Introduire tôt œufs, lait, céréales ou arachides dans l’alimentation permettrait de mieux protéger les enfants. © GETTY IMAGES

Allergies: retarder l’introduction d’aliments allergènes ne protège pas les nourissons

Ludivine Ponciau
Ludivine Ponciau Journaliste au Vif

On a longtemps préconisé de retarder l’introduction d’aliments allergènes dans les menus des nourissons. Les récentes études tendent à démontrer que c’est plutôt en donnant de tout aux enfants dès les premiers mois que le risque de développer des allergies diminue.

La plupart des allergies se déclarent avant l’âge de 4 ans, le plus souvent aux alentours de 2 ans. Selon l’ONE, elles touchent 6% à 8% des enfants de cette catégorie d’âge. Des allergies dont la sévérité a augmenté ces vingt dernières années. Les aliments susceptibles de provoquer une réaction allergique peuvent varier en fonction de l’âge et des habitudes alimentaires. En Belgique, les moins bien tolérés sont le lait de vache, l’œuf, l’arachide, le poisson, le froment, le soja, la noix, les noisettes et la moutarde. Les réactions concernent un seul aliment chez 59% des enfants, deux aliments chez 20% et trois aliments chez seulement 2 à 5% d’entre eux, précise encore l’organisme.

Il est important de rappeler que rien ne protège ou ne provoque à 100%.

Les allergies surviennent chez des personnes génétiquement prédisposées. Néanmoins, il est possible de favoriser la tolérance des tout-petits à certains aliments en les intégrant de façon très précoce dans leur alimentation. Jusqu’il y a peu, les recommandations allaient dans le sens d’une restriction: on estimait qu’en retardant l’introduction de certains aliments, on augmentait les chances d’éviter les allergies alimentaires chez le nourrisson. Aujourd’hui encore, ces interdits font partie des croyances persistantes à propos de la santé et du bien-être des nourrissons. Raison pour laquelle il est important de déconstruire ces discours et d’éclairer les parents à la lumière des dernières études, estime la Pr Françoise Smets, gastro-pédiatre aux Cliniques universitaires Saint-Luc, à Bruxelles.

En pâte ou en poudre

«Il a été prouvé que dans les régions où on a constaté de nombreux cas d’allergie aux arachides, leur introduction avait été postposée dans l’alimentation. C’est le cas au Royaume-Uni où il était recommandé d’éviter d’en donner aux enfants de moins de 5 ans. Tandis qu’en Israël, où l’on comptait moins d’allergiques, l’arachide était régulièrement consommée dès le plus jeune âge. Introduire tôt l’arachide dans l’alimentation permet de mieux protéger les enfants. Cela vaut également pour d’autres aliments comme le lait, les œufs ou les différents types de céréales. D’autres études ont démontré que l’introduction tardive des aliments allergènes ne produisait pas de bons résultats.» Des scientifiques du King’s College de Londres ont travaillé sur l’arachide ; ils ont récemment révélé qu’il existe une opportunité cruciale pendant le sevrage des nourrissons de réduire les cas d’allergie de 77%. Pour cela, ils recommandent d’administrer de très petites quantités de beurre de cacahuète aux bébés âgés de 4 à 6 mois.

Cette fenêtre de 4 à 6 mois, et même 9 mois, serait en effet la plus propice pour obtenir les meilleurs résultats. Il n’existe par contre pas encore de recommandation unanime sur la dose idéale à ingérer pour espérer échapper aux gonflements et aux démangeaisons. «Espérer» et non «être assuré», met en garde Françoise Smets. «Quand on évoque les allergies, il est important de rappeler que rien ne protège ou ne provoque à 100%. Plusieurs facteurs entrent en ligne de compte: les prédispositions génétiques, le microbiote, les antibiotiques ou encore l’exposition à la pollution.» La méthode serait donc efficace mais pas infaillible.

Dans Le Vif du 25 mai, retrouvez la suite de notre série consacrée aux allergies: «Le business du testing».

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