Les stages et les camps font peur à votre enfant? «Souvent, ce sont les parents qui sont stressés»
Les camps et les stages de vacances sont certes bénéfiques, mais peuvent aussi être redoutés par les enfants. Surmonter cette peur peut justement avoir de l’intérêt. Voici quelques conseils pour en sortir par le haut.
C’est de saison. De nombreux enfants participent, durant les vacances d’été, à des stages ou des camps. Les motivations pour participer à ces activités sont nombreuses et ne s’excluent pas, qu’il s’agisse d’une simple envie d’amusement, d’une étape incontournable de la vie en mouvement de jeunesse ou, prosaïquement, d’une solution pour des parents tenus de travailler.
Conçues pour les enfants et les ados, censées ressembler à une parenthèse joyeuse, ces occupations peuvent aussi faire l’objet d’appréhensions, auprès des plus jeunes enfants notamment. Certains parents ont éprouvé ces sentiments du lundi matin: la boule au ventre, leur enfant sont bien anxieux à l’idée de plonger dans l’inconnu. Quelques larmes coulent parfois chez l’enfant puis, à l’occasion, chez l’adulte, une fois le dos tourné. Et la culpabilité pointe le bout de son nez…
Stresser avant un camp, c’est normal
Ces appréhensions de certains jeunes n’ont évidemment rien d’anormal, dans la grande majorité des cas. Et la culpabilité que peuvent ressentir les parents ne résoudra pas grand-chose, dans ces moments.
«Cela peut arriver, mais c’est plus souvent le cas chez les plus jeunes, les baladins (6-8 ans), lorsqu’ils participent à leur premier camp», observe Coralie Beyens, animatrice fédérale au sein des Scouts. «Pour certains, c’est la toute première fois qu’ils quittent leurs parents aussi longtemps. Notre spécificité, c’est que d’autres activités ont déjà eu lieu précédemment dans l’année, ils connaissent les animateurs et les autres enfants. Mais il n’est naturellement pas anormal d’éprouver quelques craintes.»
Maurice Jonhson-Kanyonga, psychologue, spécialiste de l’enfant, de l’adolescent et du jeune adulte, identifie plusieurs types de profils, qui peuvent éprouver des peurs de natures différentes. «Auprès des enfants de 6 à 10 ans, grosso modo, la participation à un camp, un voyage ou une autre activité les pousse à sortir de leur environnement, généralement sécurisant. Parfois, c’est la toute première fois.»
Une autre source d’anxiété peut survenir lorsque le cadre de vie change sensiblement. «Je pense par exemple à des jeunes qui vivent en milieu urbain et qui craignent de se retrouver en pleine nature», explique-t-il.
Enfin, d’autres peurs peuvent être liées à la socialisation et au regard des pairs: la peur de se retrouver seul, de ne pas se faire d’amis, surtout lorsqu’on ne connait personne. «Ces jeunes-là manquent parfois d’estime d’eux-mêmes, ou éprouvent des difficultés par rapport au regard des autres, ne se sentent pas assez populaires, physiquement attirants, drôles ou intéressants. Les adolescents sont concernés par ces questionnements. Parfois, se détacher de son smartphone ou sortir de sa chambre s’apparente à une sanction», alors même qu’ils pourront développer des aptitudes sociales lors de ces activités.
D’autres personnes, un peu moins jeunes, peuvent également générer cette anxiété: les parents. «Lorsque vous inscrivez votre enfant à un stage, vous confiez à d’autres ce qui vous est le plus cher. Oui, il y a un petit pourcentage d’enfants qui ont peur, mais la plupart sont assez excités de venir. Et sincèrement, je constate que ce sont plutôt les parents qui sont stressés», transmettant malgré eux un peu de leur anxiété, constate Denis Detinne, directeur de l’asbl Promosport.
L’objectif, c’est l’épanouissement
«Je ne peux qu’inviter les parents à se renseigner sur l’organisme organisateur, poursuit Denis Detinne. S’ils sont plus relax et confiants, je pense que cela résout déjà pas mal de choses. Nous sommes contrôlés par l’ONE plusieurs fois sur l’été, il existe des normes d’encadrement, du bouche-à-oreille autour des activités», permettant dans l’immense majorité des cas de constater le sérieux de l’encadrement.
Dans les moments d’appréhension, il convient peut-être de se souvenir des raisons de l’inscription à l’activité, soutient Maurice Johnson-Kanyonga. «Au-delà des questions de garde d’enfant, l’idée n’est quand même pas de se débarrasser d’eux, mais bien de leur offrir une activité, de l’amusement, de belles expériences.» Ainsi, une façon de désamorcer l’anxiété consiste déjà, tout en acceptant les émotions exprimées par l’enfant, à orienter son discours sur ces aspects positifs, du moins sur l’expérience à vivre, les nouveautés à découvrir, les camarades à rencontrer, etc.
Sauf situations particulières, participer aux stages et autres camps permettra justement aux enfants de surmonter ces peurs, ce qui peut s’avérer très formateur. «L’enfant sera confronté à de nouvelles émotions, il pourra apprendre à les canaliser, observer comment il réagit dans l’environnement nouveau, vivre tout cela en groupe», explique-t-il. «Et franchement, il n’est pas rare d’entendre, dans les mouvements de jeunesse par exemple, des témoignages de jeunes adultes qui ont éprouvé quelques difficultés au début, pour finalement les surmonter et ne plus pouvoir s’en passer.»
C’est bon pour la confiance en soi
Il est souvent question de développement de la confiance en soi, lorsque les valeurs de ces activités de jeunesse sont évoquées. C’est même au cœur de l’ADN des Scouts, comme le rappelle Coralie Beyens. «L’objectif, c’est que les enfants deviennent des adultes épanouis, développent une bonne estime d’eux-mêmes.» Valoriser l’enfant, lui fournir des retours positifs sur ses actions devient alors important. «Si un enfant a éprouvé des difficultés, qu’on a mis des choses en place avec, sur base de ses propres ressources, et qu’au final ça se passe bien, c’est positif pour sa confiance en lui.»
Quelques lignes rouges ne doivent cependant pas être franchies. Les parents devraient percevoir lorsqu’une activité n’est pas adaptée à leur enfant, de même que les animateurs sont aptes à en juger. «L’équilibre à trouver, comme on l’explique aux animateurs, consiste à sortir un peu de sa zone de confort pour explorer un peu la zone de challenge, de manière à faire grandir la zone de confort. Mais on ne peut jamais arriver dans la zone de danger, au risque de rétrécir la zone de confort. Il faut toujours que ce soit confortable et sécurisant pour chaque enfant.»
Dans cet équilibre, insiste-t-on chez les Scouts, les parents sont considérés comme des partenaires, sachant que le mal-être peut aussi être lié à une situation indépendante du mouvement de jeunesse, comme des tensions à l’école ou à la maison. En tout état de cause, «les animateurs savent quelles sont leurs limites, ils peuvent toujours avoir recours à une aide extérieure si la situation les dépasse».
Comme d’autres organisations, celle des Scouts a d’ailleurs développé tout un arsenal d’animations et d’outils pour s’assurer du bien-être des participants. Il s’agit par exemple d’une ressource pédagogique à destination des plus jeunes (les baladins), d’endroits spécifiquement consacrés au ressourcement sur les lieux de camp, de moments de dialogue, d’expression des ressentis et, au besoin, de mise en place de solutions concertées avec l’enfant lui-même. Il aura alors appris, le cas échéant, à exprimer ses émotions et imaginer des solutions avec le soutien des animateurs. C’est peut-être dans ces quelques difficultés surmontées, finalement, que l’activité un peu redoutée au départ aura véritablement pris tous son sens.
Mon enfant a peur: quelques conseils
– Dialoguer, être dans la compréhension, ne pas nier ses émotions, lui permettre de les exprimer, de comprendre ce qui lui fait peur. Ce sera une occasion de le rassurer, lui expliquer l’intérêt d’une telle activité, ses aspects positifs, les nouveautés à découvrir, etc.
– L’impliquer, rendre l’enfant acteur de la décision, par exemple en le consultant au moment de choisir le stage. Cela permettra de renforcer son adhésion au projet.
– Privilégier les activités diversifiées. «Jusqu’à 8-9 ans, j’invite à faire du multisport, pour développement moteur de l’enfant, mais aussi pour lui permettre d’essayer, d’affiner ses préférences», explique Denis Detinne. A trop exercer une discipline dans l’enfance, on peut aussi s’en lasser.
– Face à la peur de l’inconnu, réduire l’imprévisible. Il est intéressant de faire la valise ensemble, avec l’enfant, de planifier les choses avec lui, évoquer le déroulement de l’activité, le moment du retour. Dans un même ordre d’idée, les objets transitionnels peuvent être réconfortants: un doudou, une photo, des lettres ou des petits mots réconfortants dans la valise, etc.
– Faire confiance aux animateurs, aller à leur rencontre le premier jour, faire comprendre à l’enfant que vous le confiez à des personnes en qui vous faites confiance.
– Le jour de la «séparation», rester détendu, ne pas culpabiliser, éviter de transmettre sa propre anxiété à son enfant. Si possible, prendre le temps de se dire au revoir, mais sans prolonger inutilement.
– Au retour de l’enfant, ne pas hésiter à dialoguer, le laisser s’exprimer sur l’expérience, en tirer d’éventuels enseignements ensemble, mettre en valeur ce qu’il a accompli. Parfois, les enfants n’ont pas envie de parler, ou ont oublié ce qu’ils ont fait, il n’est pas forcément constructif de les «obliger» à parler.
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