Climat : avant la COP21, le bilan mitigé du protocole de Kyoto
Les parties ayant participé à la COP21 se félicitent d’un » accord historique « . Cet accord devra remplacer le » protocole de Kyoto « , signé il y a une vingtaine d’années et en vigueur depuis dix ans.
L’accord de Paris doit prendre le relais du protocole de Kyoto à partir de 2020. Ce protocole a été adopté en 1997 lors de la COP3. Mais l’accord n’est entré en vigueur que huit ans après sa signature et n’engageait pas les plus grands pollueurs de la planète.
Cet accord imposait aux pays industrialisés, et à eux uniquement, de réduire d’ici 2012 leurs émissions de gaz à effets de serre (GES) de 5,2% par rapport à 1990. L’accord devait entrer en vigueur après la ratification par 55 pays dont les émissions combinées représentent 55 % du total des émissions de 1990. L’accord ne s’appliquait pas aux grands pays émergents comme la Chine, l’Inde ou encore le Brésil. Les pays en développement devaient cependant se conformer à certaines normes environnementales.
Les Etats-Unis, qui étaient à l’époque considérés comme les plus grands pollueurs de la planète, ont refusé de le ratifier en 2001, prétextant que l’accord allait à l’encontre de ses intérêts économiques. Depuis 2006, c’est la Chine qui est le premier pays émetteur de CO2 à la place des Etats-Unis, devant l’Union européenne, l’Inde, la Russie et le Japon. Le protocole de Kyoto est finalement entré en vigueur en février 2005, après la ratification par la Russie en 2004.
Dix ans après, un bilan mitigé
Dix ans après son entrée en vigueur, le bilan concernant le protocole de Kyoto est mitigé. Selon des données des Nations Unies, les émissions des pays signataires du protocole ont diminué de 24 % entre 1990, l’année de référence, et 2012. Cette baisse donne l’impression que l’accord a été d’une efficacité redoutable, mais les chiffres ne sont pas aussi significatifs qu’ils en ont l’air.
Premièrement, ce bilan inclut les Etats de l’ancien bloc de l’Est, dont l’économie s’est effondrée autour de 1990, entraînant une énorme chute de leurs émissions de gaz à effets de serre, de 40,6% entre 1990 et 2012. Cela contribue à baisser la moyenne de tous les pays signataires, mais ne les concerne pas tous. Deuxièmement, il faut bien entendu exclure de ce bilan les Etats-Unis, qui n’ont jamais ratifié le protocole, alors qu’ils étaient les plus grands émetteurs de GES. Troisièmement, il faut aussi exclure le Canada, qui s’est retiré du protocole de Kyoto en 2011 sous la menace de sanctions après son entrée en vigueur, et qui a un des pires bilans des pays signataires (+ 18,2 de GES entre 1990 et 2012), selon Radio Canada. Si l’on fait la moyenne en tenant compte de ces facteurs, la baisse réelle des émissions des pays signataires ne serait que de 4%, et donc en deçà de l’objectif de base qui était de 5,2%.
Une des erreurs principales de l’accord de Kyoto était le nombre de pays qui n’étaient pas concernés, dès le départ ou par manque de ratification. L’accord de Paris est différent sur ce point, mais pas uniquement. Les 29 articles de l’accord issu de la COP 21 n’instaurent ni « comité de contrôle du respect des dispositions », ni de mécanisme de sanction, comme le prévoyait le protocole de Kyoto. A Kyoto, les pays développés s’étaient engagés à rattraper d’éventuels dérapages dans leurs engagements en assumant une forme d' »amende » de 30 % de réduction d’émissions supplémentaire. Raison pour laquelle certains Etats, comme le Canada, se sont tous simplement retirés du processus.
L’accord de Paris est-il vraiment « juridiquement contraignant » ?
L’accord issu de la COP21 est annoncé comme « juridiquement contraignant ». Cette question suscite encore un débat.
« Du point de vue du droit international, l’accord n’est pas, à strictement parler, contraignant dans la mesure où il ne prévoit pas de mécanisme coercitif ou de sanction pour les pays qui ne respecteraient pas leurs engagements« , explique Matthieu Wemaëre, avocat aux barreaux de Paris et de Bruxelles, expert en droit du climat, dans une interview au journal Le Monde.
Mais l’accord de Paris est tout de même contraignant à de nombreux points de vue. Par exemple de par sa forme juridique. Il s’agit d’un protocole additionnel à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, ce qui lui confère une valeur de traité international. « Il ne porte pas le nom de protocole ou de traité, sans quoi il aurait dû passer devant le Congrès américain, majoritairement républicain, qui aurait empêché sa ratification, explique Matthieu Wemaëre. Mais il en a bien la force. » L’accord comporte également de nombreuses obligations juridiques de résultats ou de moyens. Le texte prévoit également un mécanisme de transparence, pour vérifier les informations fournies par les pays sur leurs émissions et leurs progrès. Contrairement au protocole de Kyoto, ce mécanisme s’appliquera aux pays développés, mais aussi aux pays en développement.
Pour entrer en vigueur, il devra être ratifié selon les mêmes règles que le protocole de Kyoto, à savoir par « au moins 55 pays » représentant « au moins 55 % » des émissions mondiales.
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