Pourquoi supporte-t-on plus ou moins bien le froid et le chaud ?
Quinze minutes dans un sauna peuvent être plus supportables qu’un temps plus court dans un milieu moins chaud mais humide. Un paradoxe qui n’en est pas un.
Le fond de l’air est chaud, le fond de l’eau est frais. Du moins est-ce la sensation qu’on éprouve alors que le thermomètre affiche 25 °C des deux côtés. Sensation d’autant plus intense que les pertes calorifiques entre le corps et le milieu ambiant sont rapides – cf. l’appel bravache à sauter dans la piscine: «Allez, viens, après quelques minutes, elle est bonne.» La conductivité de l’eau étant environ 25 fois plus élevée que celle de l’air, on se refroidit beaucoup plus vite, d’où l’impression de froid plus «mordant».
Quand le corps n’est pas plongé dans un liquide mais simplement mouillé et soumis au vent, le phénomène est différent. Là, l’évaporation de l’eau produit réellement du froid. C’est le principe du frigo, éprouvé lorsqu’on transpire ou s’asperge le visage.
S’il fait trop moite, le mécanisme ne pourra pas jour à plein. En découle non seulement un inconfort mais, potentiellement, un danger pour la santé. «Des 35 °C à 40 °C sont très difficiles à supporter plus de quelques minutes en milieu très humide, avance Rémy Selma, chercheur à l’Inserm et épidémiologiste, et nos cellules ne survivent pas si la température interne avoisine les 41 °C.»
Pour la maintenir à 37 °C, l’organisme sera soumis à rude épreuve, détaille l’auteur de Le Mal du dehors. L’Influence de l’environnement sur la santé (Quae, 2017). Il dépensera une énergie considérable, provoquant «des réactions similaires à celles d’un exercice physique intense» – déshydratation, perte de minéraux… Paradoxalement, une quinzaine de minutes dans un sauna à 85 °C – voire 100 °C, soit le maximum que l’on peut supporter – seront moins éprouvantes.
La durée cumulée de l’exposition aux fortes chaleurs a également un impact. Un pic à 42 °C ne sera pas aussi nocif qu’une succession de jours à plus de 31 °C sans refroidissement nocturne suffisant (moins de 21 °C dans ce cas-ci).
Lors d’une canicule, davantage que les effets immédiats du «coup de chaud», on note une décompensation de pathologies préexistantes (cardiovasculaires, rénales, respiratoires…). Dès lors, avertit Rémy Selma, «le risque le plus élevé à l’échelle des populations ne consiste pas en une exposition brève à une température très élevée, mais de l’exposition prolongée à des températures chaudes».
Avec la démultiplication des étés où le mercure s’affole, l’espèce humaine n’est-elle toutefois pas en train de s’acclimater? On en est loin. Les habitants du Sud semblent moins accablés que ceux du Nord, mais l’explication principale n’est pas d’ordre physiologique. Il s’agit plutôt d’une adaptation des modes de vie: autre répartition du temps de travail dans la journée, isolation et aération des bâtiments, etc. En réalité, «nos gènes ont plutôt été sélectionnés par l’évolution pour résister au froid des dernières glaciations», lit-on dans un rapport de l’Inserm publié en 2019.
Non seulement le fond de l’eau est frais, le fond de l’air est chaud mais y’a plus de saisons. Or, l’influence des variations de températures sur notre bien-être et notre résistance aux maladies ne se limite pas aux épisodes extrêmes, mais s’observe aussi durant les fluctuations saisonnières.
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