Faut-il autoriser le camping sauvage en Belgique ?
Le camping sauvage, qui consiste à camper dans un endroit qui n’est pas destiné à cette activité, est interdit en Belgique. Si certains questionnent cette interdiction, invoquant le droit de chacun d’avoir accès à la nature, ce n’est pour d’autres pas encore réalisable dans la pratique. Sauf peut-être s’il y a un changement de mentalité…
Pouvoir installer librement sa tente dans la nature, hors des routes et des sentiers balisés, sans contrôle et gratuitement. Devrait-ce être accessible à tous en Belgique ? C’est ce que semble penser Groen, qui a récemment déclaré vouloir en faire un droit pour chacun en Flandre. Dans les faits, c’est compliqué à mettre en place. « En Belgique, on est 390 habitants par kilomètre carré. Ce ne serait pas gérable. Beaucoup profitent du camping sauvage pour s’installer, mettre de la musique et boire de l’alcool. C’est incompatible avec la préservation de la faune », explique Thierry Petit, garde-forestier et agent du Département de la Nature et des Forêts (DNF).
Le camping sauvage, c’est le fait de s’installer dans un lieu qui n’est pas aménagé à cet effet. En Belgique, c’est illégal, comme dans beaucoup de pays européens. Ne pas respecter cette interdiction revient à recevoir une amende pouvant aller jusqu’à 150€. Un peu cher la place de camping… « Nous sommes obligés de mettre en place des mesures liberticides. Pour éviter les dégâts, il faut faire de la prévention et, hélas, aussi de la répression », regrette l’agent de la DNF.
Droit d’accès à la nature
L’idée de Groen, c’est de remplacer l’interdiction totale par une interdiction localisée, et que le camping soit autorisé partout dans les espaces publics. En plus de rendre le voyage beaucoup plus accessible, cela permettrait de susciter un retour à la nature.
En Scandinavie par exemple, c’est une pratique autorisée. Cela peut notamment s’expliquer par des raisons culturelles et démographiques. « Ils ont un rapport différent à la nature. Culturellement, ils la considèrent avec beaucoup plus de respect. Il ne faut pas généraliser, mais en Belgique, ce n’est pas encore le cas », avance Frédérique Gomrée, du Club Alpin Belge. Il faut dire aussi que la Belgique a une densité bien plus importante que la Suède, la Norvège ou la Finlande, qui avoisinent les 20 habitants/km².
Propriété privée de la nature ?
Pourtant, faire de notre environnement un espace public, accessible à tous, peut sembler légitime. A une époque où la privatisation va bon train, et où la moindre parcelle de terrain tend à devenir marchandise, on peut réellement se questionner sur l’intérêt de conserver un rapport « gratuit » à la nature. Thierry Petit tempère toutefois cette idée. « Prendre la nature comme un bien dont on a le droit d’user est problématique. Nous vivons en cohabitation avec une multitude d’autres espèces. Nous voyons toujours l’humain comme une espèce qui se dresse au-dessus des autres, alors qu’elle en est une parmi d’autres. »
Pour que ce projet puisse fonctionner, il semble donc que les mentalités doivent encore évoluer. Cependant, il existe d’autres possibilités pour dormir en pleine nature. Par exemple, le bivouac. Contrairement au camping sauvage, bivouaquer n’implique pas une installation de campement, mais consiste simplement à installer sa couche pour dormir entre le coucher et le lever du soleil. Il y aurait 27 zones de bivouacs en Flandre, le même nombre en Wallonie.
Peut-on espérer de ces zones qu’elles s’étendent progressivement ? « On risquerait d’être vite saturé. Le bivouac, ça ne fonctionne que de façon permanente. Mais qui sait si ce sera respecté ? Il faut que les personnes se disciplinent, prévient Thierry Petit. Beaucoup sont très consciencieux de leur impact sur l’environnement, mais ce n’est pas le cas de tout le monde. Il faut former les gens, faire un travail de sensibilisation pour que les mentalités changent ». Peut-être, alors, que le projet rêvé par Groen pourra devenir réalité.
Gauthier Guilmot
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