D’une commune à l’autre, les frais de garderie à charge des parents varient. © GETTY IMAGES

La garderie gratuite, ce n’est pas pour demain

Soraya Ghali
Soraya Ghali Journaliste au Vif

Le coût des garderies scolaires pèse sur le budget des parents. Si certaines communes proposent une offre gratuite, c’est loin de se généraliser.

Des garderies gratuites partout, dans toutes les écoles, ce n’est pas pour demain. Le MR, Les Engagés et DéFI n’y sont pas du tout favorables. A l’inverse, pour le PS, le PTB et Ecolo, c’est une affaire de principe; ils en font même l’une de leurs priorités. Bref, il y a là une opposition nette entre les formations politiques et tendre vers la gratuité dépend(ra) donc des coalitions communales.

Pour l’heure, et sur le terrain, les communes balancent entre des adaptations tarifaires, un service payant et, parfois, gratuit. Ainsi, à titre d’exemple, l’accueil des enfants matin et soir cinq jours par semaine coûte 350 euros annuels par enfant dans cette école libre confessionnelle jettoise, 150 euros annuels dans cet établissement communal bruxellois, qui propose un tarif dégressif de 50% à partir du deuxième enfant, 182 euros annuels dans cet institut libre liégeois, tandis qu’il est entièrement gratuit dans les écoles de Charleroi, Saint-Josse-ten-Noode ou Seraing.

Des montants qui varient

En l’absence de chiffres disponibles pour toute la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB), il est toutefois difficile d’établir un état des lieux précis. D’après une enquête menée par la Ligue des familles en 2022, en primaire, les parents déboursent en moyenne 16,35 euros par mois pour la garderie du matin et 21,13 euros mensuels pour celle du soir. Le coût est donc variable d’un établissement à l’autre. Certains proposent un forfait mensuel ou trimestriel, d’autres facturent à la journée ou au quart d’heure. L’offre de service reste plutôt flexible.

A ces montants doivent être ajoutés les frais d’un «droit de chaise», une «taxe tartines» comme l’appelle le PTB qui en a fait un combat. Pour les écologistes, il est «intolérable». «Il ne sera plus jamais remis en question, les parents s’étant habitués», estime Marie-Colline Leroy, secrétaire d’Etat sortante à l’Egalité des genres, à l’Egalité des chances et à la Diversité. Ce droit de table s’élève à près de 20 euros mensuels en moyenne, selon la Ligue des familles, et concerne aussi les élèves qui se restaurent avec leur propre boîte à lunch. Il est pratiqué dans le primaire libre comme dans le fondamental officiel. En revanche, en secondaire, la surveillance du temps de midi est assumée par des éducateurs, payés par la FWB. Aucun supplément ne peut être réclamé aux parents.

Etonnamment, la pause déjeuner est en effet considérée par la FWB comme «hors du temps scolaire» et, dès lors, des frais peuvent être réclamés aux parents. Une législation inadaptée à la société actuelle que les associations de parents, notamment, dénoncent régulièrement. Aujourd’hui, à peine 5% des élèves en maternelle et 3% en primaire déjeunent à l’extérieur de l’école.

Ce droit de table équivaudrait, pour les établissements, au coût de la surveillance. L’aide qu’ils reçoivent ne suffit pas à couvrir leurs frais, en particulier ceux du personnel supplémentaire à engager pour assurer l’encadrement. Des écoles, cependant, ont fait le choix de le supprimer, comme celles du réseau Wallonie-Bruxelles Enseignement (WBE). Mais bien souvent, ce billet d’entrée à la cantine continue d’être facturé aux parents. Selon le Secrétariat général de l’enseignement catholique (Segec), le mode de subventionnement appliqué au libre permet rarement aux pouvoirs organisateurs catholiques de rendre la surveillance gratuite. Rejoint, ici, par Les Engagés, qui estiment que les pouvoirs organisateurs, quel que soit le réseau, «devraient tendre vers une offre de garderie à un prix accessible et identique entre les réseaux».

A ces montants doit être ajoutée la «taxe tartines», comme l’appelle le PTB qui en a fait un combat.

Une facture salée

Au-delà d’un choix politique, l’équation pour les communes est évidemment d’abord financière. La part du budget consacré aux garderies dépend de la taille de la commune. Le nombre d’élèves n’est pas non plus le même partout. Par ailleurs, toutes n’ont pas la même taille économique et ou les mêmes leviers. Pour assurer la gratuité des garderies, Saint-Josse-ten-Noode, par exemple, peut compter sur ses taxes communales sur les hôtels et les bureaux, nombreux sur son territoire.

Les pouvoirs communaux craignent surtout de devoir régler une facture salée, voire impayable. Selon le principe d’égalité entre les parents, en primaire, les communes qui interviennent en total ou en partie pour les garderies sont tenues de donner une somme proportionnelle aux établissements libres de la commune, en vertu de la réglementation sur les « avantages sociaux». Les garderies du matin, du midi et du soir font en effet partie de la liste des dix avantages en nature reconnus depuis 2001.

En conclusion, les communes sont face à deux options. Un: répercuter le surcoût des garderies sur les usagers, c’est-à-dire les parents. Deux: rendre gratuite l’offre de garderie dans toutes les écoles pour mettre les parents sur un pied d’égalité. Une charge financière excessive, au détriment d’autres services essentiels. Reste cette troisième voie, prônée par DéFI, celle d’«un système de tarification modulé» en fonction des revenus des parents. Il permettrait de rendre ce service accessible à ceux qui en ont le plus besoin, sans pour autant sacrifier la qualité de l’encadrement ou les autres priorités communales. Un modèle encore loin d’être pratiqué partout.

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