Joseph Ndwaniye

« Il n’y a pas de place pour les vieux dans le modèle économique occidental » (chronique)

Joseph Ndwaniye Infirmier et écrivain.

La vieillesse est un sujet particulièrement sensible dans nos sociétés occidentales. Parce qu’au bout, il y a la mort et que nous refusons de la regarder en face. L’accumulation des progrès techniques nous a fait croire que nous pourrions la vaincre, au lieu d’admettre qu’elle fait partie de la vie.

Le modèle économique occidental tente de s’imposer partout dans le monde du fait de la globalisation de l’économie. Dans ce modèle, il n’y a pas de place pour les vieux, réputés improductifs et coûteux. Les travailleurs se sentent graduellement mis au ban de la société à mesure qu’approche l’âge légal de la retraite, qui ne cesse d’être différé. Actuellement, le chiffre le plus souvent proposé est celui de 67 ans. Pourtant, une personne retraitée est loin d’être un poids inutile. Au cours de sa vie, elle a accumulé de l’expérience qu’elle ne demande qu’à partager avec les plus jeunes, qui pourront en tirer profit. Une vague de grèves auxquelles participent nombre de jeunes secoue la France depuis des semaines. Les anciens les y encouragent. «Ce sera à vous de reprendre le flambeau et c’est maintenant qu’il faut défendre votre retraite», leur assènent-ils, eux qui se sont battus pour justement l’abaisser.

Il serait temps de mettre en place des moyens pour revaloriser l’héritage des vieux.

Comment redonner ses lettres de noblesse à la vieillesse? Un des moments de la vie par lequel chaque être humain passera avec, certes, parfois une diminution physique mais compensée par l’accumulation des connaissances et des expériences de toute une vie.

Dans certaines cultures, plus un de ses membres avance en âge, plus il est respecté et écouté en hommage à l’expérience et à la sagesse qu’il a dû engranger durant des années. Lui revient de plein droit la transmission de ce qui fait la singularité et la richesse de la société dans laquelle il reste complètement inséré jusqu’à sa mort.

L’évolution à marche forcée qu’imprime la globalisation des échanges économiques alliée au développement des modes de communication imprègne du mode de pensée des Occidentaux jusqu’au village le plus reculé. Il en résulte souvent un basculement qui s’observe même au sein de sociétés où, traditionnellement, les personnes âgées étaient prises en charge par la famille et l’ensemble de la communauté. Elles se retrouvent de plus en plus isolées, d’autant plus lorsque certains de ces pays ont subi les affres de la guerre, d’un génocide, de calamités climatiques…

La prise en charge des personnes âgées qui ne seraient plus assez productives aux yeux de certains ne visant que leurs bénéfices draine pourtant chez nous un business juteux. Il serait temps de mettre en place des moyens pour revaloriser l’héritage des vieux en leur donnant la place qu’ils méritent dans la société. Cela devrait passer par le maintien du contact avec les plus jeunes: maisons de repos adossées et gérées avec une crèche, rencontres de classes entières au sein des maisons de repos… Il y a déjà des frémissements en ce sens depuis quelques années en Belgique. Ce serait l’occasion pour tous de se sentir valorisés, de bénéficier d’échanges non seulement cognitifs, mais aussi émotionnels.

Ces échanges deviennent le moment ou jamais de transmettre des histoires, des contes, des mythes, ce qui se passait autrefois au cours des veillées. C’est l’occasion d’une éducation informelle et joyeuse des enfants. Ils intégreront le fait que le monde évolue sans arrêt et que le don de de soi apporte tant de richesse et de bonheur à chacun.

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