A l'instar du milieu du stand-up belge, la scène bruxello-anglophone est un milieu ultra exigu, « où tout le monde est ami ». Les langues peinent à s'y délier.

« Pendant de longs mois, j’ai vécu dans le silence »: agressée sexuellement, cette humoriste claque la porte du stand-up

Elise Legrand
Elise Legrand Journaliste

Après des mois de doute, Giovanna Coi a décidé de tirer un trait définitif sur le stand-up. L’humoriste dénonce le sexisme et le harcèlement « omniprésents » dans la scène anglophone.

Cette fois, c’est fini. » Après deux ans de scène et des centaines de plateaux à Bruxelles, Giovanna Coi vient de définitivement raccrocher le micro. « Une décision très difficile », que l’humoriste italienne justifie par le sexisme et le harcèlement « omniprésents » dans le milieu du stand-up anglophone.

« Pendant de longs mois, j’ai vécu dans le silence, confie la trentenaire, agressée sexuellement à trois reprises. J’étais dans le déni, car fondamentalement, j’adorais me produire sur scène. Mais si je l’ouvrais, j’avais peur de ne plus être programmée. » Plus encore que le stand-up belge, la scène bruxello-anglophone est un milieu ultra exigu, « où tout le monde est ami ». Giovanna, comme d’autres avant elle, craignait de se mettre à dos certains poids lourds de l’humour.

Résignée, Giovanna continuera à jouer, partageant à plusieurs reprises des scènes avec ses agresseurs. « Un jour, alors que j’officiais en tant que maîtresse de cérémonie, j’ai dû présenter l’un d’entre eux, se remémore-t-elle. Je me suis mise en pilote automatique et je l’ai annoncé de la manière la plus diplomatique possible. Mais mentalement, c’était très dur. J’ai ressenti beaucoup de colère. De la peur, aussi, face à une potentielle nouvelle agression. »

Stand-up: « Tout le monde était au courant »

Après des mois d’intériorisation, un déclic s’opère. « Mon corps a parlé pour moi, et tous ces épisodes douloureux sont remontés à la surface ». Giovanna décide alors d’en parler à quelques collègues humoristes. A l’évocation de certains noms, les histoires se recoupent. Un artiste en particulier revient sur toutes les lèvres. « On s’est rendu compte que tout le monde était au courant. Toutes les filles savaient que quand il buvait, il devenait oppressant et dangereux. Il représentait une véritable menace, mais la culture du silence était plus forte. »

Malgré cette sororité, la charge mentale est devenue trop lourde à supporter pour Giovanna. Mi-février, elle est montée sur scène pour la dernière fois. Un clap de fin pour sa carrière d’humoriste. Mais pas pour son combat féministe.

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