Mélanie Geelkens
La sacrée paire de Mélanie Geelkens | «En chaque homme sommeille un petit tas de fumier, plus ou moins puant»
Not all men. Ce cri masculin se (re)fait entendre avec vigueur, depuis le début du procès Mazan. Ainsi, que 50 hommes a priori ordinaires violent une femme endormie ne serait qu’un malencontreux hasard. Vraiment?
Gnagnagna, not all men, bla-bla-bla… Quand mâle pas content, lui toujours faire ainsi: «Les autres, peut-être, mais pas moi!» Cette insupportable déferlante de «pas-tous-dans-le-même-panier», dont les premier soubresauts naquirent en réaction à #MeToo, connaît un acide reflux depuis le début du procès des viols de Mazan. Où l’affaire –un mari qui drogue sa femme pendant dix ans pour «offrir» son corps endormi à 50 violeurs identifiés– choque tout autant que le profil desdits violeurs –infirmier, informaticien, journaliste, chômeur, frigoriste, chauffeur routier, retraité, manager, militaire, gardien de prison… Bref, des Monsieur Tout-le-Monde. Des lambdas. Des all men, précisément.
Même l’abbé Pierre, pour l’amour de Dieu! Que faut-il d’autre qu’une idole catholique qui tripotait les femmes –parfois très, trop jeunes– entre deux eucharisties pour que la gent masculine entame une remise en question globale? Combien d’autres exemples sont-ils nécessaires (Weinstein, PPDA, P. Diddy, Depardieu, Polanski, Bedos, Jacquot, Doillon, Spacey, R. Kelly…) pour assimiler que l’on peut être un producteur, un chanteur, un acteur ordinaire doublé d’un agresseur, et que la même logique prévaut pour les soudeurs, les facteurs, les carreleurs, les dessinateurs, les instituteurs, les serveurs…?
Il n’y a pas des monstres d’un côté et des mecs bien de l’autre. Il y a des hommes.
«Not all men, mais que des men, my men! Et il se trouve qu’on en est, lançait l’humoriste franco-suisse Yann Marguet le 30 septembre dernier dans l’émission Quotidien. C’est ça qu’on doit comprendre, sans être sur la défensive. Il n’y a pas des monstres d’un côté et des mecs bien de l’autre. Il y a des hommes. Et en chacun de nous sommeille, je crois, un petit tas de fumier, plus ou moins puant.» Pour une fois que c’est un man qui le dit…
Not all men, mais un kiné travaillant avec des enfants handicapés ghoste sa nouvelle copine, à qui il avait laissé entrevoir monts et merveilles, juste après l’avoir baisée. Not all men, mais un gynécologue presque retraité qui un jour enlève son gant pour toucher le vagin d’une patiente, tout en lui léchant les seins. Not all men, mais un avocat à la Commission européenne qui sort son engin bien raide dans la voiture de son rencard en lui demandant de lécher, allez, «juste un petit coup de langue». Not all men, mais un commercial, jusqu’alors père exemplaire de deux enfants, qui tabasse leur mère un beau jour au bout de dix ans de vie commune. Not all men, mais un policier qui bat sa femme. Not all men, mais un chirurgien jugé pour viols aggravés et agressions sexuelles aggravées sur 299 victimes mineures. Not all men, mais un assureur qui profite de l’état d’ébriété avancé de sa sexfriend pour tester la sodomie, alors qu’elle avait toujours refusé cette pratique. Not all men, mais un ouvrier qui gifle sa copine après lui avoir lancé «tu me suces ou je me casse et tu ne me revois plus jamais». Not all men, mais un mannequin qui retire son préservatif au beau milieu d’ébats, sans en avertir sa partenaire. Not all men, mais ce comptable qui sait très bien qu’il a mis une ex enceinte –«les capotes, hein, [il] n’aime pas ça»– et qui vit sa vie comme s’il n’avait jamais égaré sa semence. Not all men, mais ce gérant de supermarché qui refile un chapelet de maladies sexuellement transmissibles à sa femme à force de la tromper avec toutes les caissières.
Histoires vécues. Heureusement pas toutes personnellement.
«Un petit tas de fumier interne. Plus ou moins puant.»
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici