Le plaisir sur deux roues
La Belgique compte plus d’un demi-million de motos et scooters immatriculés. Pour la plupart des propriétaires, le deux-roues motorisé est l’objet de loisirs par excellence. Mais dans la circulation aussi, le facteur » plaisir de conduire » se révèle déterminant.
En quoi rouler en deux-roues motorisé (essence ou électrique) est-il synonyme de plaisir? Il suffit de regarder un motard dont le large sourire illumine souvent son visage. C’est encore plus le cas quand il a l’opportunité de rouler sur circuit, sans crainte des radars et avec une bonne dose d’adrénaline en prime. Et pareil après un stage tout-terrain. Même pour ceux qui utilisent principalement ce moyen de transport à des fins utilitaires, un trajet à moto pour se rendre au travail est souvent un moment de détente, du moins quand il ne pleut pas fort ou que la température n’est pas trop basse.
Ce plaisir ressenti peut avoir plusieurs origines. Vincent Walsh, professeur britannique spécialiste en Human Brain Research à l’University College de Londres, a mené une étude et mis en évidence trois facteurs: le plaisir offert par la sensation de vitesse ou toute sensation nouvelle, l’appartenance à un groupe social (les motards se présentent comme des individualistes mais apprécient de partager ce loisir ensemble) et le plaisir de s’améliorer en tant que conducteur. Sans oublier le sentiment de liberté mis en avant par beaucoup. Faire corps avec l’environnement est aussi également cité: en moto, vous ressentez au printemps les odeurs des premières floraisons et en été la senteur des premières gouttes de pluie tombant sur l’asphalte chaud…
La moto et le scooter sont des moyens de transport individuels et constituent une solution de substitution pour éviter les transports en commun.
Source de bonheur
De ces différentes études, il est également ressorti que la conduite d’une moto produit au niveau du cerveau des substances chimiques ‘euphorisantes’. Si vous négociez parfaitement un virage, vous produisez de la dopamine. Ce neurotransmetteur est actif au niveau des mécanismes de la satisfaction et du plaisir. Rouler à moto décontracte et réduit le stress tant vous êtes focalisé sur la conduite et moins sur d’autres choses (comme le boulot…). La moto représente aussi une certaine forme de rébellion. Tout le monde n’est pas motard et, dans la circulation, jusqu’à un certain point, vous n’avez plus à vous préoccuper des embouteillages. Et puis, malgré tout, la pratique de la moto ou du scooter s’accompagne d’un certain risque.
Éric De Seynes, le CEO français de Yamaha Motor Europe, reconnaît ce risque. » Il faut accepter ce danger. Vous ne pouvez pas convaincre quelqu’un de rouler à moto, ni de prendre des risques, pour gagner seulement dix minutes sur le trajet entre son domicile et son lieu de travail. Ce n’est pas en soi suffisant. Mais quand vous êtes au feu rouge et que quelqu’un admire votre moto, quelque chose se passe quand vous démarrez. La moto génère une émotion positive et, à cet instant, vous acceptez le danger. Les risques, vous ne pouvez pas les accepter sur la base de simples éléments rationnels. Il faut du plaisir pour en prendre. »
Grâce à corona
Ce plaisir, ils sont de plus en plus nombreux à le découvrir. En Belgique, le nombre de motos et de scooters ne cesse de croître d’année en année. Aujourd’hui, plus de 500.000 motos et scooters sont immatriculés dans notre pays. Cela ne veut pas dire qu’il y a 500.000 motards. Certains possèdent plusieurs deux-roues. Un autre indicateur de cette popularité est le nombre de permis A délivrés. La FEBIAC (la Fédération belge et luxembourgeoise de l’automobile et du cycle) a fait savoir durant l’été qu’il y avait une forte augmentation des examens théoriques en vue du permis moto. » D’après le secteur, il apparaît qu’après le confinement, le nombre d’examens a connu une progression pouvant atteindre 70%. Il y a aussi une croissance du nombre d’examens sur terrain privé (pour les ‘manoeuvres’) et dans la circulation. Ces augmentations atteindraient respectivement 40% et 15%. La presse a également fait écho d’une pénurie d’instructeurs pour les leçons de conduite à moto « , explique la FEBIAC.
En cette année 2020 marquée par le coronavirus, la moto et le scooter n’ont rien perdu de leur popularité. Durant le confinement au printemps, le nombre de motos et scooters neufs immatriculés a connu une forte baisse. Mais dès la fin du confinement, et contrairement aux voitures, ce nombre est rapidement revenu au niveau de 2019. Deux raisons importantes expliquent cette tendance. D’abord, la moto et le scooter sont des moyens de transport individuels et constituent une solution de substitution pour éviter les transports en commun dans lesquels il faut partager avec d’autres un espace restreint. Et comme beaucoup de personnes ont dû annuler leurs vacances à l’étranger, ce budget a pu être utilisé pour d’autres ‘loisirs’.
La conduite d’une moto ou d’un scooter n’est plus exclusivement une affaire d’hommes. Le nombre de femmes ne cesse de croître également. Les écoles de conduite constatent une augmentation régulière du nombre de femmes venant prendre des cours en vue d’obtenir le permis moto. Elles représentent aujourd’hui de 20 à 30% des élèves. Mais en Belgique, il n’existe pas de chiffres précis sur cet engouement féminin. Certains chiffres disponibles dans d’autres pays confirment cette tendance. Aux Pays-Bas, un nouveau motard sur cinq est une femme. Entre 2014 et 2018, le nombre de femmes ayant obtenu leur permis chez nos voisins du Nord a augmenté de 40% (de 4.060 à 5.799). En Suisse, 15% des utilisateurs de motos sont des femmes. Et ce chiffre est en augmentation. Au niveau des propriétaires de scooters, le nombre de femmes est plus élevé (environ 20%). Ce sont d’ailleurs surtout des femmes de 20 à 30 ans qui optent pour le scooter, essentiellement pour des raisons de mobilité. Une étude allemande indique que le pourcentage de femmes pratiquant la moto est de 9,9%. Au niveau des jeunes de 18 à 29 ans, le pourcentage est plus élevé, à 14,4%.
Les catégories populaires
Quels sont les motos et les scooters les plus populaires? On associe parfois la notion de ‘motard’ à Harley-Davidson, l’emblématique marque américaine. Si tous les conducteurs de Harley sont des motards, tous les motards sont loin d’être des bikers roulant en Harley… Yamaha, BMW, Honda, Kawasaki et Vespa (Piaggio) sont les cinq marques enregistrant le plus d’immatriculations et représentent au total 52% de celles-ci.
Les catégories les plus populaires sont les motos et scooters de 125 cc (environ 28%), les roadsters basiques (22%) et les trails (18%). Pour les jeunes de 18 et 19 ans, le passage par un 125 cc est obligatoire. Ces deux-roues motorisés peuvent – sous certaines conditions (voir encadré) – aussi être conduits par les détenteurs d’un permis B. Les scooters 125 cc sont essentiellement des solutions de mobilité et les motos 125 cc des engins de plaisir. Dans la catégorie ‘basic/roadster’, on retrouve une grande diversité de modèles: des monocylindres de 300 cc jusqu’à de gros 4-cylindres de 1.000 cc, des motos rétros ou des naked bikes modernes au look agressif. Leur point commun est leur simplicité avec, en gros, juste deux roues, un cadre, un réservoir et une selle. Leur prix demeure donc attractif. Ces motos peuvent aussi être utilisées très largement: petites balades, trajets quotidiens, voire de plus longs voyages, même si l’absence de protection contre le vent reste un handicap. Les trails (ou ‘enduros de voyage’) évoquent bien entendu les motos du Dakar. Elles disposent d’importants débattements, d’un large guidon et d’une bulle pour protéger le conducteur contre le vent et la pluie. Ces motos permettent aussi de sortir des sentiers battus mais la plupart de leurs utilisateurs se contentent de circuler sur les routes pour aller travailler, partir se balader le week-end ou effectuer de longs périples. Et toujours avec le sourire…
Un embouteillage? Quel embouteillage?
En effectuant en moto ou en scooter vos trajets quotidiens pour vous rendre au travail, vous gagnez du temps. Fini de vous retrouver bloqué dans les embouteillages quotidiens aux heures de pointe. Le code de la route permet de remonter les files de voitures avec une moto ou un scooter si la vitesse de la file est inférieure à 50 km/h. Si cette vitesse dépasse à nouveau les 50 km/h, il suffit de se réinsérer dans la circulation. Le différentiel de vitesse entre la file et la moto ou le scooter ne peut pas dépasser 20 km/h. La nouvelle obligation de dégager un passage pour les services de secours en cas d’embouteillage constitue également un avantage pour les utilisateurs de ces deux-roues puisqu’ils peuvent ainsi bénéficier de plus de place. Des études ont également montré que les embouteillages diminueraient si davantage d’automobilistes optaient pour la moto, et que ces files se résorberaient aussi plus rapidement. Un simple calcul le confirme. Si un automobiliste circule durant 10 minutes dans un embouteillage à une vitesse de 30 km/h, il parcourt 5 km. Lorsqu’un motard roule à 50 km/h dans le même embouteillage durant le même laps de temps, la distance parcourue est de 8,3 km. Soit 66% en plus!
Conduire une moto avec le permis B
Pour conduire une moto ou un scooter, il faut être détenteur d’un permis A. Mais il existe des exceptions à la règle.
– Le détenteur d’un permis B délivré avant 1989 possède automatiquement aussi le permis A. C’est un droit acquis. Il est cependant conseillé aux débutants de prendre des cours de conduite à moto.
– Le détenteur d’un permis B délivré après 1989 peut conduire une moto ou un scooter de 125 cc sans devoir passer le permis A. Sous certaines conditions cependant: la puissance du deux-roues motorisé ne peut pas dépasser 15 ch (11 kW) et il faut être détenteur du permis B depuis au moins deux ans. Le détenteur d’un permis B délivré après mai 2011 doit cependant suivre quatre heures de formation mais ne doit pas passer d’examen de conduite.
– Le détenteur d’un permis B délivré après 1989 peut également conduire un trike, une moto à trois roues. Diverses marques de scooters en proposent (deux roues à l’avant et une à l’arrière) de plus de 125 cc de cylindrée, tombant sous le coup de cette règlementation. Les personnes ayant passé le permis B après 2013 doivent pouvoir présenter un certificat prouvant qu’elles ont suivi quatre heures de formation.
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