Grandeur et misère de la revendication
La rentrée qui se profile préfigure le retour de la contestation, exacerbée par le contexte économico-social perturbé que la guerre en Ukraine, après la crise du Covid, a produit. Pour le psychologue clinicien Benjamin Lévy, cette disposition n’est pas passagère ; elle est ancrée dans l’époque. Il explique pourquoi dans L’Ere de la revendication (1). Comment la revendication reste-t-elle porteuse d’avenir, et en vertu de quels mécanismes se retrouve-t-elle parfois du côté de la haine, de la destruction ou même du meurtre?, telles sont les questions qui tissent le fil conducteur de cet essai. L’originalité de sa démarche réside dans son recours aux apports de Freud pour appréhender intimement les ressorts de la revendication. Impossible, ici, de les parcourir tous.
De même que la démocratie est gourmande en efforts, «les revendications qui jouent le jeu de la démocratie (le sont aussi): de la rue jusqu’au Parlement ou jusqu’au tribunal, et du simple préjudice jusqu’au code civil ou pénal, la voie est longue». La lutte pour les faire aboutir peut s’avérer vaine. Parfois, le simple fait de l’avoir menée apporte une satisfaction. «Grâce à la création d’un espace laissé libre pour la prise de parole, chacun a trouvé dans la grève un gain non monnayable, un bénéfice dont la valeur n’est pas financière», cite en exemple Benjamin Lévy.
Pour lui, la frustration est à l’origine de toute revendication. Celle-ci peut prendre une tournure violente quand, à la frustration, s’ajoute l’humiliation et quand «un chef de meute» réussit à l’instrumentaliser. Ce fonctionnement «fait perdre le sens du juste et de l’injuste et conduit aussi bien à des lynchages médiatiques qu’à des homicides réels». Cette dérive ne masque cependant pas l’essentiel: la revendication est un bienfait pour la démocratie.
(1) L’Ere de la revendication. Manifester et débattre en démocratie, par Benjamin Lévy, Delta Flammarion, 320 p.
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