Nicolas Demorand, journaliste à France Inter: «Je suis un malade mental.» © GETTY

Le cri du journaliste Nicolas Demorand et son plaidoyer pour une meilleure prise en charge de la maladie mentale

Gérald Papy
Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Le journaliste de France Inter Nicolas Demorand révèle être bipolaire dans un essai poignant qui stigmatise les errements d’une partie du monde médical face à la maladie mentale.

Il culpabilisait «de ne pas partager avec les auditeurs de France Inter quelque chose de [lui] qui pourrait, peut-être, leur être utile». Le 26 mars, Nicolas Demorand, le présentateur, avec Léa Salamé, de la matinale de la chaîne publique, a annoncé être bipolaire et donc, être un «malade mental». Il explique son parcours «sur plus de 20 ans» pour qu’on diagnostique enfin sa maladie dans un récit poignant, Intérieur nuit (1).

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La bipolarité chez Nicolas Demorand se traduit par «neuf longues, profondes phases de dépression» pour une phase d’euphorie infiniment plus courte «où je déborde d’une énergie malsaine». Conjuguées à de rares périodes de stabilité, ces séquences autorisent l’auteur à être «tranquille deux mois par an». La majorité du temps, donc, il subit les effets terribles des phases les plus douloureuses: «La honte, brûlante, de vivre dans un état de faiblesse intime, la peur de tout perdre en « avouant [sa] maladie », l’appréhension face au boulot, « zone de risque ultime » (« Qui prendrait le risque de confier des responsabilités à un malade mental? »), et le poids du silence, de la dissimulation, du mensonge tant qu’on n’a pas décidé d’ »avouer ». Ces souffrances ont conduit l’auteur à envisager le suicide non par volonté de mourir, mais par le refus d’encore «endurer le martyre de la souffrance psychique».

«Pourquoi les malades mentaux doivent-ils attendre si longtemps pour un diagnostic?»

Au-delà de sa valeur testimoniale sur une maladie encore frappée de «mépris, de déni, et de morale», Intérieur nuit est un puissant plaidoyer pour une meilleure prise en charge de la maladie mentale. «Je ne comprends toujours pas, aujourd’hui, pourquoi personne n’a su sérieusement s’intéresser aux causes du mal au lieu de mal en soigner les effets», déplore Nicolas Demorand. «Aucun médecin généraliste n’eut jamais l’idée de m’envoyer consulter un spécialiste, même après des années d’échec thérapeutique. Quant aux psychanalystes ou aux psychiatres-psychanalystes, ils ne m’ont été d’aucune aide. Le problème, c’est que personne ne s’est interrogé sur le mystère des médicaments qui ne servaient à rien», complète-t-il. Pour le journaliste, le salut est venu du «saut qualitatif de la prise en charge par le patron du service de psychiatrie d’un grand hôpital parisien» et de la rencontre avec une «psychothérapeute extraordinaire». Mais combien de patients n’ont pas cette chance? Et «pourquoi les malades mentaux doivent-ils attendre si longtemps pour un diagnostic?».

(1) Intérieur nuit, par Nicolas Demorand, Les Arènes, 112 p.
© DR

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