Pourquoi les bières sans alcool ont le vent en poupe

Les ventes de bières dépourvues d’alcool ont augmenté de 12% l’an dernier: les consommateurs sont désormais plus attentifs à leur santé. Et ils ont plus de choix.

Le secteur brassicole belge n’a pas la pêche: la consommation totale de bières a baissé de 5,8% entre 2022 et 2023, confirmant une tendance de fond lancée en 1990. Le nombre de brasseries est d’ailleurs en recul: 23 nouvelles structures ont vu le jour mais 36 ont mis la clé sous le paillasson. Il en restait 417 en fonction à la fin de 2023, contre 430 un an plus tôt, selon les chiffres de la Fédération des brasseurs belges.

Dans ce contexte morose, qui affecte, il est vrai, tout le secteur agro-alimentaire, un type de bières s’en sort avec panache: celles qui sont dépourvues d’alcool. Leurs ventes ont augmenté de 12% l’an dernier. «Les gens consomment plus consciemment qu’avant», observe-t-on à la Fédération.

Plusieurs facteurs expliquent ce constat d’appétence pour les boissons non alcoolisées. D’abord, les consommateurs sont davantage que par le passé conscients des risques que l’alcool fait peser sur leur santé. Les campagnes d’information et de prévention font leur oeuvre. Ensuite, l’offre de bières sans alcool ne cesse de s’étoffer. On en trouve désormais dans toutes les grandes marques alors qu’en 2017, seul le groupe ABInbev proposait une bouteille à 0%. Dans toutes les grandes surfaces, les rayons consacrés aux bières sans alcool se développent. Enfin, la consommation de bière reste un marqueur fort de la culture alimentaire belge: opter pour un verre sans alcool permet de rester en phase avec des habitudes de consommation bien ancrées. Et de se dérober au jugement social, implicite ou explicite, que les non-buveurs connaissent bien. Particulièrement en période de haute actualité footballistique…

Les producteurs ont parallèlement consenti d’importants efforts pour améliorer le goût de ces bières particulières. Soit en tentant de se rapprocher au maximum du goût d’origine, soit au contraire en assumant de s’en éloigner au profit d’arômes tout différents. Davantage de consommateurs peuvent ainsi s’y retrouver en termes de plaisir gustatif. Les processus de fabrication et de fermentation ont été repensés par tous les brasseurs concernés pour améliorer le produit final. En quelques années, les progrès sur ce plan sont évidents.

Bien sûr, les brasseurs sauvent ainsi ce qui peut l’être dans un marché en décroissance. Ils se montrent aussi de bonne volonté, sans doute, par rapport aux enjeux de société liés à la consommation d’alcool. Cela dit, les bières sans alcool ne représentent toujours qu’une très petite part du marché belge: 4,8% selon le bureau Nielsen. Au niveau mondial, le volume de bière sans alcool produit l’an dernier représentait quelque 33 millions d’hectolitres, soit à peine 1,8 % de la production totale. Du côté financier, tous types de produits confondus, la vente de boissons peu alcoolisées (soit contenant moins de 0,5% d’alcool) ou non alcoolisées a généré des recettes de l’ordre de 11 milliards de dollars en 2022, soit 0,7 pour mille d’un total de quelque 1500 milliards de dollars en 2022.

On notera aussi l’impact d’opérations comme Tournée minérale, qui incite un maximum de citoyens à ne pas consommer d’alcool durant tout le mois de février. Quelque 15% de la population y participe chaque année, qui acquièrent sans doute le réflexe de consommer des bières non alcoolisées durant cette période d’abstinence.

A l’instar de ce qui existait déjà aux Etats-Unis, on trouve désormais en Belgique, du côté de Liège, un bar qui vend certes de la bière, du vin ou du gin mais sans une goutte d’alcool. Un genre de lieu qui permet de passer de bons moments sans se sentir jugé si l’on opte pour la sobriété.

En Belgique, d’une manière générale, les consommateurs boivent donc moins en volume mais choisissent et goûtent davantage les bières pour lesquelles ils optent, qu’elles soient sans alcool ou issues de brasseries artisanales. La qualité apparaît désormais plus importante que la quantité.