Ne pas tondre en mai, et au-delà: comment le mouvement gagne du terrain
Initialement lancée au sud du Royaume-Uni, l’approche visant à ne pas tondre tout son jardin reste encore marginale. Mais elle pourrait bien devenir la norme dans quelques années.
Cela fait plus d’un an, désormais, que je laisse en permanence un cercle non tondu à l’arrière de mon jardin, à quelques mètres d’une petite prairie. Il ne fait que 20 mètres carrés et après une seule fauche manuelle par an, en octobre, il retrouve une hauteur presque similaire au reste du gazon, que je ne tonds qu’une fois par mois. J’agis dans les limites de mon statut de locataire, mais je peux d’ores et déjà confirmer que le maintien tout au long de l’année de cette petite touche de gestion différenciée ne ressemble en rien à la projection anarchique que certains s’imaginent. Il n’y a ni orties, ni ronces. Et quand bien même ce serait le cas, chacun est libre de garder ou d’enlever certaines espèces injustement considérées comme des «mauvaises herbes» – toutes sont utiles pour la nature. En participant à En mai, tonte à l’arrêt, il ne s’agit pas de renoncer à ses propres aspirations au jardin, mais au minimum de les questionner.
Pour découvrir que la nature spontanée peut parfaitement s’épanouir plus près de nous, sans se montrer nécessairement envahissante. Cette autre manière de regarder, d’apprécier et d’entretenir un jardin reste encore marginale. Cependant, elle gagne du terrain. Chaque participant à l’opération est, sans le savoir, un précurseur de ce qui pourrait devenir une norme particulièrement utile pour la biodiversité dans les années à venir. L’émergence d’un mouvement visant à ne pas tondre en mai, voire au-delà, fut attribuée au départ à l’association britannique Plantlife. Son action «No mow may» convainquit d’emblée des milliers de jardins, au sud du Royaume-Uni, de délaisser la tondeuse. Pourquoi le mois de mai? Non seulement parce qu’il signe – en principe – le retour des beaux jours, mais surtout parce qu’il survient en pleine période de reproduction de nombreux insectes et pollinisateurs. C’est donc un mois propice à la sensibilisation, bien que sous nos latitudes, il est opportun à cet égard de ne pas tondre dès avril.
Depuis lors, plus un jour ne passe sans qu’un article évoque l’intérêt d’une opération telle qu’En mai, tonte à l’arrêt, que Le Vif et ses partenaires proposent depuis quatre ans. Le mouvement se propage dans bon nombre de pays européens. Même les marques de tondeuses-robots se mettent à adapter leur image en conséquence. Depuis peu, l’une d’elle invite ses utilisateurs à ne pas tondre une partie de leur jardin, par l’entremise d’un mode réensauvagement, permettant de laisser automatiquement au moins 5% du gazon non tondu.
Dans mon jardin comme dans bien d’autres, nul besoin de recourir à la technologie pour laisser faire la nature. Alors que le gazon tondu ne laisse apparaître que quelques pâquerettes, ma zone de non-tonte accueille déjà des boutons d’or, pissenlits et marguerites, tandis que des insectes inoffensifs y sautent de tige en tige. L’évidence de la vie qui s’y trame ne fait que renforcer, par effet de contraste, l’obsolescence d’un interventionnisme démesuré à coups de tondeuse.
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