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Faut-il interdire les SUV dans les centres-villes?

Tex Van berlaer Collaborateur Knack.be

Experte en mobilité, Eva Van Eenoo (VUB) voit d’un mauvais oeil l’explosion des ventes de SUV. « L’heure est à l’action collective. »

Soudain, il est impossible d’imaginer le monde sans lui : le SUV, abréviation de sport utility vehicle. Au cours des trois premiers mois de 2021, près de la moitié des voitures vendues étaient des SUV ou des crossovers (ces véhicules à quatre roues à mi-chemin entre un SUV et une voiture ordinaire). Selon la fédération de l’industrie automobile Febiac, elles représentent 48 % des voitures, contre 42 % l’année dernière. En 2016, cette part était encore de 26 %.

Parallèlement à cette popularité croissante, les critiques sur les types de voitures plus grandes et plus lourdes augmentent également. « Toutes les personnes impliquées dans la sécurité routière et la mobilité durable déplorent la montée en puissance du SUV », déclare Eva Van Eenoo (VUB), experte en mobilité. À l’instar des zones à faibles émissions, elle plaide pour des « no-SUV-zones » : des endroits où le SUV est interdit.

Pourquoi les SUV ne sont-ils pas sûrs ?

Eva Van Eenoo : La position plus élevée du conducteur du SUV entraîne un sentiment de sécurité, mais au détriment de la sécurité réelle des piétons et des cyclistes. Au volant d’un SUV, il arrive souvent que l’on ne voie pas les petits enfants, ce qui est excessivement dangereux. En d’autres termes, le risque d’accident augmente. Comme les SUV ont une masse plus importante que les autres voitures, les risques qu’un accident se termine mal sont également plus grands – c’est de la physique pure.

Outre la sécurité objective, il y a également un sentiment subjectif de sécurité. Les gens ne se sentent pas en sécurité à proximité de grosses voitures, certainement pas dans les rues étroites de villes comme Gand, où je vis.

Les SUV ne sont pas non plus compatibles avec la durabilité, dites-vous.

Les voitures sont généralement devenues plus durables : il y a beaucoup plus de modèles hybrides et électriques. Mais les bénéfices sont largement réduits à néant par les SUV. Ces voitures ne sont pas du tout efficaces sur le plan énergétique.

Pendant ce temps, de nombreuses villes et communes manquent de places de stationnement. La popularité des SUV fait pression sur les collectivités locales pour qu’elles élargissent les aires de stationnement, ce qui se fait au détriment des trottoirs ou des projets de désartificialisiation.

Votre proposition d’instaurer des zones interdites aux SUV ne vous rendra pas sympathique.

Je ne veux pas offenser qui que ce soit. L’industrie automobile est très présente sur le marché des SUV, et je ne peux pas reprocher aux gens d’être sensibles à ce marketing. Mais je pense que les consommateurs devraient réfléchir à l’impact de leur comportement d’achat sur leur environnement.

Si vous regardez des photos de voitures d’il y a 10 ou 15 ans, vous remarquez immédiatement à quel point elles sont petites. Mais cette masse croissante n’est pas une évolution inéluctable : nous devons nous demander quel type de voitures nous voulons encore. En fait, une voiture doit être capable de transporter vos courses et peut-être vos enfants, même avec des modèles plus petits. Qui a vraiment besoin d’un SUV ? Seulement les personnes qui vivent ou travaillent dans des zones sans asphalte, telles que les gardes forestiers.

En tout état de cause, l’heure est à l’action collective. En donnant aux gouvernements locaux les moyens d’interdire les SUV dans les centres-villes ou les quartiers résidentiels, nous pouvons faire en sorte que la situation reste vivable.

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