Et si… le streaming était moins énergivore ?
Fin mars, Netflix, YouTube (propriété de Google) et Facebook, les trois colosses du Web, répondaient favorablement à la demande de Thierry Breton, commissaire européen au Marché intérieur, de réduire leur débit. But de la manoeuvre : éviter un engorgement du réseau en offrant plus d’espace au télétravail et à l’enseignement en ligne durant la période de confinement.
Un changement presque imperceptible, si ce n’est une qualité de vidéo moins optimale. Finie la définition Full HD et 4K. Une expérience visuelle peut-être moins riche à nos yeux mais un bienfait environnemental certain. » Quand la qualité d’image est réduite, le débit est plus faible. Les réseaux consomment moins d’énergie mais, surtout, le processus de l’image demande beaucoup moins de puissance de calcul et consomme donc moins d’électricité « , explique Nicolas Van Zeebroeck, professeur d’économie et de stratégie numérique à la Solvay Business School (ULB).
En basse résolution, Netflix n’utilise que 1,5 mégabit par seconde (Mb/s). Par contre, la HD pompera 5 Mb/s et la ultra HD 25 Mb/s. Au-delà de la diffusion des films et séries, la plateforme consomme des quantités phénoménales d’électricité pour ses bureaux et studios, ses installations de télécommunications, ses entreprises partenaires et ses serveurs. Selon Sandvine, société d’équipements de réseaux, le streaming vidéo occupe 60,6 % du trafic global sur Internet, dont 12 % pour YouTube et 11,44 % pour Netflix. Il représentait 300 millions de tonnes de CO2 en 2018, selon les calculs de Shift Project, groupe de recherche français.
Dans un rapport sur sa gouvernance sociale et environnementale, Netflix dévoile que sa consommation énergétique était de 451 000 mégawatt-heure (MWh) en 2019, une augmentation de 84 % par rapport à 2018. L’équivalent de la consommation électrique annuelle d’environ 130 000 ménages belges. Des chiffres potentiellement en voie de diminution si les géants de la vidéo y mettaient du leur. Comment ? En s’adaptant aux pratiques des internautes, par exemple. Nombreux sont ceux qui écoutent de la musique sur YouTube, sans s’intéresser aux images qui l’accompagnent. Créer ces dernières s’apparente alors à du gaspillage de données. L’année passée, une étude de l’université de Bristol estimait qu’en n’envoyant que du son aux utilisateurs, la société pourrait réduire son empreinte carbone entre 100 000 et 500 000 tonnes de CO2 par an, soit à peu près la quantité de gaz à effet de serre produite par 30 000 foyers au Royaume-Uni annuellement. Un maigre butin quand on sait qu’en 2016, la diffusion de vidéos en continu sur YouTube a produit l’équivalent de dix millions de tonnes de CO2. Basculer vers des énergies vertes pourrait constituer une option intéressante face à cette pollution numérique mais peu s’y attellent. Selon Greenpeace, l’indice d’énergie » propre » de YouTube, unique bon élève, s’élève à 56 %, contre 17 % pour Netflix et Amazon Prime. De fameux efforts restent donc à faire, mais peut-être le confinement aura-t-il ouvert des pistes de réflexion auprès des kings du streaming ?
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