Climat: la transition écologique ne va pas assez vite, estiment des experts
Dans pratiquement tous les secteurs de l’économie mondiale, la transition écologique est bien trop lente pour éviter une catastrophe climatique, estime un rapport publié mercredi par un consortium d’organismes de recherche.
Qu’il s’agisse de l’électricité, de l’industrie, des transports, de la production alimentaire, de la déforestation ou de la finance, le constat est le même: les progrès réalisés dans 40 indicateurs clés doivent s’accélérer de manière spectaculaire – dans de nombreux cas, ils doivent être multipliés par dix ou plus – pour rester en phase avec l’objectif du traité de Paris de limiter le réchauffement de la planète à 1,5°C ou 2°C.
« La dure vérité est qu’aucun des 40 indicateurs que nous avons évalués n’est en voie d’atteindre ses objectifs pour 2030″, a déclaré l’auteur principal du rapport, Sophia Boehm, chercheuse au Systems Change Lab.
C’est « un signal d’alarme urgent pour les décideurs, qui doivent s’engager dans une véritable transformation de tous les aspects de notre économie », estime Ani Dasgupta, directeur du World Resources Institute, l’un des six groupes de réflexion sur la politique climatique qui ont participé à la rédaction de ce rapport de 200 pages.
Électricité et déforestation
La surface de la Terre s’est déjà réchauffée de 1,2°C, ce qui est suffisant pour déclencher un crescendo mortel et coûteux de tempêtes, d’inondations, de sécheresses et de vagues de chaleur. Et mercredi, à quelques jours du début de la COP27 à Charm-el-Cheikh (6-18 novembre), l’ONU a averti que les engagements pris pour le climat à l’heure actuelle étaient très loin de l’objectif de l’Accord de Paris.
Pour éviter une surchauffe dangereuse, la pollution mondiale au CO2 doit diminuer de 40% d’ici à la fin de la décennie. En 2050, le monde doit être neutre en carbone, c’est-à-dire compenser les émissions restantes par l’élimination du CO2.
Selon le rapport, les manques les plus criants apparaissent dans le secteur de l’électricité et dans celui de la déforestation.
L’élimination progressive du charbon utilisé pour produire de l’électricité sans filtrer les émissions de CO2 doit être six fois plus rapide, ce qui équivaut à l’arrêt de près de 1.000 centrales électriques au charbon par an au cours des sept prochaines années, ont-ils constaté.
Le secteur de l’électricité est la plus grande source d’émissions de CO2 au niveau mondial, et le charbon – qui représente près de 40 % de la production d’électricité dans le monde – est de loin le plus émetteur en carbone des combustibles fossiles.
Les progrès doivent également être multipliés par deux en matière de déforestation.
« S’il est difficile d’atteindre l‘objectif de 1,5°C aujourd’hui, c’est totalement impossible si l’on réduit nos puits de carbone » que sont les forêts, a avertit Kelly Levin, directrice scientifique au Bezos Earth Fund.
Manque de financements
Dans plusieurs autres domaines, nous allons dans la mauvaise direction, souligne le rapport. C’est le cas de la part du gaz naturel dans la production d’électricité, des kilomètres parcourus par les voitures particulières et de la pollution par le carbone dans l’agriculture.
Les auteurs estiment ainsi que les systèmes de transports publics tels que les métros ou les réseaux de bus doivent se développer six fois plus vite, que la quantité de carbone émise lors de la production de ciment doit diminuer dix fois plus vite, ou encore que la consommation de viande par habitant doit baisser et le passage à des régimes alimentaires durables se faire cinq fois plus vite.
Enfin, concernant le financement de la transition, pierre d’achoppement lors des COP, le rapport estime qu’il doit croître dix fois plus vite que les tendances récentes. Il avait atteint 640 milliards de dollars en 2022.