeur, digestion, immunité: les bienfaits du kéfir, cette mystérieuse boisson fermentée

Face à une demande croissante de boissons saines et sans alcool, le kéfir est à la mode. Fermentée, pauvre en sucre et à l’origine inconnue, elle présente plusieurs atouts santé.

Bientôt la nouvelle star de l’apéro? Dans les rayons des magasins bio et de certains supermarchés, de petites bouteilles estampillées «kéfir» font leur apparition aux côtés de celles de kombucha.

Le marché mondial du kéfir valait 1,45 milliard de dollars en 2022 et devrait presque doubler d’ici à 2030 pour atteindre les 2,31 milliards de dollars, selon les prévisions du  bureau d’analyse financière Data Bridge Market Research. Ces boissons naturelles fermentées, alternatives saines à l’alcool, sont à la mode. Surtout en période de Tournée minérale. Mais sont-elles réellement bonnes pour la santé?

Le kéfir, une boisson maison

Le kéfir est une boisson légèrement gazeuse obtenue suite à la fermentation de grains de kéfir. Simple comme bonjour, il est tout à fait possible d’en faire soi-même. Il en existe deux types: le kéfir de lait ou le kéfir de fruit (ou d’eau).

Les grains sont fermentés dans du lait animal pour le premier et dans de l’eau pour le second, auxquels on rajoute du sucre, des fruits secs (généralement de la figue) et des agrumes (principalement du citron). La fermentation se réalise au bout de 24 à 36 heures. Il est ensuite possible d’aromatiser son kéfir d’eau avec des fruits, lors d’une seconde étape.

Les grains ressemblent à des petites billes molles à l’aspect translucide pour le kéfir de fruit et à l’aspect blanc pour le kéfir de lait, constitués de polysaccharides (polymères de la famille des glucides). «C’est un mélange de levures et de bactéries, explique Mary Otero, co-fondatrice de Kéfir Eau Vertueuse, brasserie belge de kéfir de fruit bio. Les grains de kéfir de lait et de fruit sont différents, un peu comme des cousins. Il y a une mutation génétique de l’un à l’autre».

Des grains de kéfir de lait © Getty Images

Kéfir: mystérieuse origine

Le kéfir fonctionne exactement comme un levain de pain. Lors de la fermentation les grains se reproduisent, il est ainsi possible d’en produire à l’infini. «La tradition veut qu’ils se donnent», affirme la productrice. Ils se trouvent aussi en magasins bio. Kéfir Eau vertueuse étant labélisé bio, les premiers grains de la culture de Mary Otero et de son mari ont été achetés.

Le kéfir est un produit mystérieux. Il existe des manuscrits scientifiques mentionnant l’existence de ces grains vieux de plus de 100 ans, selon le Museum d’Histoire naturelle français, mais impossible de savoir avec certitude comment et quand ils sont apparus. «Certains racontent qu’ils viendraient du Mexique, issus des plantes de cactus. Une histoire alternative affirme qu’ils viennent du Caucase: les grains se seraient formés lors du transport de lait par bateaux», narre Mary Otero.

Souvent présenté comme une alternative aux boissons alcoolisées, le kéfir contient néanmoins un peu d’éthanol, comme tous produits fermentés. Généralement, entre 0,5 et 1% d’alcool. «Il y a des traces d’alcool, tout comme dans une banane un peu mûre, qui fermente et fait de l’alcool», relativise la productrice de kéfir.  

Mais ce qui séduit aussi les consommateurs, ce sont les vertus santé du kéfir. «Dans une optique de bien-être, les gens recherchent de plus en plus des boissons sans alcool et surtout fonctionnelles, qui ont un intérêt réel pour la santé, alors que la demande pour des boissons sans alcool augmente», estime Mary Otero.

Fabrication de kéfir de fruit ©PHOTOPQR/VOIX DU NORD – © BELGAIME

Kéfir: riche en probiotiques

Le résultat final est pauvre en sucre et peu calorique. Si l’élément est nécessaire à la fermentation dans le kéfir de fruit, le sucre est surtout là pour nourrir les grains. Certaines marques ont développé une recette qui élimine toute trace de sucre.

«Le kéfir est intéressant car riche en probiotiques», ces micro-organismes vivants porteurs de bonnes bactéries pour l’équilibre de la flore intestinale, assure Félicité Spies, nutrithérapeute en province luxembourgeoise. «Avoir une bonne flore intestinale est important pour une bonne immunité, car 70% de nos cellules immunitaires se trouvent dans l’intestin», rappelle la spécialiste. Prendre soin de sa flore intestinale est d’autant plus bénéfique pour les personnes diabétiques, qui ont une flore appauvrie. Ce déséquilibre entre bonnes et mauvaises bactéries diminue la quantité de propionate, un acide qui aide à la vidange gastrique. Or, avec une vidange gastrique ralentie, le glucose passe plus vite dans le sang. Les probiotiques présents dans le kéfir favoriseraient ainsi une meilleure régulation de la glycémie.

Les probiotiques participent à une meilleure digestion, limitant les risques de constipation et de ballonnement. «Manger équilibré est important, mais si on n’arrive pas à digérer les aliments consommés, les nutriments ne pourront pas être bien absorbés», souligne la nutrithérapeute.

Le kéfir est aussi un atout pour être de bonne humeur. «Une bonne flore intestinale signifie une meilleure santé mentale», explique Félicité Spies. «Lorsqu’elle est déséquilibrée, de mauvaises bactéries dégradent les acides aminés (les petites briquettes des protéines) comme le tryptophane, précurseur de la sérotonine, l’hormone du bien être, ou la tyrosine, précurseure de la dopamine, le neurotransmetteur de la motivation et du plaisir».

En France, toutefois, l’association de consommateurs UFC que choisir dénonce l’arnaque du kéfir de lait. De nombreuses boissons vendues outre-Quiévrain portant l’étiquette kéfir n’en ont en fait pas la moindre trace, et contiennent seulement des bactéries lactiques. C’est notamment le cas des marques Beautiful Immunity, Naturalia, Carrefour Sensation. «Il vaut mieux faire son kéfir maison, comme ça on est sûr de ce qu’il y a dedans. Mais il faut voir les marques au cas par cas pour ne pas tomber dans une généralité», répond Félicité Spies.

Le kéfir n’est pas non plus miraculeux

Félicité Spies

Nutrithérapeute

Le kéfir est recommandable, mais «pas non plus miraculeux». Il vaut tout autre aliment fermenté. «Ce n’est pas un kéfir par jour, en forme toujours. Pour être en bonne santé intestinale, il faut aussi faire attention à la gestion du stress, et à son environnement. Il n’y a rien de magique en alimentation», pointe la spécialiste.

Bien préparé, il ne peut en tout cas pas faire de mal. Il est possible d’en boire tous les jours, ce qui est conseillé pour en ressentir pleinement les effets. Hormis pour les personnes qui n’ont pas l’habitude de consommer des produits fermentés, qui devraient peut-être introduire le kéfir petit à petit, conseille Mary Otero. De même que les personnes intolérantes au lactose devraient se méfier du kéfir de lait, et les personnes souffrant «d’intestins irritables ou une maladie des intestions doivent d’abord remettre leur flore en ordre avant d’en consommer et consulter l’avis d’un médecin», suggère Félicité Spies. Il est bien sûr déconseillé aux femmes enceinte et aux enfants, puisqu’il contient une quantité minime d’alcool.

Polémique en France

Le kéfir de fruit est-il du kéfir? La controverse est lancée en France. La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) enjoint les producteurs de kéfir de fruit à ne plus porter cette appellation. La raison? Un produit non laitier ne pourrait être qualifié de kéfir, en vertu de la norme internationale codex Alimentarius, qui place le kéfir parmi les laits fermentés.

Selon les défenseurs du kéfir de fruit, réunis dans une tribune, cette injonction n’a pas lieu d’être car «le kéfir à base d’eau et de fruits est tout aussi légitime à s’appeler « kéfir » que son cousin laitier; les deux coexistent et partagent la même caractéristique physique d’un ferment qui fabrique des grains, la différence résidant dans la composition microbiologique de ces grains — cependant tous deux riches en levures et bactéries lactiques, dont certaines communes d’ailleurs». Les signataires dénoncent l’action des lobbys du lait. Ce sont les grands groupes qui se sont surtout emparés de la commercialisation du kéfir de lait, à l’instar de Danone avec son Activia au kéfir.

Le marché du kéfir de fruit est davantage porté par les producteurs indépendants, en France, comme en Belgique. «Pour le moment la Belgique passe entre les mailles du filet avec cette réglementation, commente Mary Otero. La demande est exagérée, c’est le même ferment qui est utilisé, on devrait pouvoir faire la différence entre les deux kéfirs. C’est sûr qu’il y a un intérêt économique derrière».

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