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Pourquoi tant d’humiliation? Comment la totémisation scout a copié les baptêmes étudiants

Thierry Fiorilli
Thierry Fiorilli Journaliste

La totémisation, aux camps scouts. Le baptême, sur les campus universitaires. Deux traditions où l’humiliation semble indispensable à l’intégration et au dépassement de soi. Mais les pratiques évoluent.

Bram De Man défendait, en mai dernier, l’un des 18 membres du cercle Reuzegom (droit, ingénieur et ingénieur commercial) de la KU Leuven comparaissant devant la cour d’appel d’Anvers pour la mort, en décembre 2018, de Sanda Dia, 20 ans, lors de son baptême. Les prévenus ont écopé de deux cents à trois cents heures de travaux d’intérêt général pour coups et blessures ayant entraîné la mort sans intention de la donner et traitement dégradant. Sanda Dia avait dû boire des litres d’alcool et d’huile de poisson, rester immergé dans un puits d’eau glacée, se faire réchauffer par l’urine des comitards (les membres du comité de baptême), etc. Pour l’homicide involontaire, Bram De Man avait plaidé non coupable. Pour le traitement dégradant, il avait recouru à la tradition du baptême: «Je ne dis pas que ces actes sont acceptables, mais nous devons nous demander si les victimes les ont perçus comme une atteinte à leur dignité humaine. Je ne pense pas que ce soit le cas. Ils faisaient partie de la culture du cercle, connue de tous les candidats.»

Argument récurrent dans un débat qui l’est tout autant. En substance: «On n’oblige personne et tout le monde sait à quoi s’en tenir.» Pas faux, mais beaucoup rappellent qu’il existe des facultés où «pas de baptême» signifie pas d’aide du cercle jusqu’à la fin du parcours. Et puis, comme la Cour l’a rétorqué à Me De Man, «le fait de consentir à ces actes n’enlève rien à leur caractère absolument humiliant». Chaque baptême ne tourne pas au drame, mais l’adoubement passe souvent par l’acceptation de l’avilissement de soi: «gueule en terre» face à l’autorité – les comitards et déjà baptisés –, cheveux tondus, danser nu, immondices à lécher…

Si on parle du baptême comme d’un rite de passage, ça va en faire rigoler certains et faire fuir les autres.

Début de cet été, c’est le trimestriel Médor qui a rappelé, témoignages à l’appui, que dans des unités scoutes aussi, l’autorité les chefs et déjà totémisés – considère que la brimade est un passage obligé vers l’intégration au groupe.

La tradition du secret

Baptêmes et totémisations sont entourés de secrets. «C’est ce qui rend la chose excitante», avance Maxime Lemarchand, de l’Association générale des étudiants liégeois. «C’est ce qui garantit l’effet de surprise, embraie Xavier Wielemans, ex-chef d’unité à Braine-l’Alleud. Mais certains enfants refusent de passer aux scouts ou éclaireurs par peur de la totémisation, et une partie de cette peur est due au secret qui entoure la “tot”. C’est un autre débat à ouvrir: ce secret a-t-il plus d’avantages ou plus d’inconvénients?» Christelle Alexandre, présidente de la fédération Les Scouts, et Coralie Beyens, formatrice pour les animateurs Eclaireurs tiennent déjà des éléments de réponse. «La dimension du secret, pourquoi pas, tant qu’elle a du sens. Tant que le secret porte sur le moment, sur la surprise et les activités prévues. Tant que leurs organisateurs le cultivent pour que la cérémonie soit encore plus marquante, au sens positif du terme. Mais pas si c’est parce qu’ils n’osent pas expliquer à des parents ce qu’ils ont fait subir.»

Logique, selon Pauline Van Rymenant, animatrice des Eclaireurs de Gembloux-Sud: «On devient chef souvent au moment où on entre à l’université, donc les baptêmes inspirent les totémisations qui n’ont pourtant, historiquement, rien du bizutage.» Correct, enchaîne Bruno Humbeeck, psychopédagogue à l’UMons: «Ces rituels sont censés avoir une fonction structurante, prouver qu’on est capable de passer à autre chose, donc à une autre identité, et être profitables tant à l’individu qu’au système dans lequel il fonctionne. Mais ils sont devenus des épreuves qui manifestent le pouvoir de qui détient l’autorité. Dans un cadre présenté comme ludique mais où l’humiliation imposée montre bien qu’on n’est pas dans un schéma d’adoubement identitaire. Ce qui était un rite de passage a été réapproprié pour en faire un rituel d’installation du pouvoir. De contrainte à des conduites de soumission.» Et souvent dirigé par des «jeunes intellectuels de haut niveau dont la volonté est de faire de grandes carrières», relevait, à Anvers, Sven Mary, l’avocat de la famille Dia.

Mais, par endroits, les choses évoluent. Covid et combats antiharcèlement n’y sont pas étrangers.

Le reflet de la société

Pierre Laurent vient de terminer son master complémentaire en Sciences de gestion après avoir décroché, l’an dernier, son diplôme d’ingénieur civil à l’UCLouvain. Il quitte ainsi son mandat de président du Groupement des cercles louvanistes (GCL), lien entre l’université et les douze cercles étudiants de Louvain-la-Neuve et Woluwe. Et il est cash: «Si on parle du baptême comme d’un rite de passage, ça va en faire rigoler certains et faire fuir les autres. Le but du baptême, c’est l’intégration des nouveaux étudiants dans la vie citoyenne des deux sites et dans leur faculté, de leur faire rencontrer des personnes passées par les mêmes cours, etc.»

© les scouts

Maxime Lemarchand a bouclé, en juin, ses cinq années en ingénieur civil, lui aussi. Il termine sa présidence de l’Association générale des étudiants liégeois (Agel), qui englobe 26 comités de baptême, soit tous ceux de l’ULiège, sauf Gembloux, «parce qu’ils sont un peu loin», et les vétérinaires «parce qu’ils font des baptêmes tellement différents des nôtres». Pour lui, le baptême «est un jeu de rôles faisant partie du folklore et dont l’objectif principal est de rencontrer des gens. Quand on arrive à l’université, on découvre un monde nouveau, un énorme système, où on se sent perdu, beaucoup moins accompagné qu’en secondaire. Le baptême est le meilleur moyen de se faire des amis, très vite, parce qu’on se retrouve directement, dans des activités qui ne sont pas du tout scolaires, avec des gens avec lesquels on a les mêmes cours.»

Xavier Wielemans, ingénieur civil (décidément!) depuis bien plus longtemps – il a 47 ans –, a lâché son mandat de chef d’unité, celle du Smilodon, à Braine-l’Alleud, en septembre 2022. Pour lui aussi, cataloguer le baptême de rite de passage se discute, à l’inverse de la totémisation scoute: «Dans les deux cas, un groupe accueille les nouveaux arrivants, de manière formelle et solennelle, c’est vrai. Mais dans la «tot», il y a une envie de faire grandir le scout ; je ne pense pas qu’il y ait l’envie de faire grandir le bleu dans le baptême

Le débat a son importance, comme la différence d’âge auxquels se déroulent les deux événements – 12 ans pour l’un, 18 ans et plus pour l’autre – et le fait que le baptême relève du choix, dans la plupart des cas, pour une activité parallèle aux études, alors que la totémisation est l’une des étapes jalonnant le parcours scout. Mais tous les deux relèvent de la tradition, suscitent la controverse et sont reliés comme le résume Xavier Wielemans: «Celles et ceux qui rejoignent le staff d’animation sont souvent en âge d’être en première ou deuxième année d’unif, donc souvent inspirés par ce qu’il s’y passe, dont les activités de baptême, les bonnes, qui peuvent être recyclées en idées de totémisation, comme les moins bonnes.»

On n’a pas attendu tous les #balanceton pour traiter ces questions.

Christelle Alexandre, présidente de la plus importante fédération de scoutisme en Belgique francophone, Les Scouts (65 000 jeunes), situe ce glissement aux «années 1970 ; les animateurs catapultent alors dans le scoutisme ce qu’ils vivent dans les universités lors de moments d’accueil. Et ça se rapproche du bizutage.» Or, ce qui se déroule durant trois à quatre heures au baptême est «difficile, admet Maxime Lemarchand. Physiquement, parce que c’est sportif, et psychologiquement, parce qu’on s’y fait soumettre par une autorité qui en abuse, un peu comme un roi qui se croit tout permis

Mais pourquoi rabaisser l’autre pour qu’il «se dépasse»? «Parce que c’est à l’image de la société, déplore Christelle Alexandre. Ce mécanisme du «il va falloir prouver que tu as ta place parmi nous», on le retrouve dans des écoles, dans des boîtes, dans des théâtres… C’est la triste manière dont l’humain traite l’humain.» Parce que «les difficultés, dans la vie, en général, c’est ce qui fait apprendre, réplique Maxime Lemarchand. Quand on s’est retrouvé dans des moments, on va dire humiliants, on se rend compte qu’on y a survécu, et on apprend. De soi et des autres. C’est utile pour la vie personnelle ou professionnelle.» Et «parce qu’on a toujours fait comme ça», assènent beaucoup d’autres. Qui sont de moins en moins nombreux, puisque balises et réflexions se multiplient.

Les chefs scouts auraient « importé » les pratiques des baptêmes universitaires dans la totémisation. © getty images

Baptême, totémisation: comment la tradition évolue

En Fédération Wallonie-Bruxelles, une charte d’encadrement des baptêmes existe depuis 2020. Elaborée par des étudiants et les autorités académiques, elle a été renforcée l’an dernier pour «conscientiser toutes les parties prenantes à leurs responsabilités, droits et devoirs», chaque cercle s’engageant à la respecter. Elle s’ajoute aux règlements, protocoles et chartes en vigueur dans chaque université, rédigés par les rectorats en concertation avec les cercles et actualisés chaque année. Pierre Laurent rappelle ainsi que «la consommation d’alcool est désormais interdite lors des activités. Par exemple, le roi des Bleus, soit le concours d’à-fonds, se fait entièrement à la bière 0%. Et depuis trois ans, chaque cercle suit une formation et organise une activité, annuelle, sur le consentement.»

Maxime Lemarchand estime même que «la guindaille évolue en avance sur son temps: on n’a pas attendu tous les #balanceton pour traiter ces questions. Chez nous, ça fait dix ans que toute personne impliquée dans une histoire d’agression sexuelle est bannie. Et tous les bleus ont des parrains baptisés, qui les accompagnent pendant les épreuves, comme soutiens psychologiques, et signent une charte qui vise à empêcher toute dérive. A se rapprocher le plus possible du risque zéro.»

Le but, c’est qu’ils soient fiers de ce qu’ils ont accompli durant leur “tot” et osent nous dire “non”.

Aux scouts, où le taux maximal d’alcool autorisé est de 0,5 gramme par litre de sang et les abus sanctionnés par l’exclusion, dès lors que la fédération en est informée, un arsenal a également fleuri: «Depuis de nombreuses années, la fédération développe des outils et des formations pour aider les troupes à réfléchir au sens de leur totémisation, souligne Coralie Beyens, responsable de la pédagogie et formatrice pour les animateurs Eclaireurs (les 12-16 ans) depuis 2019. Pour en faire un événement qui souligne les caractéristiques positives d’un adolescent, à une période de la vie où l’estime de soi n’est pas toujours forcément au top. Pour valoriser, et certainement pas humilier. Pour faire grandir le jeune, et pas qu’il se sente mis en difficulté. On rencontre aussi le staff, les autres animateurs de l’unité et l’équipe d’unité et on réfléchit, ensemble, à la vision qu’on veut de la totémisation et aux différentes étapes pour y parvenir. En incluant les scouts, parce que si on veut un vrai changement, il faut qu’ils amènent leur pierre à l’édifice et aient envie, après, de le perpétuer. L’idée, c’est que chaque unité propose quelque chose qui lui convienne. Nous, on fixe le cadre, parce que c’est souvent au début, quand elle prend conscience qu’il faut revoir les pratiques de la totémisation, que l’unité est bloquée.»

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Aujourd’hui, le roi des Bleus, soit le concours d’à-fonds, se fait entièrement à la bière 0%.

Covid et balancetonporc, deux accélérateurs de changement pour la totémisation

Colin Glibert, animateur Eclaireurs de l’unité Saint-Adrien, à Ixelles, et dont le totem est Paca, un rongeur d’Amérique, raconte que, là-bas, le déclic s’est produit en 2013, après un camp «où la “tot” avait été très dure. Depuis, la réflexion est menée par les staffs successifs pour que la totémisation s’inscrive dans les valeurs du scoutisme. Les formations de la fédé nous y ont aidés.» Même processus depuis 2019 au sein de l’unité de Xavier Wielemans, alias Loriot, à Braine-l’Alleud: «On a proposé à tous les animateurs de partager leur expérience de “tot”, avec les bons et les mauvais souvenirs. Ça a permis de dériver sur le sens qu’on veut qu’elle ait, ce qu’on veut faire vivre aux scouts, leur apporter et leur révéler. Il y a eu une discussion très libre et très constructive, durant six mois. Depuis, le totem, chez nous, révèle une qualité, un trait de personnalité positif qui fait du jeune une personne unique et qui apporte quelque chose au groupe qui l’accueille.»

« La totémisation ne doit pas être un bizutage, mais quelque chose de bienveillant. » © les scouts

Pauline Van Rymenant, animatrice Eclaireurs de Gembloux-Sud sous le totem Caouane, une tortue marine, précise que c’est à la création de l’unité, par des parents, en 2015, que «la réflexion a été lancée, pour que la “tot” ne soit pas un bizutage mais quelque chose de bienveillant, avec des valeurs». L’année dernière, «on a créé un comité de totémisation où participent les jeunes, pour garantir du sens à ce moment important du parcours scout, l’apogée de l’année d’arrivée dans la troupe. On met donc en place des activités où ils sentiront qu’on les intègre, qu’ils ont leur place, qu’on a appris à les connaître. Avec des moments d’entraide, d’autres d’introspection, d’autres où tout le monde est dans une sorte d’imaginaire, comme autour de légendes indiennes. Et on attribue un totem qui donne davantage de confiance, plus lié à la personnalité.» Mot d’ordre: «Pas question que la troupe se sente supérieure, qu’il y ait des brimades. Ces jeunes ont 12 ans: il n’y a aucune raison de leur infliger des épreuves dégradantes, de leur faire “mériter” leur totem. Ils n’ont rien à nous prouver. Le but, c’est qu’ils soient fiers de ce qu’ils ont accompli et osent nous dire “non”, comprennent qu’ils en ont le droit. Il y a des totémisations où le dépassement est de tout accepter, sans poser de question. Or, le but des scouts, c’est de réfléchir à ce qu’on fait.»

Ça bouge, «mais c’est un travail permanent, insiste Pauline. Le poids de la tradition est terrible, même dans une jeune unité.» Christelle Alexandre le sait: «En 2000 déjà, le président de la fédération appelait à arrêter définitivement les totémisations humiliantes. Les unités ont évolué, petit à petit et pas toutes, mais le Covid, qui a fait adopter aux parents une tout autre attitude par rapport au bien-être de leurs enfants, et balancetonporc, en 2017, qui a permis de se sentir légitime de dénoncer les abus, ont mis beaucoup d’animateurs au pied du mur. C’est très clair: il y a un avant et un après balancetonporc et Covid.»

Les outils scouts en matière de totémisation

La fédération Les Scouts met à disposition de ses unités Totem et Quali, un cahier qui «explique l’origine du totem et sa signification aujourd’hui, aborde son utilisation comme outil d’intégration et donne des conseils sur l’organisation de la cérémonie de totémisation». L’application Totems, en fonction de traits de caractères du jeune, suggère les animaux y correspondant, parmi une liste de plus de huit cents noms. Disponible encore, un coffret d’autant de fiches «plastifiées, numérotées et classées par genre (oiseaux, félins…), avec le nom de l’animal, sa photo, une série d’adjectifs qui le dépeignent», etc. La fédé a aussi envoyé à toutes ses sections, l’été dernier, Cartes sur table, un jeu pour les camps qui rassemble «un ensemble de situations touchant la sécurité affective ou physique, des pratiques de tradition, une attitude, etc. Les animateurs déposent une carte sur la table et en discutent en staff.» Au printemps, c’était la campagne «Scout Place, Safe Place»: «On a invité les animateurs à mettre six choses en place sur les camps, pour assurer que l’endroit soit physiquement et psychologiquement safe: écrire une charte du vivre ensemble, créer un espace oasis où l’enfant ou l’ado peut se poser, soigner la relation avec les parents (être clair quant à ce qui se passe sur le camp), proposer une animation de réflexion autour de valeurs, jouer à Cartes sur table et épingler l’affiche Je suis victime ou témoin d’une violence?» A défaut d’un #balancetatot, «parce que le temps nous a manqué», une cinquième possibilité de signaler un abus vient d’être mise en ligne (sur lesscouts.be): un formulaire «pris en charge par le service présidence».

Les chartes bleusailles et baptêmes

Elles stipulent toutes, pour les bleusailles (les événements d’avant-baptême) comme les baptêmes, notamment que: personne ne peut être obligé d’y participer ; aucune forme de représailles n’est autorisée si l’on n’y participe pas ; on peut arrêter à tout moment sans subir de représailles ; aucune atteinte à la santé physique, morale ou psychologique n’est permise ; il ne peut y avoir aucune forme de discrimination par rapport à l’orientation sexuelle, aux convictions religieuses, à la (non-)consommation d’alcool, au régime alimentaire, etc ; toute nudité est interdite ; les bleus sont intouchables. Un «service de sécurité» doit être prévu, composé d’étudiants identifiés comme tels, formés aux premiers secours (ou formation équivalente), ne consommant pas d’alcool, possédant une trousse de premiers soins et les numéros d’appel d’urgence. A noter aussi: le site abusbaptemeveterinaire.sitew.com, créé il y a dix ans, est toujours actif pour lutter et réagir contre les abus du baptême des étudiants vétérinaires mais pas pour interdire le baptême des étudiants en général.

L’évolution de l’autorité jusque dans les entreprises

Les manifestations d’autorité, lors d’un baptême ou d’une totémisation, disent-elles quelque chose de la façon dont l’autorité est exercée, de manière plus générale? «Absolument, confirme Bruno Humbeeck, psychopédagogue à l’UMons. Elles sont toujours liées à une époque. Aujourd’hui, on ne prépare plus les futurs adultes comme on les préparait il y a vingt ans ou même lors de la décennie précédente. Il y a des choses qu’on ne fait plus, parce que des lois existent, sur le bien-être au travail notamment, qui protègent les valeurs et sanctionnent lorsqu’il y a transgression. Les pratiques humiliantes de dirigeants, ce n’est plus de notre époque

Bruno Humbeeck situe la bascule à 2016, avec le procès de sept anciens cadres de France Télécom pour harcèlement moral. Tous ont été condamnés. L’enquête avait été ouverte à la suite de 35 suicides, survenus entre 2008 et 2009 dans le cadre d’un plan de réorganisation basé sur un management ultradirigiste. «Il y a un avant et un après France Télécom, qui a été une grosse secousse, issue d’un changement social majeur, qui a remis en question les rapports de pouvoir, véritables gangrènes des démocraties. Depuis, on ne peut plus diriger une entreprise en créant de la terreur, en jouant de la peur, en multipliant les gestes d’autorité. Aujourd’hui, si vous n’êtes pas préparé à entrer dans un monde où le harcèlement est pénalisé, dans lequel le bien-être est devenu une véritable valeur, vous ne serez plus un dirigeant acceptable. Tout simplement.»

Pour le psychopédagogue, «tous les systèmes sont reliés les uns aux autres: ce que vous changez au niveau de l’école, vous l’anticipez à celui de l’entreprise. Et donc si vous avez une école qui est plus sensible au vécu individuel à l’intérieur des manifestations collectives, vous aurez des enfants qui pourront beaucoup mieux réagir à ce qu’ils vivent avec un effet durable, jusque et y compris dans le monde du travail, quand ils seront adultes.»

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